De plus en plus d'agressions au couteau en France, des chiffres effrayants
Après le meurtre du jeune Elias, 14 ans, attaqué au couteau vendredi dernier, François Bayrou a invité les députés à se "saisir de (la) question du port des armes blanches". "L'idée que des couteaux portés par des jeunes ne fassent l'objet d'aucune sanction, ça nourrit aussi le sentiment d'impunité. Je trouve que c'est de notre responsabilité collective et j'invite tous les députés de tous les groupes à travailler sur ce sujet", a lancé le Premier ministre pendant la séance des questions au gouvernement (QAG), ce mardi, à l'Assemblée nationale.
Comme l'indique France Info dans un reportage dédié ce mercredi, l'usage des armes blanches se développe grandement en France, notamment en région parisienne. Certains jeunes en apportent même au lycée. "Des couteaux, mais aussi des matraques télescopiques, même si elles sont plus difficiles à dissimuler" sont présentes dans l'établissement, abonde un lycéen du 13e arrondissement de Paris, au micro de France Info.
"À travers certaines boucles Telegram, Snapchat et même TikTok, certains se gargarisent d'afficher des couteaux", regrette Abdoulaye Kanté, policier auprès du média. Et pour cause, si les vols avec arme blanche sont en baisse sur un an, les saisies d'armes de ce type augmentent. Entre 2023 et 2024, le nombre d'armes blanches saisies est passé de 6 000 à 6 500 selon les chiffres de la préfecture de police. Soit une augmentation de 9% en douze mois.
Egalement interrogé, le préfet de police de Paris Laurent Nuñez tire la sonnette d'alarme sur un phénomène qu'il considère comme "effectivement inquiétant" : "Dans presque un affrontement entre bandes sur deux, on a l'utilisation d'arme par destination ou d'arme blanche. Et ces affrontements concernent sur l'agglomération parisienne, quasiment 80% des mineurs", explique-t-il.
"120 attaques au couteau par jour" ? L'affirmation de Bardella
Si ce sujet revient sur le devant de la scène en ce début d'année 2025, il ne date pas d'hier, bien au contraire. Et la classe politique ne manque pas de s'en emparer. Comme lorsque le président du Rassemblement national Jordan Bardella évoquait la sécurité pendant la présentation de son programme pour les élections législatives le 24 juin 2024 à Paris. Il évoquait alors un chiffre de "120 attaques au couteau par jour" en France, sans donner la moindre source. Un chiffre déjà brandit par le poulain de Marine Le Pen, le 2 mai 2024, lors d'un débat l'opposant à la tête de liste macroniste, Valérie Hayer.
Pourtant, aucune étude ne permet de quantifier les attaques au couteau quotidiennes en France. "Cette statistique n'a aucune consistance", juge Guillaume Farde, consultant en sécurité dans les colonnes de BFMTV. Si on parle simplement d'homicide, en 2023, 1 010 attaques ont été comptabilisés d'après les chiffres du ministère de l'Intérieur. Ce qui représente 2,77 homicides par jour, loin des 120 avancés par Jordan Bardella. De plus, tous ces homicides n'ont pas été commis avec un couteau. Voilà pourquoi, ces chiffres dont la portée peut être significative et grave doivent être maniés avec la plus grande minutie.
Par exemple, à la mi-2024, les coups et blessures volontaires sur personne de 15 ans ou plus enregistrés augmentent très légèrement (+ 1%) sur les douze derniers mois. Les coups et blessures volontaires sur personne de 15 ans ou plus se déroulant hors cadre familial baissent très légèrement au cours des douze derniers mois (- 1%), tandis que ceux relevant du cadre familial progressent (+ 3%), selon les données du ministère de l'Intérieur.
Cartographie, profil des agresseurs... La proposition d'une sénatrice LR
Ce chiffre de 120 attaques quotidiennes au couteau en France avait pourtant également été évoqué par la sénatrice LR Valérie Boyer, et plus particulièrement dans une question au Sénat le 7 juillet 2022. Un chiffre assimilé à une "extrapolation", par le ministre de l'Intérieur, contacté par BFMTV. Le 7 novembre 2024, cette même parlementaire revenait à la charge avec une nouvelle question destinée au premier flic de France, en l'occurrence Gérald Darmanin. Elle cite cette-fois-ci l'observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) et dénonce sa suppression en 2020, remplacée par par l'Insee et les ministères de l'intérieur et de la justice, "sans certitudes sur l'efficacité d'une telle suppression" selon ses mots.
Elle souhaiterait obtenir davantage d'informations et d'analyses sur ces attaques à l'arme blanche et sur les agresseurs sous forme d'une cartographie détaillée et précise, alors que les "agressions au couteau" sont "en première position" et que cela représente "plus de 120 victimes par jour en moyenne", poursuit-elle. "Il semblerait qu'il faille également étoffer cette cartographie en y ajoutant le profil des agresseurs (...) et pouvoir comparer ces attaques avec les attaques des années précédentes afin d'établir s'il y a bel et bien une augmentation de ce format de violence en France, et dans quelles proportions", conclut-elle.