Ce film se fait dégommer par les critiques à Cannes, mais on trouve ça (un peu) injuste

Ce film se fait dégommer par les critiques à Cannes, mais on trouve ça (un peu) injuste L'un des films en lice pour la Palme d'or a reçu de très mauvaises critiques. On l'a vu, et voici ce qu'on en a vraiment pensé.

C'était l'un des films attendus au tournant de ce 78e Festival de Cannes. Principalement parce qu'il est réalisé par Julia Ducournau, cinéaste française qui a toujours fait très forte sensation sur la Croisette : Grave avait surpris (et parfois provoqué des réactions très vives chez le public), Titane avait été une claque avant de remporter la Palme d'or. C'est dire si le Ducournau nouveau suscitait d'énormes attentes pour la presse et le public.

Présenté lundi soir en compétition pour la Palme d'or, Alpha se déroule à une époque assez indistincte, marquée par une étrange maladie (on n'en dit pas plus délibérément). Dans ce contexte, la jeune héroïne qui porte le nom du film voit son monde bouleversé lorsqu'elle se fait tatouer un A (comme Alpha, mais aussi comme La lettre écarlate) lors d'une fête. La jeune fille devient alors une pestiférée au sein de sa classe, et doit composer avec l'inquiétude exagérée de sa mère, alors qu'un oncle qu'elle ne connaissait pas profite de ce moment pour venir vivre chez elles.

L'équipe du film Alpha sur le tapis rouge. © Pool Photo Events 05/IPA/SIPA (publiée le 20/05/2025)

La presse n'a pas été tendre avec Julia Ducournau. Ce drame a "exaspéré" Le Point, quand Les Echos le qualifie de "méga-ratage". L'Humanité n'a "pas aimé" non plus. Télérama lui reproche son outrance mélodramatique.

Attention : on ne pense pas qu'Alpha soit exempt de défauts, loin de là. Au contraire, Julia Ducournau ne sait jamais quand s'arrêter, et c'est son (gros) problème. Il est trop chargé (deux époques se superposent, les genres se mélangent), abuse des effets de style (métaphores visuelles, musique et effets sonores, pathos) au risque d'anesthésier l'émotion, et semble même trop long (un comble pour un film de 2 heures).

On est donc d'accord qu'Alpha aurait mérité d'être plus simple pour atteindre une justesse émotionnelle et se montrer plus percutant. A ce titre, on peut comprendre que certains le trouvent moins réussis que Titane ou Grave. En revanche, il est injuste de dire qu'Alpha soit une catastrophe totale, car c'est tout de même un film riche en idées.

Julia Ducournau développe ici non seulement une allégorie du sida (ou du Covid aussi peut-être ?) fulgurante (la scène dans la piscine par exemple), mais c'est surtout une réflexion sur la transmission : de la maladie, certes, mais surtout des silences, du traumatisme et du deuil. En creux, s'ajoute une réflexion sur une société excluante, un système de santé défaillant. Alpha aurait définitivement gagné à être plus simple et de subtile, mais c'est quand même très loin d'être nul.