Le discret et controversé "pacte immigration" fait des remous en Macronie

Le discret et controversé "pacte immigration" fait des remous en Macronie Adopté ce mercredi par le Parlement européen, le pacte sur la migration et l'asile a provoqué certaines dissensions en Macronie, notamment après les dernières déclarations de la tête de liste Renaissance aux prochaines élections européennes, Valérie Hayer.

Un vote serré. Mercredi 10 avril 2024, le pacte sur la migration et l'asile a été adopté au forceps par le Parlement européen. Notamment pour les deux textes les plus sensibles du Pacte : le règlement sur la procédure d'asile (APR), adopté par 301 voix pour, 269 contre et 51 abstentions, puis le règlement dit de "crise" adopté par 301 voix pour, 272 contre et 46 abstentions. Désormais, le texte devra être formellement validé par le Conseil de l'Union européenne, avant d'entrer en vigueur courant 2026.

Le texte basé sur une proposition de la Commission en septembre 2020 prévoit notamment des contrôles aux frontières renforcés, un système de "filtrage" obligatoire et préalable à l'entrée d'un migrant dans l'Union européenne, une solidarité plus importante des Etats membres pour accueillir des réfugiées et, enfin, un mécanisme spécifique en cas de crise migratoire qui fait notamment écho à l'afflux massif des réfugiés syriens en 2015. Il permettra de prolonger la durée possible de détention d'un migrant aux frontières extérieures de l'UE jusqu'à neuf mois contre six actuellement. 

Trouver un équilibre entre le contrôle aux frontières et la solidarité

Présenté le 23 septembre 2020 par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le pacte européen sur l'asile et la migration a pour objectif principal de réformer en profondeur la politique migratoire continentale après la crise migratoire de 2015. Le projet fait l'objet d'intenses négociations des Vingt-sept, dont les positions sont parfois diamétralement opposées. Mais à deux mois du scrutin européen, les représentants des Etats et du Parlement européen semblent être parvenus à trouver un accord, ce qui devrait permettre d'envisager une adoption définitive.

Ce pacte repose sur trois piliers. D'abord, une gestion accélérée aux frontières avec "de nouvelles procédures pour établir rapidement le statut d'une personne à son arrivée". Un migrant devra savoir, dans un délai de cinq jours, s'il peut rester en Europe ou repartir. Ensuite, un renforcement de la coopération avec les pays d'origine et de transit pour limiter les arrivées et lutter contre les réseaux de passeurs et le train de migrants. Enfin, la mise en place d'un nouveau mécanisme de solidarité, plus flexible. Autrement dit, chaque pays devra contribuer à la solidarité, mais de manière moins contraignante. Les relocalisations (aujourd'hui obligatoires) basculeront sur un système de volontariat. 

Toutefois, le texte est issu d'un difficile compromis. Soutenu dans l'ensemble par les trois principales familles politiques européennes : PPE (droite), les Socialistes et les Démocrates, il ne manque pas non plus de déclencher l'hostilité d'une grande partie de l'extrême droite, tout comme des Ecologistes et de la gauche radicale, voire de certains socialistes. Des divergences aperçues jusqu'en Macronie.

La Macronie divisée après les déclarations de Valérie Hayer

Une réponse "ferme" et "humaine" au défi migratoire. Voilà comment le pacte migratoire a été présenté par Valérie Hayer, tête de liste de la majorité présidentielle aux prochaines élections européennes, lundi 8 avril 2024 lors de son débat avec Marion Maréchal Le Pen sur CNews, qui mènera la liste Reconquête le 9 juin prochain. 

Au cours de son débat avec Marion Maréchal Le Pen, la candidate de Renaissance Valérie Hayer a pris le parti de défendre le volet "contrôle des frontières" du pacte sur la migration et l'asile. Une prise de position qui n'a pas l'air d'avoir réellement convaincu en interne. "Ces médias parlent tout le temps d'immigration. Autant essayer d'y apporter autre chose que les fantasmes et caricatures sans cesse développés par le RN et Reconquête !" regrette Loïc Signor, porte-parole de Renaissance dans les colonnes du Monde.

Dans le camp d'Édouard Philippe, la tendance ou du moins, le souhait, serait à un durcissement du volet migratoire dans le pacte immigration en demandant l'inscription d'un "soutien financier par l'Union européenne des infrastructures nationales de contrôle des frontières". Une disposition inscrite dans le manifeste d'Horizons, le parti créé et présidé par Edouard Philippe, maire du Havre, le 9 octobre 2021. La subvention par Bruxelles de clôtures aux frontières de l'Europe fait notamment partie des désirs du parti.

"Georgia Meloni, elle, soutient le pacte"

Du côté de l'opposition, les mots de Valérie Hayer ont déclenché l'alerte rouge. Elle "veut faire au niveau européen ce qu'à fait Macron en France : se lancer dans une course-poursuite avec l'extrême droite" lance la tête de liste d'EELV, Marie Toussaint, pour l'instant créditée de 5,5 % d'intentions de vote selon le dernier sondage Ifop-Fiducial pour Le Figaro, et Sud Radio, paru le 9 avril. Enfin, lors du débat face à Marion Maréchal Le Pen ce lundi sur CNews, Valérie Hayer a également souligné l'entente de Renew avec une partie de l'extrême droite européenne au sujet du pacte : "Georgia Meloni, elle, soutient le pacte asile et immigration qu'on va voter mercredi" pour tenter de déstabiliser Marion Maréchal Le Pen, qui, elle, y était opposée.