Immigration : cette mesure de l'extrême droite envisagée par Barnier, farouchement rejetée par les macronistes
"C'est une volonté qui est portée par le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau", a répondu jeudi 17 octobre au matin, sur les ondes de Sud Radio, la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon alors qu'on la questionnait sur la possibilité que la France puisse signer des accords semblables à celui qui lie désormais Rome et Tirana. Depuis le 16 octobre, il permet ainsi à l'Italie d'envoyer vers l'Albanie des demandeurs d'asile arrêtés dans ses eaux. "En tout cas, c'est à l'étude au ministère de l'Intérieur", a-t-elle expliqué, avant d'ajouter : "On ne se l'interdit pas."
Immigration : "C'est une volonté que la France puisse signer des accords semblable qu'entre l'Italie et l'Albanie. C'est une piste à l'étude au ministère de l'Intérieur" annonce @MaudBregeon pic.twitter.com/Jxc1JlHQvT
— Sud Radio (@SudRadio) October 17, 2024
Une déclaration qui a mis le feu aux poudres à une partie de la Macronie. Certains ne partagent en effet pas vraiment cette vision de la gestion de l'immigration. "On découvre des choses dans la presse, nous ne sommes pas reçus place Beauvau pour échanger avec le ministre. Tout cela n'est pas correct et manifestement, Michel Barnier est d'accord", a ainsi déploré auprès de BFMTV le député Renaissance Ludovic Mendes. Et le rapporteur de la dernière loi immigration, qui avait déjà secoué la classe politique en décembre dernier, de s'agacer encore : "Et maintenant, on découvre qu'on veut envoyer des demandeurs d'asile en dehors de l'Union européenne, par exemple en Irak ? On marche vraiment sur la tête !"
Lors d'une conférence de presse depuis Menton ce vendredi, le Premier ministre a toutefois tempéré : "Je ne crois pas que cet exemple [de l'Italie et l'Albanie ndlr.] soit transposable [...] pour des raisons juridiques et institutionnelles." Dans les faits, une alternative à cette option serait davantage envisagée.
Plusieurs accords déjà en cours de négociation
Comme le souligne l'Opinion, si certains font aujourd'hui part de leur étonnement, cette mesure avait pourtant été évoquée par le ministre de l'Intérieur dès son premier discours aux préfets, le 8 octobre dernier. "Plusieurs accords sont déjà en cours de négociation par la Direction générale des étrangers en France et doivent être finalisés, qui concernent notamment le Rwanda, le Burundi, le Kazakhstan, l'Irak ou l'Égypte", avait dévoilé Bruno Retailleau.
L'objectif de cette mesure ? Permettre à un préfet de pouvoir, par exemple, éloigner un clandestin afghan dont le profil serait, selon les termes employés, "évocateur de troubles à l'ordre public", alors qu'à ce jour, Paris ne peut procéder à un tel renvoi, faute de relation avec le régime des talibans et de lignes aériennes desservant la destination depuis l'Union européenne. En partant du principe que de nombreux Afghans passent par le Kazakhstan avant d'arriver en France, l'idée serait donc de renvoyer de tels profils dans ce pays, moyennant avec lui sans doute des accords de coopération, comme la formation de forces de l'ordre locales, ou économiques, avec peut-être davantage de visas accordés à ses ressortissants pour venir travailler en Europe. Charge ensuite au pays récepteur de gérer l'individu jugé indésirable par Paris. Afghan, Russe, Syrien... L'idée est que chacun puisse être renvoyé vers un pays, semble-t-il, plus en capacité de négocier avec son État d'origine.
Une nouvelle loi immigration "en début d'année 2025"
La polémique survient alors que près d'un an après le fiasco de la loi immigration, qui avait fracturé la majorité à l'Assemblée, la porte-parole du gouvernement a révélé le 13 octobre dernier que l'exécutif comptait proposer une nouvelle loi immigration "en début d'année 2025". En déplacement à la frontière franco-italienne ce vendredi, Michel Barnier a défendu ce projet, pointant que pour que le pacte asile et immigration européen puisse être appliqué en France, "il faut qu'il y ait une transposition dans la loi française". "Rien que ça, ça justifie une loi nouvelle sur l'immigration", a-t-il estimé, comme le relaie franceinfo, laissant toutefois entendre que d'autres mesures pourraient, à l'occasion, être glissées dans le texte.
Dans l'entourage de Bruno Retailleau, on défend que "Michel Barnier met [simplement] le sujet de l'immigration en haut de la pile de ses préoccupations, comme les Français", rapporte BFMTV. Alors qu'au sein même de la Macronie des voix dissonantes se font entendre, comme celle de l'ex-Premier ministre Gabriel Attal, qui juge le projet "pas prioritaire", un récent sondage Odoxa-Backbone Consulting pour Le Figaro semble plutôt aller dans le sens de Beauvau. Le projet de loi serait aujourd'hui qualifié de "nécessaire" par près de sept Français sur dix (71%). Un peu plus de la moitié des Français interrogés (57%) le jugeraient "efficace" pour améliorer la situation actuelle.