Que reprochait Robert Badinter aux insoumis et à Jean-Luc Mélenchon ?

Que reprochait Robert Badinter aux insoumis et à Jean-Luc Mélenchon ? Des représentants de la France insoumise se sont rendus à l'hommage national rendu à Robert Badinter contre l'avis de la famille. Pourquoi le parti de la gauche n'était-il pas le bienvenu ?

A l'annonce de la mort de Robert Badinter, le vendredi 9 février, les forces politiques ont eu un mot pour l'ancien ministre de la Justice. Mais elles n'étaient pas toutes les bienvenues à l'hommage national rendu à l'artisan de l'abolition de la peine de mort sur la place Vendôme, à Paris, ce mercredi 14 février. La famille de l'ancien garde des Sceaux s'est opposée à la venue des représentants du Rassemblement national, aux idées contraires à celles que partageait et défendait Robert Badinter, et à la participation des membres de la France insoumise. Si l'extrême droite a respecté la volonté de la famille, les insoumis ne s'y sont pas pliés. 

Le combat entre Robert Badinter et l'extrême droite est évident : de son temps le ministre s'opposait à Jean-Marie Le Pen sur tous ses combats contre la peine de mort, pour la dépénalisation de l'homosexualité ou encore l'humanisation des prisons. Une opposition qui s'est poursuivie avec Marine Le Pen qui, jusqu'en 2017, se disait favorable au retour de la peine de mort en France. Mais les mauvaises relations entre la garde de Sceaux de François Mitterrand et les insoumis de Jean-Luc Mélenchon sont plus récentes et moins évidentes. Elle tiennent à une chose : Robert Badinter, ainsi que sa femme la philosophe Elisabeth Badinter, reprochent au parti de Jean-Luc Mélenchon d'avoir trahi la laïcité en défendant le communautarisme.

"Le communautarisme, c'est la mort de la République".

La France insoumise est donc un visage de la gauche qui ne soutenait pas Robert Badinter. Dans le milieu des années 2010, le couple Badinter formulait déjà un reproche contre la gauche : celui d'avoir arrêté de défendre les valeurs de la laïcité et d'avoir en conséquence favoriser la montée du communautarisme. Or, "le communautarisme, c'est la mort de la République . [...] Si nous devions avoir des communautés qui négocient leur adhésion ou leur participation, ce serait fini. Ce serait un autre type de République, je ne le souhaite pas" expliquait Robert Badinter dans un entretien avec Darius Rochebin sur LCI en septembre 2020.

Mais le coupe précisait sa pensée bien avant et ciblait un autre mal de la gauche lié au communautarisme. "Le pire de cette gauche communautariste est d'avoir accepté le concept d'''islamophobie', qui a foutu en l'air le principe de laïcité, car s'élever contre des signes religieux devenait un crime" estimait Elisabeth Badinter au micro de France Inter en 2016. Si cette critique visait la gauche, aujourd'hui elle semble s'adresser davantage à la France insoumise et Jean-Luc Mélenchon qui affichent leur combat contre l'islamophobie depuis 2019. L'intellectuelle et féministe de gauche ajoutait dans son analyse que la reconnaissance de l'islamophobie avait poussé "de plus en plus de gens à gauche" à se taire "par peur d'être dénoncés parce que la laïcité [est] devenue synonyme d'islamophobie". Selon elle, la gauche a laissé faire "tétanisée à l'idée d'être taxée de stigmatisation d'une population d'origine immigrée" et depuis la laïcité "a été abandonnée à Marine Le Pen".

Une lutte insuffisante contre le "danger Le Pen"

Plus récemment, lors de la campagne présidentielle de 2022, Robert Badinter avait reproché au parti de la gauche radicale et à son leader, Jean-Luc Mélenchon, de ne pas avoir assez fait face au "danger Le Pen". Précisément, l'ancien ministre avait reproché à au candidat insoumis battu au premier tour de la présidentielle à ne pas avoir ouvertement appelé à voter pour Emmanuel Macron au second tour pour faire barrage à l'extrême droite.