Boualem Sansal gracié et libéré dans quelques jours ? Pourquoi c'est un scénario envisageable

Boualem Sansal gracié et libéré dans quelques jours ? Pourquoi c'est un scénario envisageable L'écrivain Boualem Sansal a été condamné à cinq ans de prison ferme notamment pour "atteinte à l'unité nationale". Le 63e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie apparait comme sa dernière chance.

L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel ce mardi 1er juillet 2025 à cinq ans de prison pour "atteinte à l'unité nationale", "outrage à corps constitué", "pratiques de nature à nuire à l'économie nationale" et "détention de vidéos et de publications menaçant la sécurité et la stabilité du pays", et à 500 000 dinars d'amende (environ 3500 euros). Autrement dit, la cour d'appel d'Alger a confirmé le verdict de première instance. Ce dernier a désormais huit jours pour se pourvoir en cassation. "Je n'ai pas de déclarations à faire, je dois rendre visite à mon client pour discuter avec lui d'un éventuel pourvoi", a déclaré le nouvel avocat français de l'écrivain, Me Pierre Cornut-Gentille, à l'AFP.

Il est reproché à Boualem Sansal d'avoir défendu l'idée selon laquelle l'Algérie avait hérité de territoires appartenant initialement au Maroc lors de la colonisation française. Une injure pour Alger en conflit avec le Maroc depuis des années pour des questions territoriales. Le cas de Boualem Sansal fait couler beaucoup d'encre depuis son arrestation par les autorités algériennes à son arrivée dans le pays le 16 novembre 2024. Depuis cette date, l'écrivain est retenu soit dans la prison de Kolea, soit dans l'unité de soins de l'hôpital Mustapha-Pacha d'Alger où il reçoit un traitement pour son cancer de la prostate, précise Libération.

Une grâce présidentielle le 5 juillet ?

Boualem Sansal espère que l'Histoire jouera en sa faveur, mais il mise sur une autre option pour s'en sortir malgré sa condamnation en appel. Le verdict vient d'être rendu seulement quatre jours avant le 63e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, célébrée le 5 juillet. Durant ces célébrations, le chef de l'Etat gracie traditionnellement des milliers de détenus. L'écrivain et surtout ses proches espèrent que l'une des grâces pourra concerner le romancier. 

Une éventuelle grâce présidentielle apparaît comme la dernière chance de Boualem Sansal d'être libéré et de revenir en France. Les proches de l'écrivain redoutent qu'en l'absence de geste de clémence des autorités algériennes l'homme de 80 ans meurent en prison. "Ce serait un événement nucléaire et atomique dans les relations franco-algériennes", a assuré une source diplomatique français à Libération. Jusqu'à présent, aucune demande de libération ou de grâce formulée par la France, y compris par Emmanuel Macron, n'a été entendue par le président algérien Abdelmajid Tebboune.

Attention, pour être gracié, Boualem Sansal ne doit pas introduire de pourvoi en cassation devant la Cour suprême. L'Algérie pourrait alors, au vu de son âge et de son état de santé, décider de le gracier, sans renier l'indépendance de sa justice. À l'inverse, si la grâce n'était pas prononcée rapidement, les conséquences diplomatiques entre Paris et Alger n'en seraient que davantage détériorées. Le retour de Stéphane Romatet - l'ambassadeur de France en Algérie rappelé à Paris le 15 avril - pourrait également être compromis.

Le Premier ministre français François Bayrou dit espérer "des mesures de grâce" de la part du président algérien. Il déplore une "situation que tous les Français et le gouvernement français trouvent insupportable, à juste titre". "Je sais que toutes les instances exécutives, depuis le président de la République jusqu'au gouvernement, agissent en ce sens de manière à ce que l'humanité triomphe", a poursuivi le locataire de Matignon, en marge d'un déplacement au ministère de l'Intérieur sur la canicule. Des propos rapportés par BFMTV. De son côté, le premier flic de France Bruno Retailleau assure qu'il ne veut "gâcher aucune chance, d'ici notamment la fin de la semaine pour que Boualem Sansal puisse être libéré". 

Une défense qui n'a pas payé

Pour se défendre, l'octogénaire a invoqué le principe de liberté d'expression assurant en avoir fait usage pour évoquer des faits politiques et historiques. "La Constitution algérienne garantit la liberté d'expression et de conscience. Cela n'a pas de sens. [Elle] décrète la liberté d'expression et on fait un procès pour de la littérature. Où est-ce qu'on va comme ça ?", avait-t-il demandé durant l'audience du 24 juin dernier.

Quant aux propos qu'il a tenus dans une interview pour le média d'extrême droite Frontières, Boualem Sansal a refait le fil de l'histoire expliquant que "la France a créé les frontières (de l'Algérie colonisée à partir de 1830) mais heureusement après l'indépendance (en 1962), l'Union africaine a décrété que ces frontières héritées de la colonisation étaient intangibles".