Niveau de l'eau : avec la sécheresse, le risque de manquer d'eau de plus en plus important ?

Niveau de l'eau : avec la sécheresse, le risque de manquer d'eau de plus en plus important ? Encore 68% des nappes phréatiques françaises ont des niveaux d'eau inférieurs aux normales en mai 2023. Les chances pour qu'elles se remplissent sont faibles, tandis que les risques de certains départements de manquer d'eau augmentent.

Malgré une légère amélioration, la plupart de signaux restent au rouge avant l'été. Encore 68% des nappes phréatiques présentaient des niveaux inférieurs aux normales mensuelles au 1er mai 2023, selon le dernier relevé du Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM). Les départements du sud-est et de la vallée du Rhône restent les plus asséchés en ce qui concerne les réserves d'eau souterraines et profondes comme le confirment les données du site spécialisé Info-Sécheresse.

Les pluies excédentaires enregistrées entre mars et avril ont toutefois permis de gagner un peu de temps dans certaines régions en rechargeant en eau "les nappes réactives d'une grande partie du nord du territoire", notamment dans le Grand Est, en Bourgogne Franche-Comté ou au nord du Massif Central et surtout sur le pointe bretonne. Mais ce remplissage ne permet que de gagner du sursis, car les prévisions de Météo France pour la saison estivale ne privilégient pas les pluies, mais au contraire des températures plus chaudes aux normales. En conséquences, "à partir de mai, les niveaux [des nappes] devraient rester en baisse jusqu'à l'automne. Les épisodes de recharge devraient rester ponctuels et peu intenses, sauf événements pluviométriques exceptionnels", écrit le rapport de la BRGM. Quant au gouvernement, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a estimé le 16 mai que 28 départements présentent ainsi un risque de sécheresse très élevé d'ici à la fin de l'été 2023.

Le niveau de l'eau dans les nappes phréatiques peut-il remonter ?

"On est parti d'un niveau tellement bas et sec, à la suite de la sécheresse de l'an dernier, qu'il aurait fallu un hiver nettement excédentaire" en pluie pour humidifier les sols et remplir les nappes phréatiques déroulait le spécialiste Simon Mittelberger en mars, toujours sur franceinfo. Le printemps étant de retour, il ne faut plus compter sur les pluies pour réapprovisionner les réservoirs d'eaux profondes "sauf événements pluviométriques exceptionnels" d'après le BRGM. A compter du mois de mai "les épisodes de recharge devraient rester ponctuels et peu intenses", d'autant plus que Météo France n'annonce pas d'épisodes pluvieux particulier durant les mois de mai, juin et juillet. Et quand bien même la pluie tomberait, elle serait d'abord absorbée par les végétations avant d'alimenter les sols et ruissellerait plus que ne remplirait les nappes phréatiques.

Difficile donc d'envisager une amélioration du niveau de l'eau d'ici à l'été. La situation a, au contraire, plus de chances de dégrade prévient le BRGM : "Courant mai, en l'absence de précipitations suffisantes, la vidange devrait se généraliser à l'ensemble des nappes. Les niveaux devraient alors rester en baisse et la situation devrait se dégrader, rapidement". 

Quant aux cours d'eau, les précipitations ne seront plus d'aucune aide non plus ou alors très peu. Mais si les précipitations ne sont plus une solution, il reste les neiges de montagnes qui fondent l'été et viennent remplir les cours d'eau. Mais là encore, la neige s'est faite rare durant l'hiver et les sommets comme les glaciers ont stocké moins d'eau, une eau qui risque de manquer cet été.

Pourquoi le niveau des nappes phréatiques est-il si bas ?

Les nappes phréatiques servent de réservoirs souterrains dans lesquels l'eau est ponctionnée pour assurer les besoins, en particulier l'été. Le cycle des saisons voudrait que ces sources soit rechargées durant l'automne et l'hiver, quand les précipitations douces et nombreuses infiltrent les sols jusqu'à gagner les nappes d'eaux profondes. Problème : l'hiver 2022/20233 a été plutôt sec, en particulier entre février avec 32 jours passés sans une goutte de pluie et "un déficit des précipitations de 75%" d'après le climatologue de Météo France Simon Mittelberger, interrogé par franceinfo début mars.

La recharge observée entre janvier et décembre n'a pas suffi à contrebalancer cette période sécheresse et si en mars "le cumul de précipitations a été excédentaire sur une grande partie du territoire", son impact a a été très hétérogène sur les nappes phréatiques. Surtout, le taux d'infiltration a été limité car la pluie a d'abord "humidifié les sols secs puis permis à la végétation de sortir de sa dormance avant de réussir à s'infiltrer en profondeur" comme l'explique le BRGM. 

Le niveau bas des nappes phréatiques n'est pas la conséquence du seul hiver, il est aussi dû aux précipitations qui ont été nettement insuffisantes au cours de l'année 2022 : -25% de précipitations par mois sur l'ensemble de l'année, d'après les bulletins climatiques de Météo-France. Mention spéciale au mois de mai et de juillet 2022 ou la quantité de précipitations a respectivement chuté de 63 et 84% par rapport aux normales.

Les rivières et eaux de surface également asséchées ?

Les raisons qui ont mené à la raréfaction de l'eau dans les nappes phréatiques sont aussi responsables de l'assèchement de certaines rivières, de fleuves et des eaux de surface. L'absence de précipitations n'a pas permis d'alimenter les cours d'eau et le problème a été aggravé par l'évaporation de la ressource qui a été plus importante durant la sécheresse.

Comment préserver les nappes phréatiques et éviter de manquer d'eau cet été ?

Tout semble indiquer qu'il faudra passer l'été avec des stocks d'eau bien moins importants que l'an dernier. L'année avait pourtant déjà été marquée par de lourdes restrictions par endroit. Mais en mars 2022, 58% des nappes phréatiques présentaient des niveaux inférieurs aux normales contre 75% en avril 2023.

Des mesures ont déjà été prises dans les départements et villes les plus exposés à la sécheresse pour restreindre l'usage de l'eau aux seules activités nécessaires. Et Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, entend poursuivre cette politique comme expliqué sur France 2 le 21 avril : "Je vais à nouveau réunir le comité d'anticipation sécheresse le 27 avril pour faire le point avec les préfets et continuer à regarder s'il n'y a pas matière à durcir dans un certain nombre d'endroits les arrêtés, continuer à restreindre les usages de l'eau pour préserver la ressource". Selon le membre du gouvernement cette situation doit être un électrochoc et faire prendre conscience qu'il faut arrêter de "penser qu'on aura de l'eau pour toujours, tout le temps et pour tout le monde".