Ces ultimes barrières aux pleins pouvoirs de Donald Trump
Il est désormais le 45ème et le 47ème président des Etats-Unis. Pour son retour au pouvoir, Donald Trump peut se vanter d'avoir une majorité absolue au Congrès (l'équivalent du Parlement) et d'avoir une Cour suprême majoritairement conservatrice, donc favorable à son camp. Un scénario rêvé pour le locataire de la Maison Blanche, mais qui fait craindre un pouvoir très vertical et un contrôle total des institutions par le chef de l'Etat qui a exprimé sa détermination à mener sa politique à bien. "J'agirai à une vitesse et avec une force sans précédent" pour "régler chacune des crises auxquelles notre pays est confronté", a déclaré Donald Trump dimanche soir, la veille de son investiture, lors d'un meeting à Washington DC.
Il compte donner le ton dès son premier jour à la Maison Blanche en signant une centaine de décrets présidentiels, des "executive orders", selon son équipe. Ces textes n'ont pas valeur de lois, mais sont des directives adressées par le président des Etats-Unis aux fonctionnaires et aux agences gouvernementales pour gérer l'action publique, ce qui comprend l'armée, mais aussi d'autres institutions gérant l'éducation ou la santé. Parmi les mesures que Donald Trump veut faire appliquer : le lancement du "plus grand programme d'expulsions de l'histoire américaine" à l'encontre des migrants clandestins ; des taxes douanières contre le Mexique, le Canada ou la Chine ; la facilitation du forage et d'exploitation d'énergies fossiles ; ou encore l'accord de grâce présidentielle à des assaillants du Capitole en 2021.
Une majorité qui reste fragile au Congrès
Signer autant de décrets est "une façon de montrer que l'administration Trump est au travail et qu'elle sera efficace", explique la politologue spécialiste des Etats-Unis, Nicole Bacharan, au Parisien. Mais pour Alexis Pichard, chercheur associé au Centre de recherches anglophones de l'université Paris Nanterre interrogé par BFMTV, cette hyperactivité de Donald Trump lors de son premier jour est la preuve que le président élu rencontrera quelques difficultés législatives malgré sa majorité au Congrès.
"Il ne pourra pas faire tant de choses que ça d'un point de vue législatif. À la Chambre des représentants, il n'a que cinq voix d'avance", rappelle le spécialiste. Le camp républicain dispose de 220 élus contre 215 pour les démocrates, quand la majorité est fixée à 218 voix. Une avance qui peut donc être renversée avec seulement quelques voix. Quant au Sénat, le républicain peut s'appuyer sur 53 élus parmi les 100 sénateurs. "Il n'a pas la supermajorité de 60 voix nécessaire pour faire adopter certains textes", ajoute Alexis Pichard. D'autant que le chef de file des républicains au Sénat n'est pas un trumpiste et pourrait se désolidariser de certaines mesures. Si Donald Trump a un avantage certain au Congrès, il semble rester quelques garde-fous. A noter que cette majorité pourrait être confirmée ou renversée lors des élections de mi-mandat prévues en 2026.
Les limites de la Constitution
Plus que la composition du Congrès, majoritairement rouge et donc favorable au président élu, ce sont les textes législatifs qui pourraient servir de garde-fous, notamment pour les nombreux décrets présidentiels annoncés. Les "executive orders" peuvent porter sur tous les sujets, mais ont pour obligation de respecter les lois préexistantes. Elles doivent également respecter la Constitution. "Puisque le président est chargé de faire appliquer les lois, il ne peut pas prendre de mesure qui aille à l'encontre de celles-ci", rappelle Nicole Bacharan. Cette Constitution s'oppose déjà comme un obstacle à un projet de Donald Trump : la suppression du droit du sol, lequel est protégé par le 14ème amendement.
Et si Donald Trump envisageait de modifier la Constitution ? C'est une possibilité, mais cette manœuvre serait difficile à mener à bien, malgré une majorité législative. L'article 5 du texte fondamental précise les conditions de sa modification : soit les deux tiers du Congrès, soit les deux tiers des Etats doivent proposer un ou des amendements qui doivent ensuite être ratifiés par les législatures des trois-quarts des Etats-Unis pour remplacer ou s'ajouter au texte suprême. Or, sur les 50 Etats américains, 27 sont dirigés par des gouverneurs républicains : une courte majorité loin d'assurer le soutien des trois-quarts des Etats.