Eichmann-Barbie : les criminels nazis filmés face à leurs juges

Eichmann-Barbie : les criminels nazis filmés face à leurs juges A quelques jours d'intervalle, les 50 ans du procès Eichmann et la sortie d'un DVD sur le procès Barbie nous replongent dans deux événements historiques filmés dans leur intégralité.

L'un a été jugé à Jérusalem en 1961, l'autre en France en 1987. Tous les deux ont été capturés après des années de cavale en Amérique du sud et tous les deux ont fermement nié leur responsabilité, estimant avoir fait "ce qu'on [leur] demandait". Adolf Eichmann et Klaus Barbie, deux des criminels nazis les plus tristement célèbres, refont surface en avril 2011 et avec eux deux procès qui ont marqué l'histoire. Des procès historiques car décrivant par le menu l'horreur et la barbarie nazie. Historiques aussi parce qu'ils ont donné une tribune inespérée aux victimes du nazisme. Et historiques enfin parce que ces deux procès ont été exceptionnellement filmés dans leur intégralité.

 

Le procès Barbie : 11 mai - 4 juillet 1987

Un coffret de six DVD, coédité par Arte et l'Ina est en vente à partir du 20 avril. Il retrace les trente-sept jours d'audience du "Procès Barbie". Voici sa première interview télévisée après son arrestation à La Paz :

Le reportage d'Antenne 2 le jour de sa condamnation, le 4 juillet 1987 :

Klaus Barbie fut l'un des chefs de la Gestapo à Lyon pendant la guerre. Après son affectation aux Pays-Bas, où il s'illustrera déjà dans la chasse aux Juifs, un passage sur le front russe, puis une mission secrète en Suisse, il y gagnera, à partir de 1943, le surnom de "boucher de Lyon". Sous ses ordres sont traqués, torturés et exécutés de nombreux otages et des centaines de résistants, dont Jean Moulin. Des milliers de Juifs seront aussi déportés à Drancy. A la Libération, Klaus Barbie rejoint l'Allemagne pour préparer sa fuite et sa vie en clandestinité. Arrêté par les alliés à Munich, il parvient à s'évader à la fin de la guerre.

Le "savoir-faire" de Klaus Barbie aurait été utilisé par les Américains lors de la guerre froide contre les communistes, notamment en France. Il finit pourtant par fuir en Argentine puis en Bolivie avec l'aide de la CIA sous l'identité de "Klaus Altmann". Vendeur d'armes, conseiller en "torture", il aurait soutenu plusieurs dictatures sud-américaines avec la bienveillance de la CIA. Dès le début des années 1960, son lieu de résidence est connu, mais il reste protégé par le régime bolivien et une certaine connivence des alliés. Il faudra la ténacité de militants antinazi comme Beate Klarsfeld pour que Barbie soit arrêté puis expulsé vers la France en février 1983. Klaus Barbie a été condamné à la réclusion à perpétuité pour crimes contre l'humanité. Il est mort d'un cancer en 1991, à 78 ans.

 

Le procès Eichmann : 11 avril - 15 décembre 1961

Jusqu'au 28 septembre, le Mémorial de la Shoah à Paris consacre une exposition au procès Eichmann. Pour les 50 ans de l'événement, l'intégralité du procès a été publiée sur You Tube (en version en anglaise uniquement). Voici un extrait de l'Ina ou l'on entend Eichmann annoncer, au sixième jour de son procès, qu'il plaidera "non coupable".

A la tête de l'office central du Reich en charge des "affaires juives et de l'évacuation", Adolf Eichmann est arrêté sous une fausse identité en Autriche en 1945, mais s'échappe en 1946. Bûcheron puis éleveur de poules en Allemagne sous le nom de Otto Henninger, il est l'objet d'une traque sans relâche de la Commission des crimes de guerre des Nations unies, après avoir été désigné comme le "cerveau de la solution finale". En 1950, il parvient à fuir en Argentine grâce à un vaste réseau d'exfiltration d'anciens criminels nazis dont bénéficiera aussi Klaus Barbie. Sur place, sous le nom de Riccardo Klement, il parvient à faire venir sa femme et ses enfants.

Longtemps protégé par les alliés pour raison d'Etat, Eichmann est finalement enlevé le 11 mai 1960, en pleine rue, à Buenos Aires et transféré en Israël. L'opération serait l'œuvre du Mossad, les services secrets israéliens. Le 11 avril 1961, il comparait à Jérusalem pour quinze chefs d'accusation au cours d'une procédure spéciale et dans des conditions de sécurité exceptionnelles, pour éviter toute vengeance ou suicide. Le procès attirera deux fois plus de journalistes que celui de Nuremberg après guerre. Eichmann sera condamné à mort le 15 décembre 1961 et pendu le 1er juin 1962. Fanatique antisémite ou simple carriériste ? L'organisateur en chef de la "solution finale" n'aura cessé de plaider son innocence estimant avoir "suivi les ordres".