La loi immigration aurait-elle été votée sans les voix du RN ?
Le projet de loi immigration a été voté par le Parlement, mardi 19 décembre, après d'intenses négociations en CMP pour faire évoluer le texte. Une victoire acquise "sans les voix des députés RN", a-t-on pu entendre de la part du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin. En réalité, l'équation est un peu plus complexe.
À l'Assemblée nationale, le nombre de suffrages exprimés lors du scrutin était de 535. La majorité absolue est donc, arithmétiquement, de 268. 349 députés ont voté pour l'adoption du texte, 186 ont voté contre. Les 88 députés du Rassemblement national (RN) ont voté en faveur du projet de loi. Alors, le gouvernement vraiment aurait-il pu faire voter cette loi sans les députés RN ?
Si le RN avait voté contre, la loi n'était pas adoptée
Deux autres scénarios étaient envisageables. Le premier : une abstention des députés RN. Dans ce cas, la loi immigration était bien adoptée et c'est sur ce constat que le gouvernement se fonde pour assurer que les voix de l'extrême droite n'ont pas compté. Pour arriver à un tel résultat, il est nécessaire de retirer les 88 voix des députés RN du vote, mais également du décompte total des voix. Le nombre de suffrages exprimés passe de 535 à 447, et automatiquement, la majorité absolue à 224. Dans un tel cas de figure, les 261 voix obtenues à l'Assemblée suffisent.
Mais en droit électoral, c'est bien le nombre de suffrages exprimés qui comptent et la majorité des voix une fois établie la majorité sur ces suffrages exprimés. Et dans cette perspective, les votes du RN ont bel et bien permis à la majorité de faire voter le texte à l'Assemblée nationale. Comprenons bien : la majorité absolue est de 268. Le texte n'a été adopté qu'avec 261 voix pour. La position du RN dans ce vote n'est donc pas neutre, leur choix a influé sur les résultats. Si le RN avait voté contre le texte, ce dernier aurait alors été rejeté. Voilà pourquoi les voix du Rassemblement national ont bien pesé dans l'adoption du texte.