L'Internaute > Télévision > 
Minorités visibles > Christine Kelly : interview
DOSSIER
 
Avril 2007

Christine Kelly : "Il y a bien un avant et un après Roselmack"

Un an après l'annonce de l'arrivée d'Harry Roselmack sur TF1, où en sont les minorités visibles à la télé ? Christine Kelly, journaliste sur LCI, dresse le bilan.

  Envoyer à un ami | Imprimer cet article  

Un an après l'annonce de l'arrivée d'Harry Roselmack sur TF1, trouvez-vous que les choses ont évolué pour les minorités visibles à la télévision française ? Y a-t-il eu vraiment dans ce domaine un "avant-après" Roselmack ?

Christine Kelly © Zarim Ramzi

Si TF1 a choisit de mettre un journaliste noir au 20h, c'est pour participer au changement de mentalité et il y a bien un avant et un après. Dans les entreprises, dans les rédactions, dans les écoles de journalisme, chaque personne, considérée comme une minorité peut se dire "oui c'est possible". Et ce changement ne s'arrête pas uniquement aux noirs mais également aux femmes, aux handicapés, à ceux qui se sentent à un moment ou à un autre marginalisés à cause d'une différence. Oui c'est possible, en se battant pour avancer, oui c'est possible avec un coup de pouce de ceux qui croient en l'autre.

 

Cette nomination s'est faite plus ou moins avec la pression des autorités. Cette pression était-elle nécessaire pour faire évoluer les choses ?

Sans la pression, le changement aurait pris plus de temps. On a très bien vu la portée des propos du chef de l'Etat lorsqu'il s'est penché sur la question des handicapés. Jamais on ne voyait de sujets sur ce thème dans les journaux télévisés. Je me battais il y a quelques années pour parler des personnes handicapées quand j'étais dans le groupe Canal Plus, et c'était un sujet qui n'intéressait personne. Idem lorsque Jacques Chirac s'est positionné clairement sur la question après la crise des banlieues. C'était un déclic.

 

Auriez-vous accepté ce poste à TF1, sachant que la direction de la chaîne vous aurait plus choisie pour votre couleur de peau que pour votre talent ?

Je suis journaliste de formation. Journaliste de métier. Ce n'est pas parce que je suis noire de surcroît que je refuserais un poste. Si on me propose un poste comme celui-ci, après avoir passé 7 ans sur LCI, je ne pourrais pas croire un seul instant que c'est juste pour ma couleur de peau. Ce n'est pas la culture TF1. D'abord journaliste et professionnelle, ensuite on apporte une valeur ajoutée : blonde, noire, jolie....

 

Quel(le) est le(la) journaliste issu(e) d'une minorité visible que vous admirez le plus ?

Je n'ai pas d'admiration particulière pour un journaliste, et encore moins une admiration reliée a la couleur de peau d'un journaliste, cela ne me vient même pas à l'esprit. J'aime deux présentateurs, Patrick Poivre d'Arvor et Oprah Winfrey, et peu importe leur origine, seul leur professionnalisme me touche.

 

Christine Kelly © Zarim Ramzi

Seriez-vous pour l'installation de quotas ? Eventuellement pour d'autres minorités (handicapés, plus de femmes…).

Je suis définitivement contre les quotas, même si je respecte et comprends ceux qui défendent cette position. Je suis pro, embauchez-moi, je suis mauvaise, ne me prenez pas. Je ne peux pas voir la vie professionnelle autrement.

 

Vous avez reçues plusieurs prix (le BlackWorld Victories Awards pour l'année 2002, et un prix par la European Federation of Black Women Business Owners). Que vous apportent-ils ?

Je n'y pense jamais, sauf lorsqu'on m'en parle. Mais à chaque fois que j'ai reçu un prix, j'en ai eu presque les larmes aux yeux en pensant à ce que ma place et mon travail représente pour de nombreuses personnes noires ou arabes. Ce n'est pas moi qui suis vraiment récompensée, mais la volonté de ma chaîne de m'avoir fait confiance. En clair, d'avoir fait confiance, alors que personne ne l'avait fait, à une journaliste différente.

 

Par rapport à ces prix, vous sentez-vous plus "journaliste black" ou "journaliste" ?

Je me sens simplement journaliste. Comme dans la vie de tous les jours en dehors de l'antenne, je me sens simplement femme.

 

Où en est la France par rapport à d'autres pays, notamment les Etats-Unis ?

A priori, nous avons fait un grand pas en avant, mais nous sommes encore loin du compte. Oui, il y a eu Roselmalck, mais c'était en été pour un remplacement. On le voit beaucoup moins aujourd'hui. Nous sommes très loin des pays anglophones, surtout des Etats-Unis. Là-bas, les choses se sont faites plus naturellement, c'est la télévision qui reflète l'évolution de la société. En France, on compte sur la télévision pour faire évoluer la société, c'est beaucoup plus lent.



EN IMAGES Minorités visibles : bilan de la télé Black-Blanc-Beur

 


Magazine Télévision Envoyer | Imprimer Haut de page
Votre avis sur cette publicité

Newsletters Gratuites

Voir un exemple

Voir un exemple

Voir un exemple

Toutes nos newsletters

Sondage

Que pensez-vous de la nouvelle formule du Grand Journal ?

Tous les sondages