Extinction Rebellion (XR) : le point sur les blocages, une alliance avec les gilets jaunes ?

Extinction Rebellion (XR) : le point sur les blocages, une alliance avec les gilets jaunes ?

BLOCAGES EXTINCTION REBELLION - Depuis lundi, les membres d'Extinction Rébellion occupaient la place du Châtelet à Paris. Ce vendredi, ils ont quitté en grande partie leur campement mais annoncent d'autres actions à venir.

[Mis à jour le 11 octobre 2019 à 19h54] Les actions devraient se poursuivre. Si les membres d'Extinction rébellion ont quitté en grande partie la place du Châtelet à Paris, le mouvement ne serait pour autant pas terminé. Ils souhaitent se faire entendre sur l'urgence climatique. Les militants qui ne seront plus place du Châtelet vont pouvoir se consacrer à d'autres actions. Ce vendredi, Extinction Rébellion a occupé la place de l'Étoile avant de se faire déloger par les forces de l'ordre. Ils ont toutefois eu le temps d'accrocher leur drapeau sur l'Arc de Triomphe. Sur Twitter, Extinction Rébellion annonce que d'autres actions sont prévues, bien que leur nature ne soit pas encore connue. "Nous réduisons la voilure place du Châtelet et autour pour mieux relancer notre rébellion", a ainsi annoncé un membre qui précise : "La décision a été prise en AG. La suite arrive... lentement mais sûrement".  

Les manifestants avaient en effet annoncé l'occupation d'un point névralgique de Paris pour ce samedi 12 octobre. Certains manifestants XR avaient d'ailleurs évoqué la possibilité d'un ralliement d'Extinction Rebellion à la manifestation des gilets jaunes prévue demain. Une convergence des luttes entre les deux mouvements serait-elle en train de s'opérer à Paris ?

La décision d'Extinction Rebellion de quitter le Châtelet a été commentée auprès du Figaro par un des activistes, qui déclare : "Aujourd'hui, on se retrouve plus à faire vivre un festival qu'une opération de désobéissance civile". Alors que les riverains commençaient à s'agacer des actions de XR au Châtelet, qui les obligeaient à adapter leur quotidien, les militants ont finalement quitté les lieux. Prêts à une éventuelle intervention des forces de l'ordre, ils semblaient attendre d'être délogés par la police, et semblaient presque désemparés qu'une intervention policière n'ait pas eu lieu. D'après eux, si le blocage continue et qu'il n'y a pas de réaction, ils se "tirent une balle dans le pied".

Ce jeudi, les militants ont bloqué aussi la rue de Rivoli, un des axes de communication les plus importants de la capitale, rejoints par des gilets jaunes. En fin de journée, les manifestants XR se sont rendus sur la place de la République, pour rejoindre la mobilisation de soutien aux kurdes syriens, victimes des offensives turques depuis ce mercredi 9 octobre. La manifestation n'ayant pas été autorisée par les autorités, les militants ont été repoussés par les forces de l'ordre, et des gaz lacrymogènes ont été employés.

Extinction Rebellion a aussi bloqué hier des boutiques C&A, Louis Vuitton et Hema, ainsi qu'un McDonald's et une banque BNP Paribas, considérés comme des symboles du capitalisme irresponsable. Les militants d'Extinction Rebellion souhaitent pointer la pollution résultant de l'activité des multinationales et dénoncent les incohérences et les effets pervers de notre mode de consommation. Les actions du mouvement ont eu lieu depuis le début de la semaine à l'international, notamment à Paris, Londres, Berlin, New York et Sydney, et devraient se poursuivre jusqu'à cette fin de semaine.

Les actions chocs d'Extinction Rebellion dans le monde

  • A Prague, les manifestants se sont réunis sur place Venceslas, et ont repris une image choc déjà employée lors de manifestations écolos : des manifestants se sont tenus debout sur des blocs de glace avec une corde autour du cou. Leur message ? "La fonte des glaces pourrait bien nous coûter nos têtes !" ("Ice Thawing, It May Cost Our Heads")
  • A Berlin, la circulation a été bloquée autour de la Colonne de la Victoire. Un campement de plusieurs centaines de tentes est en place devant la Chancellerie. Les manifestations allemandes ont bénéficié en début de semaine d'un coup de pub, avec la publication d'une première version du projet de "loi climat" du gouvernement, très insatisfaisant à leurs yeux ainsi que pour une partie des citoyens, dont certains ont rejoint la manifestation XR.
  • A New York, une marche funèbre a été organisée par les 200 manifestants présents pour frapper les esprits et alerter sur l'urgence climatique. Ils ont utilisé des cartons pour mimer des tombes et des cercueils et 90 d'entre eux se sont recouverts de faux sang et allongés sur le sol.
  • A Sydney, un sitting a été organisé sur une route centrale de la ville, tandis que les manifestants se sont enfermés sur un pont à Brisbane. Des arrestations ont eu lieu dans les deux villes.
  • A Madrid, 200 manifestants se sont regroupés devant le ministère de la Transition écologique.
  • A Rome, ils sont quinze manifestants à poursuivre une grève de la faim depuis trois jours, sur la Piazza Madonna di Loreto. Ils ont déclaré qu'ils cesseraient cette action uniquement lorsqu'ils auront été reçus par le gouvernement pour exprimer leurs attentes à propos du changement climatique. Leurs exigences adressées au gouvernement italien sont les suivantes : "dire la vérité, agir maintenant, et aller au-delà de la politique".

Extinction Rebellion : ce qu'il faut savoir

Extinction Rebellion, qu'est-ce que c'est ?

