Comment le groupe islamiste syrien HTS est impliqué dans l'assassinat de Samuel Paty
Ancien membre du groupe terroriste al-Qaïda, le chef du Hayat Tahrir al-Sham (HTS) répète depuis des années s'être détourné du djihad global comme le rapporte le journaliste Wassim Nasr sur RFI, et pourtant le groupe islamiste syrien n'est pas étranger à des actions de djihadistes. Il est même relié à un attentat qui a profondément choqué la France : l'assassinat de Samuel Paty en octobre 2020. Le dirigeant du groupe islamiste Ahmed al-Chareh, aussi désigné par son nom de guerre Abou Mohammad al-Joulani, n'est pas personnellement impliqué dans l'attaque terroriste qui a touché le professeur d'un collègue de Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines. Mais l'assaillant de Samuel Paty, Abdoullakh Anzorov, était en contact avec des membres du groupe HTS comme le rapportait Le Parisien.
Le jeune terroriste qui était âgé de 18 ans - il a été abattu par les forces de l'ordre après l'assassinat de Samuel Paty - était fasciné par le groupe islamiste créé en Syrie en 2012 (d'abord sous le nom de Front al-Nosra. L'enquête menée sur l'assaillant a permis de découvrir une vidéo postée par l'assaillant sur le réseau social Snapchat seulement 12 jours avant l'assassinat de l'enseignant et dans laquelle il disait : "Il n'y a pas de doutes que ce qui se passe à Idleb est le vrai djihad où Allah choisit parmi ses serviteurs les shuhada (les martyrs, ndlr), et le meilleur groupe actuel à rejoindre, c'est Hayat Tahrir al-Cham".
La propagande et l'encouragement d'un membre du HTS
Plus que de louer la cause du HTS, Abdoullakh Anzorov, était en contact avec un des membres du groupe via Instagram. Il avait d'ailleurs informé cette personne, répondant au pseudo "Dnevnik_71", de son acte terroriste en envoyant une photo de la tête décapitée de Samuel Paty, une capture d'écran de la revendication de l'attentat et un message audio se résumant à une phrase : "J'ai décapité le prof, là je vais faire le djihad en France." Un message envoyé seulement quelques minutes après les faits précisait le journal francilien.
De l'autre côté de l'écran se trouvait un homme : Faruq Shami. Il s'agit d'un djihadiste originaire du Tadjikistan qui se faisait passer pour un reporter indépendant couvrant l'activité des groupes djihadistes en Syrie, mais qui, selon un procès-verbal des policiers de la sous-direction antiterroriste (Sdat), jouait un rôle "dans le djihad médiatique et la propagande de HTS". Les données partagées par le FBI américain avec les policiers français confirmaient la présence de Faruq Shami à Idleb, bastion du HTS au nord-ouest de la Syrie. Via le compte de "Dnevnik_71" et d'autres, Faruq Shami était entré en contact avec plusieurs jeunes personnes radicalisées dont l'assaillant de Samuel Paty. Le djihadiste avait d'ailleurs répondu au dernier message d'Abdoullakh Anzorov : "Allah Akbar ! Que la paix, la miséricorde et la bénédiction d'Allah soit sur toi". Le membre de HTS était un temps considéré comme le possible commanditaire de l'assassinat du professeur avant d'être relayé au rôle de conseiller ou d'inspirateur pour le terroriste du 18 ans.
HTS avait fermement nié toute implication dans l'assassinat de Samuel Paty et l'avait fait savoir au journaliste Wassim Nasr : "Nous vivons dans un monde ouvert, tout le monde peut contacter tout le monde, nous ne connaissons pas l'étudiant tchétchène et son acte est de la responsabilité du président français qui a provoqué et accusé l'islam dans une majorité de ses discours. Ce [que l'étudiant] a fait est le résultat de ce qui se passe en France et non à Idlib".
Des questions sur le djihad et la mort en martyr
L'assassin de Samuel Paty était également en contact avec un deuxième membre de HTS, un sniper qui utilisait le nom d'un modèle de mitrailleuse lourde soviétique comme pseudo : "12.7X108". D'après les informations du FBI, Abdoullakh Anzorov s'était renseigné auprès du combattant sur la mort en martyr d'après les textes religieux seulement un mois avant l'attentat. Il avait aussi interrogé le djihadiste sur la difficulté de "franchir la frontière turco-syrienne" précisant son envie de "faire la hijra (émigration, ndlr) dans le chemin d'Allah (et de) combattre". Quelques semaines plus tard, le terroriste tchétchène avait finalement revu ses plans pour mener le djihad en France en commençant par tuer Samuel Paty.