Doliprane : les conditions du rachat imposées par le gouvernement
Sanofi a annoncé entamé les "négociations exclusives" avec le groupe américain CR&D pour la cession d'Opella qui commercialise le Doliprane. Mais l'Etat français, devenu actionnaire, va s'assurer du respect de plusieurs engagements.
Le Doliprane va bien passer sous pavillon américain, mais non sans une surveillance de l'Etat français. Le groupe Sanofi a annoncé ce lundi 21 octobre commencer les "négociations exclusives" avec le fonds d'investissement américain CD&R "pour le transfert d'une participation de contrôle de 50 %" de sa filiale Opella qui produit et commercialise une centaine de médicaments, dont le Doliprane.
Mais une troisième partie s'est ajoutée à l'accord conclu entre Sanofi et CD&R : l'Etat français. Le cession d'Opella, qui est la troisième société mondiale dans le secteur des médicaments sans ordonnance et qui est surtout propriétaire du célèbre médicament à la boîte jaune, a fait trembler l'Hexagone. Et pour cause, les Français qui consomment 400 millions de boîtes de Doliprane chaque année ont craint de voir le médicament disparaître des pharmacies ou être vendu à des tarifs plus élevés. D'un point de vue économique, le société Opella représente 1 700 employés en France sur les 11 000 personnes engagées partout dans le monde et deux des treize sites de production qui fabriquent le paracétamol, le principe actif du Doliprane. Des acquis que l'Etat français a souhaité protéger et pour lesquels il est devenu actionnaire du groupe comme l'a annoncé le ministre de l'Economie, Antoine Armand, dans la soirée du dimanche 20 octobre.
D'après l'accord conclu entre les trois parties, le groupe américain CD&R doit obtenir 50 % de la société Opella tandis que le géant pharmaceutique Sanofi conserve 48 % de groupe et l'Etat français "[doit] participer en tant qu'actionnaire minoritaire à hauteur d'environ 2 %" via la Banque publique d'investissement Bpifrance. L'Etat disposera également d'un siège au conseil d'administration d'Opella ainsi "BPI pourra s'assurer de l'intérieur que les engagements pris, qui sont assortis de sanctions pécuniaires lourdes, sont bien suivis. C'est ça, la mission de cette participation", a précisé Bercy.
Le Doliprane cédé contre plusieurs garanties
Le ministère de l'Economie a effectivement posé des conditions à la cession d'Opella, et donc du Doliprane, entre autres. Mais l'entourage du ministre assurait dimanche soir, selon Les Echos, que "toute la semaine a été consacrée à la négociation de ces engagements" et qu'"on a réussi à obtenir des garanties à la hauteur de ce qui était demandé, nous sommes même parvenus à les améliorer". Parmi ces engagements, le premier et le plus important concerne le maintien de la gouvernance d'Opella en France ainsi que le maintien des emplois et des activités industrielles déjà existants en France.
Le fonds d'investissement américain qui s'apprête à devenir le propriétaire du Doliprane a aussi été contraint à donner d'autres garanties : l'engagement de poursuivre l'approvisionnement du marché français avec quatre molécules médicamenteuses produites par Opella (le paracétamol, l'aspirine et deux protecteurs gastriques que sont le lansoprazole et le pantoprazole) ; mais aussi l'engagement d'assurer et de sécuriser l'approvisionnement du marché français par des médicaments produits ailleurs qu'en France. La dernière garantie exigée au groupe CD&R et celle de faire grandir le groupe Opella avec des investissements pour la croissance interne ou de l'acquisition afin de développer la filiale de Sanofi.
Les moyens financiers du fonds d'investissement expliquent en grande partie la cession de la société productrice du Doliprane. Mais si la demande exprimée par l'Etat français vise certes l'évolution du groupe, elle doit surtout servir à éviter une restructuration et une revente totale d'Opella, une issue redoutée par les employés et les syndicats du groupe.