César s'est lié d'amitié avec Vercingétorix avant de le tuer cruellement... La théorie qui change notre vision de la Gaule

César s'est lié d'amitié avec Vercingétorix avant de le tuer cruellement... La théorie qui change notre vision de la Gaule Le mythe de Vercingétorix, chef d'une civilisation gauloise qui s'est battu contre les armées romaines venues opprimer un peuple a vécu. On sait que les deux hommes se connaissaient avant la guerre des Gaules.

Les relations entre Vercingétorix, le chef gaulois qui a mené la rébellion contre la conquête romaine, et Jules César, l'illustre général romain, ont longtemps été perçues et enseigné à l'école comme un affrontement mythique entre deux figures héroïques de l'Antiquité. Pour servir le "roman national", on a imaginé cette opposition sous la forme d'une guerre de libération menée par un jeune chef gaulois charismatique, unissant les tribus contre l'oppresseur romain.

Les recherches récentes menées par des historiens et archéologues apportent d'importantes nuances à cette vision simplifiée. Ces travaux mettent en lumière une dynamique complexe de rivalité, de respect mutuel et d'intérêts politiques convergents, au-delà de l'opposition manichéenne souvent dépeinte.

Les relations entre Vercingétorix et César doivent d'abord être comprises au regard des stratégies politiques et militaires de l'époque. Jules César avait entrepris la conquête des Gaules principalement pour asseoir son prestige politique à Rome, alors en pleine République. Les victoires militaires dans cette région lui assuraient une renommée considérable, indispensable pour consolider son pouvoir face à ses adversaires politiques. La conquête des Gaules n'était donc pas seulement une entreprise impérialiste, mais aussi un calcul stratégique en vue de dominer la scène politique romaine.

De son côté, Vercingétorix n'était pas simplement un chef tribal menant une révolte désespérée. Les recherches récentes ont montré qu'il appartenait à une grande famille aristocratique influente des Arvernes, et qu'il avait probablement été en contact avec le monde romain bien avant d'entrer en rébellion.

Certains historiens suggèrent même que Vercingétorix avait été élevé dans une aristocratie aux liens culturels très forts avec la civilisation romaine, et qu'il a probablement conclu dans un premier temps une alliance avec César. Son père, Celtillos, avait été un chef très important des Arvernes et il est probable que la famille ait eu un rôle dans les relations diplomatiques de premier plan avec Rome.

Certains historiens suggèrent que Vercingétorix avait une connaissance fine des us et coutumes des Romains. Il n'était pas rare que des élites gauloises envoient leurs enfants à Rome ou dans des camps romains prestigieux pour y apprendre la culture et les stratégies militaires.

Vercingétorix au service de Jules César

S'il n'existe pas de preuve historique permettant d'affirmer que Vercingétorix a lui-même été formé au sein de l'armée romaine, des travaux récents considèrent l'hypothèse qu'il ait servi sous les ordres de Jules César comme très sérieuse. Un auteur romain, Dion Cassius, affirmait dans des écrits presque contemporains qu'à l'occasion de sa reddition, Vercingétorix espérait la clémence de César "parce qu'il avait été en termes amicaux avec lui. Au lieu de pardon, c'est la rancune qui aurait poussé le général romain à le mettre à mort, précisément, pour avoir " transformé leur ancienne amitié en hostilité".

Cette théorie n'est pas saugrenue. Le spécialiste Yann Le Bohec, professeur d'histoire romaine à l'université Lyon-III, avance aussi la possibilité d'un service dans l'armée avant une trahison dans ses écrits : "Tandis que les aristocrates gaulois ennemis de Rome se trouvaient contraints de lui livrer des otages, ses amis étaient nombreux à envoyer leurs enfants s'instruire auprès des Romains ". Les relations de Vercingétorix auraient pu être très bonnes avec la République romaine, au contraire, on sait que le chef gaulois était en froid avec l'aristocratie de son peuple, depuis l'assassinat de son père, "Rien n'interdit de penser que le jeune homme ait levé un contingent privé pour le mettre au service de César", avance ainsi Yann Le Bohec.

Ainsi, Vercingétorix aurait pu se voir non seulement comme un chef de guerre, mais aussi comme un acteur politique habile, capable de manipuler les tensions locales pour son propre compte.

Une rebellion en forme de trahison ?

César lui-même, dans ses "Commentaires sur la guerre des Gaules", montre une admiration certaine pour le talent militaire de Vercingétorix. Bien que ses écrits soient avant tout des œuvres de propagande, visant à justifier ses actions devant le Sénat romain, ils laissent entrevoir une reconnaissance des compétences stratégiques de son adversaire.

La campagne militaire de Vercingétorix contre César n'était pas une rébellion sauvage et désorganisée, mais un ensemble de tactiques sophistiquées. L'une des plus célèbres est la politique de la terre brûlée, par laquelle Vercingétorix ordonna la destruction des terres et des provisions pour affamer les troupes romaines. Cette stratégie montre qu'il avait bien en tête la nécessité d'une guerre d'usure contre une armée aussi bien équipée que celle de César. Malgré ses efforts, Vercingétorix finit par capituler à Alésia en 52 avant J.-C., une bataille qui reste l'un des épisodes les plus emblématiques de cette confrontation.

L'analyse des sources romaines, principalement celles écrites par César lui-même, montre aussi à quel point la relation entre les deux hommes a été façonnée par la propagande. César se devait de dépeindre Vercingétorix comme un ennemi puissant, afin de rendre ses victoires encore plus impressionnantes. La propagande romaine a souvent exagéré la menace que représentait Vercingétorix, mais dans le même temps, elle a contribué à en faire une figure de respect. Par conséquent, l'image de Vercingétorix que l'histoire a retenue est en partie celle d'un adversaire noble et digne, une construction nécessaire pour glorifier encore davantage la figure de César.

Les spécialiste de l'époque avancent aussi que Vercingétorix, en se soumettant à César lors de la reddition d'Alésia, a accepté une certaine forme de destin politique. Plutôt que de se sacrifier dans un ultime acte de résistance, il choisit de se rendre et fut emmené à Rome. Un geste pourrait être interprété comme un gage destiné à préserver, d'une manière ou d'une autre, son héritage et celui de son peuple.

La mort de Vercingétorix, un acte cruel et symbolique

Vercingétorix, après sa défaite lors de la célèbre bataille d'Alésia en 52 avant J.-C., ne fut pas exécuté immédiatement par Jules César. Après sa reddition, il fut capturé et emmené à Rome comme prisonnier. César avait l'intention de l'utiliser comme trophée vivant, afin de démontrer sa victoire éclatante sur les Gaulois et d'en tirer un prestige politique à Rome.

Vercingétorix resta emprisonné pendant environ six ans, durant lesquels il fut probablement détenu dans des conditions difficiles. Finalement, en 46 avant J.-C., après la fin des guerres civiles romaines, César organisa un grand triomphe à Rome, une cérémonie fastueuse où il célébrait ses victoires militaires, notamment celle contre les Gaules. Vercingétorix fut exhibé lors de ce triomphe, présenté enchaîné comme un symbole de la défaite gauloise.

Après cette humiliation publique, il fut conduit dans un cachot et exécuté, vraisemblablement par strangulation, une méthode courante pour les ennemis d'importance à l'époque. Certains historiens pensent qu'il aurait pu être exécuté selon le rituel romain du "supplicium", une mise à mort qui symbolisait la soumission complète de l'ennemi.