Le Pen / Barnier : le RN pose ses conditions et donne un indice sur la chute du gouvernement
Alors que le gouvernement de Michel Barnier est menacé par une motion de censure, Marine Le Pen a rappelé au Premier ministre les conditions pour que le RN ne renverse pas l'exécutif ce lundi 25 novembre. Le bras de fer continue.
Censurera ou censurera pas ? C'est la question qui menace le gouvernement de Michel Barnier, surtout quand elle est posée à Marine Le Pen et aux députés du Rassemblement national (RN). Si toutes les forces politiques ont indiqué si oui ou non elles soutiendraient une motion de censure en cas d'utilisation du 49.3 par le Premier ministre pour forcer l'adoption du projet de loi de finances 2025, le parti d'extrême droite n'a pas encore tranché. Or, les voix des 124 élus RN de l'Assemblée nationale sont décisives pour renverser le gouvernement ou au contraire l'épargner et le laisser en place.
Reçue par Michel Barnier à Matignon ce lundi 25 novembre, Marine Le Pen a confirmé la position de son parti concernant le projet de loi de finances à l'issue de l'entretien : "Si le budget reste en l'état", le RN votera la motion de censure qui sera à coup sûr déposée au moment d'adopter le texte surtout si un 49.3 est dégainé. Mais la députée du Pas-de-Calais a "répété pour la énième fois" quelles étaient les conditions du parti pour que celui-ci ne renverse pas le gouvernement. Elle a cité plusieurs mesures considérées comme des "lignes rouges" qui doivent être supprimées du projet de loi pour que son camp puisse le voter. Parmi ces lignes rouges : "l'augmentation de 6 milliards envisagée sur le prix de l'électricité", "le fait de ne pas faire d'économies sur un certain nombre de parties du fonctionnement de l'Etat" et "taper sur les entreprises, les retraités".
Michel Barnier se trouve dans une situation délicate : il doit donner des gages au RN pour éviter que le parti soutienne une motion de censure sans céder à toutes les exigences de l'extrême droite. Le Premier ministre était "serein et ouvert aux dialogues" selon ses proches qui ont rappelé les talents de négociateur du chef du gouvernement, mais selon Marine Le Pen il s'est montré "courtois et campé sur ses positions". Les négociations ne semblent pas avoir permis de faire avancer les positions de l'un et de l'autre à en croire Marine Le Pen : "Nous verrons si le propos d'aujourd'hui fait son chemin mais rien n'est moins sûr". Une déclaration qui sous-entend que pour l'heure le soutien du Rn à une motion de censure est tout à fait possible.
Les espoirs du gouvernement Barnier
Menacé d'une censure, Michel Barnier réfléchit au moyen d'éviter de voir son gouvernement renversé. Il pourrait choisir de négocier sur un autre terrain en donnant des garanties au RN au sujet d'une nouvelle loi immigration en échange de l'abandon par Marine Le Pen de ses exigences budgétaires. Les chances pour que le RN renonce à ses idées concernant le budget, les économies et le pouvoir d'achat des Français restent cependant faibles.
Le Premier ministre pourrait aussi s'offrir du temps en ne cédant pas aux exigences du RN, mais ne s'y opposant pas fermement non plus. Le projet de loi de finances doit être voté le 12 décembre au Sénat, le vote pour son adoption au Parlement est donc prévu à la mi-décembre. D'ici là, le parti d'extrême droite pourrait avoir revu ses positions comme cela a déjà été le cas ces dernières semaines : les élus du RN ont tantôt assuré leur soutien à une motion de censure, tantôt brandi cette possibilité comme une simple menace. Marine Le Pen assure toutefois avoir toujours tenu la même position : une opposition au budget tel qu'il est actuellement pensé par le gouvernement. Mais même un conseiller de la députée a laissé entendre auprès de BFMTV que tout pouvait encore changer : "Je ne suis pas sûre que la décision [de Marine Le Pen] sera prise dès la sortie du rendez-vous de Matignon. La réponse se fera dans quelques semaines d'autant plus que le texte peut être modifié jusqu'au dernier moment".
Le camp gouvernemental mise également sur les difficultés entrainées par une motion de censure et qui pourraient dissuader le RN de renverser le gouvernement. "Je ne crois pas une seconde à ce que [les élus du RN] votent une motion de censure à 15 jours de Noël, cela plongerait la France, sans gouvernement et sans budget, dans un chaos économique qu'on a jamais vu, et le RN le sait très bien", a estimé un député macroniste auprès de Franceinfo. D'autres pensent au contraire qu'une démission du gouvernement ne fait pas peur à l'extrême droite et peut au contraire servir ses ambitions comme l'a indiqué le député LR Antoine Vermorel-Marques au même média : "Dans une logique de renverser table pour précipiter une présidentielle, elle appuiera sur le bouton de la censure quand elle le voudra", avance de son côté". D'autant que selon plusieurs études, une (courte) majorité de Français est favorable à une censure du gouvernement : 51% selon le sondage Elabe pour BFMTV publié la semaine dernière et 53% d'après le baromètre Ifop du Journal du dimanche paru le 23 novembre.
10:29 - L'immigration et la proportionnelle évoquées lors des échanges
Si le projet de loi de finances a sans doute été le sujet le plus longuement abordé durant la réunion, Marine Le Pen et Michel Barnier ont également évoqué l'idée d'une nouvelle loi immigration. "Ma position n'a pas évolué, pas plus que celle du Premier ministre", a déclaré la députée du RN sur ce point ajoutant que la loi immigration annoncée par le gouvernement lui parait "extrêmement prudente".
L'instauration de la proportionnelle aux législatives est également venue sur la table et le Premier ministre a de "nouveau exprimé le fait qu'il n'était pas opposé à y réfléchir", a fait savoir Marine Le Pen selon qui "le chemin semble long quand même". "Nous avons également évoqué l'agriculture, là encore sans mesure d'urgence si ce n'est l'opposition au Mercosur", a enfin indiqué la députée.
10:21 - Un accord entre Le Pen et Barnier pour éviter la censure ? "Rien n'est moins sûr"
"Le Premier ministre m'est apparu en même temps courtois et campé sur ses positions" lors de l'entretien a indiqué Marine Le Pen. "Nous verrons si le propos d'aujourd'hui fait son chemin mais rien n'est moins sûr", a-t-elle ajouté sous-entendant que les chances pour que les exigences du RN soient respectées et donc la motion de censure pas soutenue par l'extrême droite restaient minimes. Marine Le Pen a d'ailleurs réaffirmé que "si le budget reste en l'état", le RN votera une motion de censure.
10:15 - Le Pen répète ses "lignes rouges" pour la "énième fois"
Marine Le Pen a quitté Matignon après une bonne heure de réunion avec le Premier ministre, Michel Barnier. "J'ai répété pour la énième fois quelles étaient les lignes rouges du Rassemblement national", a-t-elle expliqué devant la presse en jugeant plusieurs mesures comme "inadmissibles" comme l'"augmentation de la taxe sur l'électricité" ou encore la "désindexation des retraites". Des lignes rouges exprimées plusieurs fois par le RN qui dit "apporter des économies" via d'autres mesures dont la révision du fonctionnement de l'Etat via certains organismes dont les budget devrait diminuer selon Marine Le Pen ou encore en réduisant le budget dédié à l'aide médicale d'Etat (AME).