La retraite des agriculteurs recalculée... et les plus pauvres défavorisés ?

La retraite des agriculteurs recalculée... et les plus pauvres défavorisés ? Une réforme votée en 2023, qui n'est pas encore entrée en vigueur, vise à recalculer le montant des pensions de retraites des agriculteurs. Elle pourrait mettre le feu aux poudres dans les jours à venir.

Coup de tonnerre pour la retraite des agriculteurs ? En février dernier, une proposition de loi visant à améliorer les pensions de la profession en modifiant le mode de calcul, a été votée. Mais son entrée en vigueur a été reportée, le décret pour rendre cette réforme effective n'ayant toujours pas été publié. La loi pourrait être effective au 1er janvier 2026, comme indiqué sur le site de l'Assemblée nationale, notamment pour laisser le temps au ministère de l'Agriculture se pencher sur les modalités d'application.

Un rapport a aussi été rédigé par des services du gouvernement sur cette loi venue d'une initiative parlementaire, pour bien en mesurer les impacts et "garantir le niveau des pensions et des droits acquis" des agriculteurs. Ce rapport, qui devait être remis au Parlement en mai dernier, n'a toujours pas été rendu public. Si bien que la FNSEA accuse le gouvernement de jouer la montre en ne publiant pas ce document d'évaluation. Et on comprend pourquoi : il a pu être consulté dimanche par Politico et ce qu'il contient est potentiellement explosif.

La loi, qui a été portée par le député LR de la 2e circonscription de l'Aisne, Julien Dive, prévoit une pension de retraite basée sur les 25 meilleures années de revenus des agriculteurs. Un calcul censé être plus avantageux. La proposition avait d'ailleurs été soutenue par la FNSEA en novembre 2022. Mais la réalité serait tout autre et pourrait provoquer de vives réactions dès que le rapport d'évaluation sera rendu public.

Les "plus petits agriculteurs" pourraient voir leur pension de retraite baisser

Selon Politico en effet, "le rapport sur la proposition de loi Dive tempère largement les retombées positives de la mesure". Et le constat est cinglant : "Les services du gouvernement parviennent en fait à la conclusion que le nouveau mode de calcul bénéficierait surtout aux exploitants à haut revenu, et pas aux plus petits agriculteurs, qui pourraient même y perdre".

Dans le détail, sur la période 2030-2040, 30% des deux premiers quintiles (les deux cinquièmes les plus pauvre des agriculteurs) perdraient au minimum 10% de leur pension. À l'inverse, les deux derniers quintiles comprendraient davantage de gagnants. De quoi minimiser l'impact de cette loi. A moins que le gouvernement ne revoit la copie et change les dispositifs à appliquer en urgence. 

"Le régime agricole était un des derniers systèmes de retraites calculé sur l'ensemble de la carrière. C'est un signal fort et positif pour les agriculteurs et agricultrices après 20 ans de combat" se réjouissait le député Julien Dive, le 28 février 2023 sur France Culture après l'inscription de sa loi au Journal officiel. Il est fort à parier que l'élu doive lui aussi revoir ses arguments.

Politico rapporte d'ailleurs que de nouvelles propositions censées améliorer les retraites agricoles sont sur la table et étudiées par le gouvernement. Histoire de désamorcer la bombe. En revanche, elles ne devraient pas faire partie des mesures complémentaires à venir, et évoquées par le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, lundi matin, dans l'émission Les 4V sur France 2.

Le montant des pensions de retraite des agriculteurs est aujourd'hui très faible. "La plupart des agriculteurs ce sont des retraites de l'ordre de 1 000 euros, moins certaines fois avec des pensions de réversion qui sont entre 700 et 800 euros", s'agaçait le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, la semaine dernière au micro de France Inter. Un calcul du syndicat de 2023, validé et relayé par le gouvernement, évaluait que "tous régimes confondus, y compris les régimes complémentaires, les anciens non-salariés agricoles (chefs, conjoints et aides familiaux) ayant eu une activité agricole perçoivent une pension de 1 150 euros bruts par mois", alors que la moyenne nationale dépasse 1 500 euros bruts.