Cyber-harcèlement : comment redonner confiance à son ado

Cyber-harcèlement : comment redonner confiance à son ado Moqueries, injures, diffamations, intimidations... Les ados ne sont souvent pas tendres entre eux. Depuis l'avènement des réseaux sociaux, une nouvelle forme d'harcèlement, plus insidieuse, s'est développée : le cyber-harcèlement. Explications avec le docteur Bertrand Vachey, pédopsychiatre.

Que ce soit sur Internet ou par SMS, des agressions répétées de la part de camarades de classe, ou même d'inconnus, peuvent conduire votre progéniture à l'isolement ; et ce, de façon discrète, donc plus difficile pour un parent à repérer. Bien que ces interactions soient virtuelles, les conséquences sont bien réelles et tout aussi problématiques que l'harcèlement "physique". Comment repérer un adolescent victime de cyber-harcèlement ? Quelle attitude adopter ? Et comment prévenir ce genre de problème ? Nous avons posé ces questions au Docteur Bertrand Vachey, pédopsychiatre spécialisé dans les pathologies de l'adolescent.
 

L'Internaute Homme : Qu'est-ce que le cyber-harcèlement ? Quelles formes peut-il prendre ?

Dr Bertrand Vachey : Le cyber-harcèlement est comme son nom l'indique un harcèlement via les réseaux sociaux d'Internet. Ce harcèlement peut être direct (insultes ou menaces postées sur le mur Facebook de l'adolescent, par exemple) ou indirect (création d'une page commune d'insultes à l'encontre du harcelé ou création d'un faux compte Facebook avec des photos humiliantes ou pornographiques). Il existe également des situations où le compte est "piraté" (par un ami qui connaît le mot de passe) et utilisé à des fins humiliantes et/ou dégradantes.

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Le docteur Bertrand Vachey est pédopsychiatre, spécialisé dans les pathologies de l'adolescent © Bertrand Vachey

Comment savoir si son enfant en est victime ? Quels sont les signes qui peuvent mettre la puce à l'oreille des parents ?

Comme pour tout enfant victime de harcèlement, il faut repérer une crainte soudaine de l'enfant d'aller à l'école ou de sortir dans des lieux où il pourrait croiser un autre élève de son établissement. De manière plus générale, l'apparition de troubles de l'endormissement, d'une modification de l'appétit (perte d'appétit ou au contraire grignotage excessif) et une baisse des résultats scolaires sont de bons indicateurs qui doivent conduire à interroger son enfant, voire à consulter un spécialiste.

Quelles peuvent être les conséquences du cyber-harcèlement sur la santé de son enfant ?

Les conséquences sont le plus souvent sociales (isolement) avec le risque de déscolarisation (souvent appelée à tort "phobie scolaire").

Quelles sont les actions à entreprendre quand on est confronté à ce genre de problème ?

Selon moi, il faut avoir une attitude similaire à celle que les parents auraient si leur enfant était victime d'un harcèlement "physique", c'est-à dire avertir immédiatement les autorités scolaires pour stopper le harcèlement. Si le harcèlement est grave (divulgation de photos intimes, menaces de mort voire incitation au suicide) les parents doivent immédiatement se rendre avec les preuves du harcèlement au commissariat pour porter plainte. Il ne faut pas avoir de complaisance avec ce type de harcèlement qui a les mêmes conséquences qu'un harcèlement classique.
En gros, il ne faut pas sous-estimer la gravité des faits sous prétexte qu'ils se réalisent via une nouvelle technologie, qui échappe parfois (de moins en moins souvent) aux parents.

Il ne faut pas avoir de complaisance avec ce type de harcèlement qui a les mêmes conséquences qu'un harcèlement classique.

Comment redonner confiance à un ado qui a été victime de moquerie ou de diffamation via Internet ?

Les dommages psychologiques sont parfois très transitoires et parfois plus sévères (dévalorisation, idées noires, dépression). Pour les parents, il faut bien rassurer l'enfant concernant son statut de victime du harcèlement (et non complice ou coupable). Un soutien psychologique renarcissisant peut être nécessaire en fonction de la gravité des faits et du ressenti de l'enfant.

Quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour prévenir le cyber-harcèlement et pour éduquer son enfant pour ne pas qu'il devienne à son tour un cyber-harceleur ?

Il faut bien expliquer aux enfant les risques et responsabilités de leur présence sur les réseaux sociaux. Pas de compte Facebook avant d'en avoir l'age (entrée au lycée soit 14-15 ans), selon moi, ainsi qu'une limitation de l'accès aux SMS et à Internet sur le téléphone portable. 

Le harcèlement découle souvent d'une situation de quête de rapports sociaux ou familiaux qui manquent à l'enfant.

Ceci-dit, le risque me semble assez rare au sein d'une famille dont la communication est conservée. Le harcèlement découle souvent d'une situation de quête de rapports sociaux ou familiaux qui manquent à l'enfant. En clair, il ne faut pas reprocher à son enfant de passer ses soirées sur l'ordinateur à communiquer avec ses pairs si cette situation d'isolement se reproduit au sein de la maison (genre le père "travaille" sur son ordinateur toute la soirée, la mère regarde une émission seule dans son coin, le frère joue sur son ordinateur etc.) En clair, il me semble nécessaire de conserver des moments familiaux propices au dialogue - comme le repas du soir qui est souvent zappé ou bâclé - pour s'assurer de bien connaître son enfant et diminuer le risque qu'il se fasse harceler sans oser en parler.

Le docteur Bertrand Vachey est pédopsychiatre, spécialisé dans les pathologies de l'adolescent. Il s'intéresse particulièrement aux addictions à Internet et aux jeux vidéos. Ancien chef de clinique et ancien assistant des universités aux hopîtaux de Paris, il exerce actuellement au cabinet Pluralis et à la Maison des Adolescents à l'hôpital Cochin à Paris.

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