Les sondages et les primaires (partie 2) : 34 questions, un seul vainqueur

Indépendamment des questions posées, des réponses proposées et des "populations" interrogées, François Hollande devance systématiquement ses concurrent(e)s dans les sondages. Malgré la méfiance vis-à-vis des sondeurs, cette convergence est à prendre en compte.

Le statut de "favori" que les commentateurs accordent au député de Corrèze ne s'appuie pas seulement sur des impressions mais sur une accumulation de données apparemment convergentes. Les enquêtes disponibles autorisent-elles cependant à produire des affirmations aussi catégoriques ? Pour dire les choses autrement, que valent ces sondages qui sont supposés manifester la position avantageuse de François Hollande ?

Depuis la mi-août, les neuf principaux instituts de sondage français ont rendu public pas moins de 34 questions qui peuvent permettre de comparer la popularité respective d'au moins deux des six candidats à la primaire socialiste. Or, indépendamment des questions posées, des réponses proposées et des "populations" interrogées (ensemble des Français de 18 ans et plus, "sympathisants de gauche", "sympathisants PS" ou "personnes certaines d'aller voter lors de la primaire"), François Hollande devance systématiquement ses concurrent(e)s. Cinq types de questions sont en effet utilisés par les instituts pour hiérarchiser le poids des candidats dans l'opinion et espérer bénéficier du maximum de reprises médiatiques (voir tableau n°1) :

1) On trouve d'abord les intentions de vote au premier et au second tour de la primaire, auquel on peut ajouter les "souhaits" de victoire (qui ne concernent donc pas seulement les interviewés qui comptent se rendre aux urnes). Cette première modalité de questionnement est en apparence la plus évidente pour mettre à jour les préférences des sondés et espérer pronostiquer le résultat final.

2) Il y a ensuite les intentions de vote lors de l'élection présidentielle. En présentant plusieurs hypothèses de premier ou de second tour, ces questions sont supposées révéler quel(le) candidat(e) a le plus de chances d'accéder au second tour et de faire gagner le Parti socialiste face à Nicolas Sarkozy.

3) Les interviewés peuvent également être amenés à choisir, dans une liste, le ou la candidat(e) qui correspond le mieux à la qualité suggérée par l'enquêteur : la crédibilité (pour régler les problèmes d'emploi, de sécurité ou d'endettement), la proximité avec les Français ordinaires ou encore, sur un mode plus saugrenu : celui/celle qui serait "le meilleur baby sitter", "le meilleur syndicaliste", "le meilleur prof" ou "le meilleur chef d'entreprise" celui/celle à qui on "confierait les clés de chez soi" ou "l'organisation de son mariage" (Harris Interactive / M6, 16 et 19 septembre 2011).

4) Plus classiquement, les instituts et leurs commanditaires des médias d'information s'appuient sur les baromètres de popularité qui, chaque mois, permettent de dresser la liste des hommes et des femmes politiques les plus populaires dans le pays. Pour chacun d'entre eux / elles, on demande aux interviewés s'ils en ont une bonne opinion (Viavoice / Libération, IFOP / Paris-Match) ou s'ils souhaitent les voir jouer un rôle important d'avenir (TNS Sofres / Figaro Magazine). Ils ne sont donc pas mis directement en concurrence : une même personne peut en effet avoir une bonne opinion de Martine Aubry et de François Hollande.

5) Enfin, dernier instrument pour déterminer la "solidité" des candidat(e)s PS dans l'opinion : comparer différents duels entre Nicolas Sarkozy et ses principaux rivaux (généralement Hollande, Aubry et Royal) sur tel ou tel domaine d'action politique (lutter contre l'insécurité, sortir la France de la crise économique, etc.).

Tableau n°1 (cf. ci-dessous). Les modalités de mise en concurrence des candidats à l'investiture socialiste dans les sondages d'opinion publiés (15 août-25 septembre 2011)

Répétons-le : François Hollande remporte l'ensemble de ces épreuves que construisent les instituts de sondage. A quelques exceptions près... Aux yeux des "sympathisants de gauche" interrogés par Harris Interactive, Ségolène Royal ferait une "meilleure baby sitter", Arnaud Montebourg un meilleur compagnon de voyage et Martine Aubry une meilleure confidente... Ininterprétables, ces exceptions confirment la règle.