Choléra à Mayotte : l'épidémie est-elle vraiment sous contrôle ?
Malgré les 65 cas de choléra détectés à Mayotte et le premier décès recensé, le ministre de la Santé Frédéric Valletoux se veut rassurant sur la situation épidémique de l'île. Mais l'ONG Médecin du monde ne partage pas son analyse.
Malgré la prolifération du choléra dans l'archipel de Mayotte, le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux s'est montré rassurant quant à la situation sanitaire. Invité de RTL, ce vendredi 10 mai, il a expliqué que l'épidémie était "circonscrite" et a souligné le travail de l'Etat et des organisations de santé sur place. Mais la mort d'une fillette de 3 ans porteuse de la maladie, recensée le mercredi 8 mai par l'Agence régionale de santé (ARS), a suscité l'inquiétude et a fait réagir la députée Estelle Youssouffa qui a dénoncé "une honte collective, une catastrophe sanitaire".
L'élue a été rejointe par Dominique Voynet, l'ancienne directrice de l'ARS de Mayotte, qui décrit une situation sanitaire "catastrophique". Depuis la découverte des premiers cas de choléra à Mayotte, elle alerte sur la saturation de l'hôpital de l'archipel et la situation locale qui permet la propagation de la maladie : les défaillances des réseaux d'assainissements de l'île ainsi que son manque d'eau potable. Le choléra est une maladie diarrhéique épidémique causée par une bactérie et qui se transmet la plupart du temps par de l'eau ou de la nourriture contaminée. Dans le pire des cas, cette maladie peut tuer en seulement quelques heures en raison d'une forte déshydratation.
Les difficultés de certains habitants de l'archipel pour avoir accès à l'eau potable seraient donc des facteurs aggravants qui auraient conduit au décès de la jeune malade atteinte du choléra. La patiente en question était une habitante des bidonvilles, comme une majorité d'immigrés comoriens qui regroupent à eux seuls une importante partie des 48% d'habitants de l'île de nationalité étrangère.
"Une réponse adéquate", mais insuffisante ?
Le ministre de la Santé, Frédéric Valletoux a toutefois longuement insisté au micro de RTL sur le fait que l'Etat n'"abandonnera pas Mayotte" et que "la réponse y est adéquate". Il a assuré que 3700 personnes ont déjà été vaccinées et que les livraisons de vaccins continuent à affluer. Mais ces mesures pourraient ne pas suffire selon la coordinatrice de Médecins du monde, Marion Ramstein, qui a expliqué sur France Info, ce vendredi 10 mai, que le contexte sanitaire à Mayotte est particulièrement difficile en raison de la crise d'insalubrité liée à l'eau qui touche les habitants de bidonvilles et plus largement tous les Mahorais.
La coordinatrice de l'ONG estime que le gouvernement ne pourra pas agir efficacement à Mayotte s'il concentre ses efforts uniquement sur la mobilisation humaine pour endiguer la maladie "sans prendre en compte les conditions d'accès à l'eau et les barrières qui empêchent la population de se rendre sur des lieux de santé". Sur ce point, le ministre a assuré que l'Etat poursuivra "les distributions d'eau autant que nécessaire". Marion Ramstein rappelle que le choléra est une maladie qui avec des accès à l'eau et aux soins se contrôle facilement, mais craint que dans la situation actuelle de l'île, la réouverture des écoles le 13 mai entraîne une propagation du virus en dehors des bidonvilles.
Les premiers cas de choléra importés des Comores ont été détectés à Mayotte en mars. La première personne infectée par le virus avait rapidement été prise en charge au sein de la cellule choléra du centre hospitalier de Mayotte. A la date du 10 mai 2024, "65 personnes touchées" par le choléra ont été recensées selon le ministre de la Santé.