Marine Le Pen refuse de porter le voile : coup de com' retentissant au Liban [VIDEO]

Marine Le Pen refuse de porter le voile : coup de com' retentissant au Liban [VIDEO] "Je ne porterai pas le voile". La présidente du FN s'est offert une séquence médiatique marquante lors d'une rencontre organisée avec le grand mufti de Beyrouth, au Liban.

[Mis à jour le 21 février 2017 à 15h25] Voilà l'un des premiers moments forts de cette campagne présidentielle, de ceux qui restent dans les esprits, parce qu'ils revêtent une signification clairement politique, qu'ils permettent à tous de développer des points de vue simples et tranchés sur une question au combien complexe et qu'ils cristallisent par conséquent le débat public : Marine Le Pen a refusé de porter le voile, qui lui était proposé, lors de sa visite du grand mufti de Beyrouth, au Liban. C'est devant de nombreuses caméras, alors qu'elle n'était même pas rentrée dans les bureaux d'Aïcha Bakkar, qu'elle s'est opposée de manière catégorique à l'invitation de se couvrir. "La plus haute autorité sunnite du monde n'avait pas eu cette exigence. [...] Ce n'est pas grave, vous transmettrez au grand mufti ma considération mais je ne me voilerai pas", a-t-elle encore expliqué, jetant un oeil aux caméras, comme pour s'assurer que la séquence avait bien été enregistrée.

Bien évidemment, une telle rencontre, entre la présidente du parti d'extrême droite français, dont les positions sur les pratiques de l'islam suscitent parfois la polémique, et une autorité morale de la religion musulmane, est méticuleusement préparée par ses équipes de campagne. Peu de choses sont laissées au hasard dans ce cas de figure. A l'AFP, un membre de son équipe rapprochée a admis que "la demande (de se voiler) lui avait été transmise hier". Marine Le Pen s'attendait donc à se voir remettre un voile en arrivant au bureau du grand mufti. L'entourage de la présidente du FN a toutefois précisé qu'elle avait fait savoir qu'elle refuserait de se couvrir la tête et que "l'invitation n'avait pas été annulée". 

Les responsables de Dar Al-Fatwa, la plus haute autorité sunnite du pays, ont publié un communiqué pour faire part de leur "surprise" face au "refus de se conformer à cette règle bien connue", en rappelant "la nécessité de se couvrir la tête lors de sa rencontre avec son éminence (le mufti de Beyrouth) selon le protocole".

"Marine Le Pen refuse de se voiler pour rencontrer le mufti de la République du Liban"

Marine Le Pen a fait le service après-vente

Quelques instants après la séquence, Marine Le Pen s'était elle-même justifiée devant la presse : "J'ai indiqué hier que je ne me voilerai pas. Ils n'ont pas annulé le rendez-vous. J'ai donc cru qu'ils accepteraient que je ne porte pas le voile. Je ne me voilerai pas. Ils ont cherché à m'imposer cela, à me mettre devant le fait accompli, eh bien on ne met pas devant le fait accompli". Les images (voir vidéo ci-dessus) montrent clairement un certain trouble de la patronne du FN, devant un parterre de journalistes, de personnalités religieuses du Liban. Elle était, au demeurant, entourée d'un comité d'accueil et une équipe de campagne composée uniquement d'hommes.

Reste que le geste de Marine le Pen est incontestablement un coup médiatique sur lequel la candidate à la présidentielle va pouvoir capitaliser : nul doute qu'elle ou ses proches s’appuieront sur ces images pour défendre l'intransigeance dont elle fait preuve devant les injonctions morales et traditionnelles de l'islam. Florian Philippot, vice-président du parti, n'a pas manqué de réagir sur Twitter avec la nuance qui le caractérise : "Marine refuse de porter le voile. Un magnifique message de liberté et d'émancipation envoyé aux femmes de France et du monde !".

Mais Marine Le Pen, qui veut apparaître comme la chantre de l'assimilation française devra à l'avenir répondre à une question qui soulève quelques contradictions : comment peut-on exiger des étrangers qu'ils se plient, en France, aux moeurs de l'Hexagone sans se plier, dans le même temps, à ceux des pays où l'on se rend en "visite officielle" ?

Marine Le Pen comparée à Michelle Obama

Et si la polémique n'avait pas lieu d'être ? Pire, et si les médias couvraient à charge la polémique suscitée par le geste de Marine Le Pen ? C'est en substance l'interrogation soulevée sur les réseaux sociaux, preuve manifeste du succès du coup de com' de Marine Le Pen. Sur la toile les internautes sont nombreux à rappeler qu'en janvier 2015, le couple Obama s'était rendu en visite officielle en Arabie Saoudite, l'épouse du président américain avait refusé de se voiler. A l'époque, la démarche de Michelle Obama avait été saluée, presque unanimement dans les médias, comme un acte de protestation. Y a-t-il donc deux poids deux mesures ?

En réalité, le geste de Michelle Obama était alors une marque de désapprobation contre le traitement réservé aux femmes en Arabie Saoudite, où il est interdit aux femmes de sortir sans voile - elles portent en réalité bien souvent le niqab. Elles n'ont d'ailleurs pas le droit de conduire, ne peuvent voter aux élections nationales, ne peuvent prendre de décisions notariales sans un homme. En 1998, en déplacement en Arabie Saoudite, la reine Elizabeth II avait eu l'audace de conduire le véhicule dans lequel était transporté le roi, là-encore, comme acte d'opposition politique.

Sans préjuger de la volonté de la présidente du FN de défendre le droit des femmes, Marine Le Pen n'a pas refusé de porter le voile face à un chef d'Etat, en visite officielle, dans un pays qui bafoue les droits les plus élémentaires des femmes. Elle a refusé de porter le voile face à un dignitaire religieux, dans un rendez-vous à caractère religieux, et pour lequel elle était informée qu'il était d'usage pour une femme de se couvrir la tête.