Extinction Rebellion est le nom donné à un mouvement né au Royaume-Uni en octobre 2018, lorsque 1 500 personnes s'étaient réunies devant le Parlement britannique, à Londres. Suite à cette action, baptisée "déclaration d'une rébellion contre le gouvernement britannique", l'organisation Rising Up, qui lutte "pour un changement fondamental du système politique et économique afin de maximiser le bien-être et minimiser la souffrance", s'était fait l'écho et le soutien d'Extinction Rebellion.

Sur son site Internet, XR explique recourir à "diverses méthodes d'action directe de désobéissance civile et de résistance non violente dans le but de pousser les gouvernements à agir afin de limiter le réchauffement climatique, la perte de la biodiversité et le risque d'atteinte des points de basculement du système climatique pouvant conduire à un effondrement écologique". Depuis, le mouvement s'est développé à travers le monde et serait présent dans 56 pays désormais, selon le site. Extinction Rebellion assure recourir à la désobéissance civile lors de ses actions, mais "toujours" à visage découvert, et lors desquelles "aucune agression physique, verbale ou psychologique" n'est tolérée, ni "aucune" dégradation de biens.

Autre particularité : Extinction Rebellion n'est incarnée par aucun leader. Les actions sont libres d'être menées sous l'égide du mouvement et pour cela il suffit de se connecter au site internet et de soumettre une proposition aux autres adhérents. Quant au logo du mouvement, il représente un sablier symbolisant que le temps est compté pour les espèces en voie de disparition, le vert illustrant le combat écologique et le noir la  gravité de la situation, reprenant la couleur du deuil.

Si le mouvement invite toute personne sensibilisée aux enjeux climatiques à les rejoindre, on remarque que certains milieux sont surreprésentés au sein du mouvement. C'est le constat d'une étude britannique, reprise par le Huffington post et dont les observations semblent se confirmer en France. Les membres du mouvement sont assez jeunes, âgés souvent de 25 à 35 ans, et ont souvent des parcours d'études plutôt prestigieux. Samedi dernier, XR a invité différents collectifs comme les gilets jaunes, les gilets noirs, le comité pour Adama, Attac et Green peace lors de l'occupation du centre commercial Italie 2 à Paris, afin de diversifier ses rangs. Cependant, certains comme les gilets jaunes ne sont pas toujours très favorables au mouvement.

Les revendications d'Extinction

Les membres d'Extinction Rebellion France ont réaffirmé aujourd'hui leurs revendications dans un communiqué de presse. Leurs actions dénoncent les politiques mises en place sur les questions environnementales, trop peu ambitieuses. Ils luttent en faveur de l'atténuation du changement climatique, de la conservation de la nature et de la protection de l'environnement. Sur le site du collectif, quatre exigences principales ont été listées :

  • "La reconnaissance de la gravité et de l'urgence des crises écologiques actuelles et une communication honnête sur le sujet".
  • "La réduction immédiate des émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité carbone en 2025, grâce à une réduction de la consommation et une descente énergétique planifiée".
  • "L'arrêt immédiat de la destruction des écosystèmes océaniques et terrestres, à l'origine d'une extinction massive du monde vivant".
  • "La création d'une assemblée citoyenne chargée de décider des mesures à mettre en place pour atteindre ces objectifs et garante d'une transition juste et équitable".

Extinction Rebellion en France

Après s'être développé au Royaume-Uni puis dans les pays anglo-saxons, notamment aux Etats-Unis et en Australie, le mouvement Extinction Rebellion a gagné l'Europe continentale avec des militants en Italie, en Suisse et en France. Le mouvement débute officiellement en France en novembre 2018, et compte actuellement environ 6000 membres. Le 24 mars 2019, Extinction Rebellion France organise une première tribune lors de laquelle un texte signé par 600 personnes est lu par les militants. Au même moment, un hommage est rendu aux espèces disparues à la Grande galerie de l'Evolution du Muséum d'histoire naturelle. Par la suite, différentes actions seront entreprises à Paris, notamment à la Défense, au centre commercial Italie 2, et à Châtelet.

Extinction Rebellion à Paris (Châtelet / Italie 2)

Une première action d'ampleur a été menée le 19 avril 2019 à La Défense, le quartier d'affaires de l'ouest parisien. 2 000 militants s'étaient réunis aux pieds des tours Total, EDF et Société Générale, notamment. Aucun incident n'avait été à déplorer, à l'inverse du rassemblement du 28 juin dernier, lorsque des militants avaient envahi un pont parisien, puis avaient été aspergés de gaz lacrymogène par les forces de l'ordre.

Ce week-end, les membres d'Extinction Rebellion ont repris leurs actions à Paris : ils ont envahi et occupé le centre commercial Italie 2, qu'ils considèrent comme l'un des "temples de la consommation", en totale opposition avec leur lutte radicale contre le changement climatique. C'est à coups de banderoles ("Pollue, consomme et ferme ta gueule", "Brûlons le capitalisme, pas le pétrole"...) qu'Extinction Rebellion a tenté d'éveiller les consciences. Désormais installés à Châtelet, les membres d'Extinction Rebellion semblent décidés à rester sur place durant trois jours, comme ils l'avaient annoncé.

Extinction Rebellion à Londres

C'est à Londres que le mouvement est né, lorsque le 31 octobre 2018, des centaines de manifestants ont déclaré leur rébellion devant le Parlement britannique. Leur action a également consisté à planter des arbres dans Parliament Square, et à se coller à la super glue aux ponts de Buckingham Palace pour empêcher leur évacuation par les forces de l'ordre tandis qu'ils lisaient une lettre à l'intention de la reine. Bien que Londres soit le foyer historique du mouvement, il n'en est pas le centre décisionnaire puisque Extinction Rebellion revendique une décentralisation.