La France est-elle responsable de la mort de Rémi Fraisse ? Ce que dit la CEDH

La France est-elle responsable de la mort de Rémi Fraisse ? Ce que dit la CEDH Jeudi 27 février, la CEDH a rendu son jugement concernant la responsabilité de la France dans la mort de Rémi Fraisse, un militant écologiste tué par une grenade lors d'une manifestation dans le Tarn en 2014. Elle pointe certaines défaillances.

Onze ans après la mort de Rémi Fraisse lors d'une opération de maintien de l'ordre, le verdict est tombé. La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné la France pour violation du droit à la vie ce jeudi 27 février 2025. Le jeune botaniste et militant écologiste est mort en 2014, à l'âge de 21 ans, après avoir été touché par une grenade offensive lancée par un officier de gendarmerie. Rémi Fraisse participait à une manifestation pour s'opposer à la construction du barrage de Sivens, dans le Tarn, mais le rassemblement avait tourné à l'affrontement entre des activistes et les forces de l'ordre.

Dans son jugement, la CEDH pointe la responsabilité de l'Etat français et notamment des défaillances dans l'encadrement de la manifestation ayant dégénéré et dans la réponse militaire à cette dernière. Elle estime que "le niveau de protection requis" pour parer aux risques posés par le "recours à une force potentiellement meurtrière" n'a pas été "garanti". Elle souligne par ailleurs les "lacunes du cadre juridique et administratif alors applicable" et les "défaillances de l'encadrement dans la préparation et la conduite des opérations litigieuses".

Concrètement, la CEDH ne juge pas la France coupable de la mort de Rémi Fraisse, mais en partie responsable. Sa conclusion est celle qu'avaient déjà rendu le tribunal administratif de Toulouse en 2021 et confirmé la cour d'appel administrative de Toulouse en 2023. A l'époque, la justice française avait reconnu "la responsabilité sans faute de l'État" en s'appuyant sur l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure selon lequel l'État "est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens." Étienne Noël, l'avocat de la famille de Rémi Fraisse, avait vulgarisé la décision auprès d'Ici, anciennement France Bleu : "En clair, ça veut dire que l'État est tenu pour responsable non pas de l'utilisation d'armes lors de cette manifestation mais du fait qu'il y ait une victime collatérale".

Aucun procès pénal pour la mort de Rémi Fraisse

La décision de la CEDH confirme la responsabilité de la France dans la mort de Rémi Fraisse, mais elle ne semble pas se prononcer sur la responsabilité du militant écologiste qui avait également été reconnue en première instance et en appel par la justice française. Laquelle avait estimé que le jeune homme "ne pouvait pas ignorer la dangerosité de la situation" et l'avait jugé responsable "d'imprudence fautive".

Avec ce jugement la série de procès administratifs dans l'affaire Rémi Fraisse prend fin. A noter que le volet administratif est le seul à avoir été traité par la justice, puisqu'aucun procès pénal n'a eu lieu. Une information judiciaire avait bien été ouverte après la mort du militant écologiste pour "violence par une personne dépositaire de l'autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner", puis requalifiée en "homicide involontaire". Mais après les investigations menées par la gendarmerie voisine, le juge d'instruction avait conclu à un non-lieu, confirmé en appel et en cassation.