Bayrou fâché, mais encore allié de la majorité : le bon coup du patron du MoDem

Bayrou fâché, mais encore allié de la majorité : le bon coup du patron du MoDem François Bayrou a indiqué qu'il n'entrera pas au gouvernement en raison d'un désaccord "profond" avec l'exécutif. Cet allié historique de la majorité commence doucement à prendre des distances. En restant un allié qu'il faut choyer.

Il a refusé d'entrer au gouvernement à l'occasion du remaniement et a regretté publiquement un désaccord "profond sur la politique à suivre". François Bayrou, qui était pressenti comme un possible nouveau membre du gouvernement Attal depuis sa relaxe, a provoqué une onde de choc dans la sphère politique avec ses déclarations à l'AFP, mercredi soir. Le patron du MoDem a même donné l'impression d'un début de rupture dans l'alliance entre les centristes du MoDem et le camp présidentiel. Mais il n'en n'est rien, a-t-il assuré en précisant que le MoDem restait un "membre a part entière de la majorité". Une position toute en nuance qui désarçonne les députés centristes autant que la Macronie.

Un "déséquilibre politique" et des erreurs de priorité

François Bayrou paraissait déterminé à vouloir reprendre les rênes du ministère de l'Education, mais il a affirmé ne "pas avoir candidater" pour rejoindre le gouvernement. Et quand un poste lui a été proposé, celui des Armées, il a décliné l'offre. Pourquoi ? "C'est le seul secteur qui va à peu près bien" a-t-il estimé sur franceinfo ce jeudi 8 février ajoutant ne pas vouloir prendre la place d'un ministre efficace. Mais sa décision s'explique aussi par son désaccord avec l'exécutif sur "la question d'identification sur ce qui mérite le plus de soin et d'engagement dans le pays". Les politiques et mesures prises par le gouvernement ne seraient pas les bonnes priorités de l'avis du président du MoDem.

Des divergences qui pourraient venir du "déséquilibre politique" que François Bayrou dit constater au sein du gouvernement. "Il y a le sentiment que certaines sensibilités de la majorité occupent l'espace", a glissé le politique et proche conseiller d'Emmanuel Macron qui voit d'un mauvais œil la prépondérance des forces de la droite dans l'exécutif. Avec huit ministres sur 14 ayant d'anciennes affinités, plus ou moins vieilles, avec Les Républicains cela "crée un déséquilibre" selon le centriste.

Le centriste dénonce aussi "la rupture constante, continuelle et progressive entre la base et les pouvoirs" caractérisée en partie par l'origine sociale et géographiques des ministre, dont 11 sur 14 sont Parisiens ou Franciliens, lui qui milite pour une réconciliation entre la capitale et les provinces.

Le président du MoDem qui n'est pas le dernier à essayer de peser dans les décisions du chef de l'Etat en coulisse a donc décidé de se faire entendre publiquement et passe de l'allié conciliant à celui qui veut porter ses propres positions si nécessaire, même quand elles divergent de celles de la Macronie.

Le MoDem, un allié "beaucoup plus libéré" de la majorité

Si à titre personnel François Bayrou a refusé de rejoindre le gouvernement, il n'écarte pas d'avoir des élus de son parti nommés ministres. Au contraire, il estime que le MoDem doit avoir "une place reconnue" au sein de l'exécutif ne serait-ce que pour respecter l'équilibre des forces de la majorité. Car oui, le parti centriste reste un "membre à part entière de la majorité qui veut reconstruire le pays", a clarifié François Bayrou. Et pour cela, il entend être un allié certes, mais "beaucoup plus libéré qu'avant", selon un élu du MoDem à Politico. Et c'est sur ce point que le Béarnais a réussi un joli coup politique : lui dont l'avenir politique était incertain avant le verdict de son procès n'a jamais eu autant de latitudes. Il reste un allié que les macronistes vont devoir choyer pour ne pas risquer d'explosion de la majorité, tout en pouvant désormais manifester ces désaccords. Une position idéale pour rompre dans la continuité ; une position idéale pour préparer le terrain de la présidentielle 2027.

Le septuagénaire semble juger sa position limpide, mais dans ses rangs ses déclarations ont parfois du mal à passer. Certains députés sont sceptiques, voire très agacés, par la sortie de François Bayrou. Le député des Hauts-de-Seine, Jean-Louis Bourlanges dénonce une "incohérence" qui menace d'affaiblir dangereusement le parti dans un communiqué : "Si nous n'étions vraiment pas satisfaits de la plus qui nous était proposée, il eût été envisageable de pratiquer le soutien sans participation. Nous sommes en train de choisir l'inverse : la participation sans le soutien." Reste à voir à qui l'avenir donnera raison, le MoDem sortira-t-il plus fort ou plus faible de cette position d'allié à la parole et aux positions plus libres ?