Destitution de Macron : la procédure peut encore aboutir... à ces conditions
C'est un frein net à la destitution d'Emmanuel Macron. Ce mercredi 2 octobre, la proposition de résolution visant à enclencher la procédure de destitution du président de la République, déposée par La France insoumise (LFI), a été rejetée par l'écrasante majorité de la commission des Lois de l'Assemblée nationale. La proposition de destitution d'Emmanuel Macron soutenue par 81 députés insoumis, écologistes et communistes s'est heurtée à la première étape réellement décisive en commission des Lois.
Le texte a reçu le soutien nécessaire grâce à la gauche lors de son lancement début septembre, et il a été jugé recevable par le bureau exécutif de l'Assemblée nationale le 17 septembre... encore une fois grâce à la gauche. Les forces du Nouveau Front populaire dominent le bureau exécutif de l'hémicycle et ont pu facilement imposer leur soutien au texte pour le faire accéder à l'étape d'après. Mais à présent les choses se compliquent, car à l'exception de LFI et de quelques écologistes ou communistes, très peu d'élus soutiennent l'idée de destituer Emmanuel Macron, même au sein des forces d'oppositions.
LFI a initié la procédure de destitution, prévue par l'article 68 de la Constitution, en estimant que le refus du chef de l'Etat de nommer Lucie Castets à Matignon constitue "un manquement grave au devoir de respect de la volonté exprimée par le suffrage universel". La gauche étant effectivement arrivée en tête aux dernières législatives. Mais le camp présidentiel y voit "une déclaration de guerre à nos institutions", quand le Rassemblement national (RN) dénonce une "tentative d'enfumage" de "l'extrême gauche" pour faire oublier "ses multiples compromissions avec la macronie". Même à gauche, la destitution d'Emmanuel Macron ne fait pas l'unanimité : le Parti socialiste (PS) s'y oppose. S'il a accepté de juger le texte recevable lors du bureau exécutif, il a déjà annoncé ne pas voter le texte en cas d'examen à l'Assemblée.
Un "non", mais une dernière chance pour la destitution
Ces oppositions se sont exprimées en commission des Lois. Les 73 députés de la commission devaient se prononcer sur le fond et le bien-fondé de la procédure pour savoir si le président de la République a commis un ou plusieurs manquements incompatibles avec l'exercice de son mandat. Et la majorité a estimé que non. Elle s'oppose donc au vote du texte à l'Assemblée nationale et, de fait, à la réunion du Parlement en Haute Cour, seule configuration dans laquelle la destitution du chef de l'Etat peut être officiellement adoptée.
La décision de la commission des Lois est un obstacle conséquent à l'initiative de LFI, mais elle n'y met pas un point final. Malgré l'avis de la commission, c'est à la conférence des Présidents de l'Assemblée nationale de décider si le texte peut passer à l'étape suivante : le vote dans l'hémicycle. Une décision doit être rendue dans les 13 jours à compter de ce mercredi 2 octobre. La conférence des Présidents réunit le président et les vice-présidents de l'hémicycle, les présidents des différentes commissions parlementaires ainsi que les présidents de chaque groupe politique.
Une chance de réussite très limitée
Les membres de cette conférence sont majoritairement opposés à la procédure de destitution, le nombre d'opposants atteint même les 18 personnes sur 28, mais c'est en comptant les voix de quatre présidents qui ont depuis été nommés ministres au gouvernement Barnier et qui ne peuvent donc plus siéger à l'Assemblée. Si ces postes reviennent à des élus issus des mêmes familles politiques, le compte sera identique, mais s'ils reviennent à la gauche, la donne pourrait changer.
Reste que les chances pour que la conférence des Présidents soutienne la procédure sont faibles : le NFP n'y compte que 8 voix si les socialistes soutiennent le texte et 6 si ces derniers s'y opposent, comme ils l'ont indiqué. Le renfort de 4 voix avec le remplacement des ministres ne suffirait pas à être majoritaire, même dans le meilleur des cas avec 12 voix au mieux. Reste enfin les voix des deux membres issus du groupe Liot. Ces derniers n'ont pas officialisé leur position, mais étant issus du centre ou du centre-droit, ils semblent plus enclins à voter contre la destitution d'Emmanuel Macron.
Quand bien même la conférence des Présidents accepterait de laisser la procédure de destitution accéder à l'étape suivante, le vote à l'Assemblée et au Sénat, le texte devrait réunir les deux tiers des voix dans chacune des deux chambres, avant d'en obtenir 609 sur 925 lors du rassemblement du Parlement en Haute Cour. Une hypothèse hautement improbable compte tenu de l'opposition de la coalition présidentielle, de la droite, de l'extrême droite et d'une partie de la gauche.