Macron sur Pétain : des propos proches de ceux de Chirac et De gaulle

Macron sur Pétain : des propos proches de ceux de Chirac et De gaulle Qu'a vraiment dit Emmanuel Macron sur Philippe Pétain ? Comment parlaient avant lui les autres présidents de "l'homme de Verdun" ?

[Mis à jour le 7 novembre 2018 à 14h26] Samedi, à l'hôtel des Invalides, un hommage solennel sera rendu aux "chef militaires" qui ont oeuvré pour la victoire de la France en 1918, a fait savoir le porte-parole des armées, Patrick Steiger. Cette annonce a suscité quelques commentaires sur la possibilité que soit ainsi saluée la mémoire du maréchal Pétain, qui fut célébré comme un véritable héros au sortir de la guerre. Evidemment, le président de la République ne pouvait faire l'économie d'un éclaircissement sur la question, alors qu'il prépare les cérémonies du 11 novembre. Et Emmanuel Macron, en déplacement à Charlevile-Mézières, n'a pas botté en touche, interrogé sur le sujet ce mercredi 7 novembre : "Le Maréchal Pétain a été, pendant la Première Guerre mondiale, aussi un grand soldat, c'est la réalité", a-t-il déclaré devant quelques journalistes, ajoutant : "La vie politique comme l'humaine nature sont parfois plus complexes que ce qu'on voudrait croire".

Le chef de l'Etat a estimé qu'il était "légitime" qu'un hommage soit rendu "aux maréchaux qui ont conduit l'armée à la victoire, comme chaque année". Emmanuel Macron sait qu'il touche là à un sujet très délicat, très explosif. Le maréchal Pétain tient une place très singulière dans l'histoire de France, il fut considéré comme l'un des principaux artisans de la victoire de Verdun, avant d'être déchu et condamné à mort pour avoir dirigé le régime qui collabora avec les nazis. "Je me suis toujours opposé au défaitisme français ou à la complaisance envers toute idéologie. Mais je reconnais la part que nos maréchaux et notre armée ont joué. Nous lui devons la victoire [de 1918]", a estimé Emmanuel Macron qui a tenu à ajouter que l'homme avait "conduit des choix funestes".

Des gerbes déposées sur la tombe de Pétain en 1968

Saluer le rôle de Philippe Pétain dans la Première Guerre mondiale est un exercice très délicat, mais Emmanuel Macron n'est pas le premier président à s'y prêter. En mai 1966, lorsque le général de Gaulle commémorait les 50 ans de la bataille de Verdun, à l'Ossuaire de Douaumont, il avait eu ces mots : "Si, par malheur, en d'autres temps, en l'extrême hiver de sa vie, au milieu d'événements excessifs, l'usure de l'âge mena le maréchal Pétain à des défaillances condamnables, la gloire qu'il acquit à Verdun, qu'il avait acquise à Verdun vingt cinq ans auparavant et qu'il garda en conduisant ensuite l'armée française à la victoire ne saurait être contestée ni méconnue par la patrie" (voir ici un reportage de l'INA qui en fait mention).

Jacques Chirac, tout juste 40 ans après, inscrivait son discours dans celui du général, pour commémorer à Douaumont le 90e anniversaire de la bataille de Verdun. Là encore, dans un long discours, il était question de souligner l'importance des choix opérés par le militaire à Verdun, tout en rappelant le "déshonneur" du régime de Vichy : "Un homme a su prendre les décisions qui conduiront à la victoire. Il restera comme le vainqueur de Verdun. Cet homme, c'est Philippe Pétain. Hélas, en juin 1940, le même homme, parvenu à l'hiver de sa vie, couvrira de sa gloire le choix funeste de l'armistice et le déshonneur de la collaboration", disait-il. Jacques Chirac insistait alors sur les responsabilités de la France qui s'est perdue dans la collaboration : "Cette tragédie française fait partie de notre histoire. Nous pouvons aujourd'hui la regarder en face", disait-il. Tout en considérant "l'homme de Verdun", Jacques Chirac a toutefois mis un terme à une tradition qui s'était instaurée : plus jamais un président français n'a déposé de gerbes sur la tombe du maréchal Pétain, un geste effectué par Charles de Gaulle en 1968, puis par Valéry Giscard d'Estaing en 1978 et par François Mitterrand en 1988.