TV contre Youtube : la guerre est déclarée entre les géants de l'audiovisuel
Considéré comme la "première chaîne de France" par sa directrice générale au sein de l'Hexagone, Justine Ryst, Youtube fait de nouveau le titre des journaux. Réunissant pas moins de 42 millions d'utilisateurs français par mois, la plateforme achetée par Google profite depuis plusieurs années d'une popularité infaillible. Une popularité on ne peut plus impressionnante en comparaison des chaînes de télévision françaises, qui n'attirent plus le jeune public.
Une coalition inédite qui compte bien renverser la donne
Les grands noms de l'audiovisuel français ont donc décidé de prendre leur situation en main en annonçant la création de La Filière Audiovisuelle (surnommée "LaFA"), lors d'une conférence menée le 13 novembre 2024 . Tous réunis dans les locaux du groupe TF1, les représentants de France Télévisions, de M6 et de TF1 ont mis en avant leurs intérêts communs contre le "perturbateur" du marché : Youtube.
L'alliance est quelque peu surprenante entre ces grands acteurs du paysage audiovisuel hexagonal, qui ont toujours fait la course à l'audimat, mais les objectifs sont clairs : combattre le Goliath détenu par Google.
Une association qui réunit de nombreux acteurs
La conférence du 13 novembre, en plus de réunir France Télévisions, M6 et TF1, a rassemblé de nombreuses organisations de gestion collective de droits, comme l'ADAMI (Administration des droits des artistes et musiciens interprètes), la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques), la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), le SCAM (Société civile des auteurs multimédia), mais aussi des syndicats de producteurs tels ANIM France, le SPI (Syndicat des producteurs indépendants) et l'USPA (Union syndicale de la production audiovisuelle).
Avec son président Rodolphe Belmer (qui est ni plus ni moins le PDG du groupe TF1) et ses trois vice-présidents, dont Delphine Ernotte (PDG de France Télévisions), l'initiative avait déjà été évoquée quelques mois plus tôt, lors du dernier festival de la Rochelle. Aujourd'hui, dix institutions se sont serrées la main pour la mise en place de leurs intérêts.

Quels objectifs ont-été dessinés ?
Les dix membres fondateurs de LaFA ont, à tour de rôle, fait part des problématiques auxquelles ils faisaient face. Plusieurs mesures ont germé à la suite de leurs confessions, notamment une meilleure distribution des ressources publicitaires ou encore une régulation plus claire concernant l'intelligence artificielle et les droits d'auteur.
LaFA souhaiterait également réguler les plateformes américaines comme Youtube, afin de garantir la diversité créative et l'exception culturelle française. Les intervenants de la conférence du 13 novembre ont pointé du doigt les inégalités de traitement entre les chaînes bleu-blanc-rouge et les grandes entreprises américaines, mentionnant notamment des écarts législatifs concernant la création audiovisuelle. LaFA veut atteindre une meilleure équité entre les concurrents internationaux.
LaFA, une association qui combat sur plusieurs fronts
En plus de mener une stratégie offensive contre l'hégémonie américaine, LaFA compte déployer une opération défensive à l'échelle européenne : "La France a une place particulière en Europe," assure Delphine Ernotte. "Nous défendons tous ardemment l'exception française. Je suis heureuse que nous puissions demain parler d'une seule voix face aux instances européennes, se réunir c'est gagner en force et en simplicité. "
L'ensemble des membres de LaFA prévoit de s'adresser d'une seule et même voix aux instances européennes. Ceux-ci espèrent que leur consensus trouvera une épaule sur laquelle s'appuyer au sein de l'Union Européenne.
A peine constituée, l'association s'apprête déjà à agrandir son cercle, en incluant deux autres noms : Arte et le SPEC. LaFA ne refuse pas l'intégration d'autres institutions audiovisuelles, à partir du moment où ces dernières adhèrent aux valeurs de l'initiative. La bataille est lancée contre le monstre américain, mais les chaînes françaises ne font que déclarer la première bataille...