Interview de Macron à Zadig : les confessions du président (presque) candidat

Interview de Macron à Zadig : les confessions du président (presque) candidat MACRON. Le chef de l'Etat a impulsé un changement de ton dans sa communication. Exit les discours solennels, Emmanuel Macron veut apparaître davantage connecté au quotidien des Français. Son interview à Zadig lui permet de se confier de manière plus intime, endossant le costume d'un président-candidat.

Emmanuel Macron n'est pas encore en campagne pour la présidentielle 2022, mais le ton a déjà changé. Exit les discours hiératiques, le chef de l'Etat s'est détaché de la communication rigide et institutionnelle depuis quelques temps déjà. Il avait déjà fait un pas de côté en accordant la semaine dernière près d'une heure aux comédiens McFly et Carlito pour un jeu d'anecdotes à l'Elysée. Entre deux dossiers sensibles à gérer en urgence - la crise biélorusse, le coup d'Etat au Mali - le chef de l'Etat a pris également le temps d'accorder une interview fleuve, de 23 pages, à la revue trimestrielle Zadig, dans laquelle il manifeste son envie de prendre de la hauteur et de parler de sa relation à la France et de sa conception de l'avenir.

Le chef de l'Etat inscrit cet épisode si singulier de pandémie que nous vivons dans un tournant historique. "On revit des temps au fond très moyenâgeux : les grandes jacqueries, les grandes épidémies, les grandes peurs Je relierais la période que nous vivons à la fin du Moyen Âge et au début de la Renaissance. C'est l'époque de phénomènes qui forgent un peuple, je dirais même de la réinvention d'une civilisation", dit-il, poursuivant la comparaison : "C'est aussi un moment de tensions qui travaillent le pays, entre un État central et des féodalités. C'est enfin un temps où la question européenne se pose, sans oublier le rapport entre les religions. La capacité à embrasser le futur, à se projeter, est alors déterminante pour le rebond que prend le pays. C'est ce qui me rend très confiant".

En poursuivant son analyse sur l'avenir du pays, Emmanuel Macron juge essentiel de répondre au "sentiment de décrochage" de nombreux Français qui ressentent "la même inquiétude de la désindustrialisation, d'un sentiment d'injustice, d'une impression de trahison démocratique". "Nous avons pensé pouvoir faire un pays sans usines", a-t-il ajouté, dans un laïus de campagne, jugeant que malgré les crises, les Français sont "un peuple très résistant​" et "extraordinairement tenace". Ça ne mange pas de pain.

"Quelque chose va se passer à Marseille"

Le chef de l'Etat, dans le même ton, à la fois détaché et astucieusement intime, évoque sa relation à la France. Décrivant rapidement "une enfance dans une espèce de bulle plutôt heureuse" en Picardie, il se confie avec nostalgie : "J'ai vécu chez mes parents et mes grands-parents, et passé d'incalculables heures dans une bibliothèque pendant de nombreuses années de ma vie, dans le petit appartement de ma grand-mère. Malgré tout, par le hasard des amitiés, des voyages de classe, des cheminements que l'on fait en famille, j'ai eu des repères, des îlots dans la ville : une librairie que j'aimais, le théâtre".

Le président-candidat salue aussi la "forme de ruralité heureuse" du Sud-Ouest. Conscient de son image d'homme "déconnecté des territoires", il insiste : "J'aime le Loc, Figeac, Cahors", dit-il, révélant que les Hautes-Pyrénées sont pour lui "un autre centre de gravité". Et si une ville doit se détacher, c'est pour Emmanuel Macron dans les Bouches-du-Rhône qu'il faut regarder : "Quelque chose va se passer à Marseille, car les conditions de possibilité d'une réinvention du lieu et d'une réappropriation sont là, indépendamment de la vie politique", dit-il.

Dans cette très longue interview, on retiendra aussi des propos plus politiques sur l'immigration, comme pour se démarquer encore davantage de sa rivale pour la présidentielle. Parlant des migrants quittant l'Afrique pour l'Europe, il déclare : "Il faut dire à ces hommes et à ces femmes : vous qui êtes là par les cruautés de l'histoire, par la volonté de vos grands-parents, de vos parents ou par la vôtre propre, vous êtes une chance pour notre pays".