Attaques contre les musulmans, antisémites, areligieuses... Bruno Retailleau fait-il une différence ?

Attaques contre les musulmans, antisémites, areligieuses... Bruno Retailleau fait-il une différence ? La réaction du ministre de l'Intérieur au meurtre d'un musulman dans une mosquée du Gard a été jugée tardive par plusieurs politiques et organisations citoyennes. Certains l'ont accusé de faire des distinctions entre les affaires judiciaires.

Où était Bruno Retailleau après le meurtre d'un homme dans une mosquée du Gard ? Beaucoup de personnalités politiques ont posé la question le vendredi 25 avril, jour de l'attaque, et le week-end suivant. Le ministre de l'Intérieur a attendu 48 heures avant de se déplacer dans le Gard pour s'exprimer sur cette affaire et échanger avec les enquêteurs. Une réaction jugée insuffisante par une grande partie de la gauche qui est allée jusqu'à accuser Bruno Retailleau de traiter différemment les affaires judiciaires selon le profil des victimes.

Le reproche a été fait au ministre de se rendre dans le Gard le dimanche, soit deux jours après l'attaque meurtrière, alors que le jeudi 24 avril le locataire de la place Beauvau a chamboulé son agenda pour se rendre dans une école de Nantes seulement quelques heures après une attaque ayant fait un mort et trois blessés. Bruno Retailleau devait assister à des réunions dans l'Ain et en Savoie dans le cadre de sa campagne pour la présidence du parti le vendredi 25 avril, mais il avait également des rencontres prévues la veille. Or, s'il a annulé ses déplacements pour se rendre à Nantes, il n'en a pas fait autant pour aller dans le Gard.

Et même une fois sur place, le déplacement du ministre a suscité des critiques : Bruno Retailleau a fait le choix d'aller à la sous-préfecture d'Alès à laquelle est rattaché le parquet en charge de l'enquête, mais pas à la mosquée où le meurtre a eu lieu. Tandis qu'à Nantes, le ministre avait fait le déplacement dans l'établissement scolaire ciblé par l'attaque.

Bruno Retailleau a nié toute différence de traitement entre les deux affaires, il a d'ailleurs souligné avoir été l'un des premiers à réagir sur X avec ce message : "Un homme a été atrocement assassiné ce matin dans la mosquée de Grand Combe. L'enquête permettra, je l'espère, d'appréhender rapidement l'auteur et de faire la lumière sur cet évènement épouvantable." 

Il y a, selon le ministre, une explication au fait qu'il se soit déplacé immédiatement après l'attaque à Nantes et qu'il ait différé sa venue après celle visant une mosquée du Gard comme il l'a indiqué sur BFMTV le dimanche 27 avril. "La grande différence c'est que nous avions arrêté l'auteur, que nous savions de quoi il s'agissait et que des vies étaient en jeu" après l'attaque de Nantes. Le ministre de l'Intérieur a souligné qu'en comparaison, l'assaillant du Gard n'avait pas été interpellé et que les circonstances de l'attaque n'étaient pas toutes connues. Le caractère antimusulman de l'attaque a toutefois rapidement été établi, la victime ayant été tuée alors qu'elle priait dans une mosquée.

Différence entre acte antisémite et islamophobe ?

Après l'attaque dans la mosquée Khadidja dans le Gard, le ministre de l'Intérieur a été confronté à ses réactions face à d'autres affaires, notamment certaines portant sur des actes antisémites. En mars dernier, après la violente agression d'un rabbin, le ministre ne s'était pas physiquement rendu sur place, mais il avait eu des mots forts pour condamner l'attaque antisémite : "Je condamne avec la plus grande fermeté cet acte odieux", avait-il écrit sur X. Une réaction plus ferme que son message après le meurtre d'un musulman dans une mosquée. En août 2024, Bruno Retailleau qui n'était pas encore ministre de l'Intérieur avait apporté son soutien "à la communauté juive encore lâchement visée par un attentat devant une synagogue" et appelé à punir les auteurs "de manière exemplaire".

Bruno Retailleau aurait-il eu une réaction plus rapide et plus ferme après le meurtre dans la mosquée du Gard si l'attaque avait visé un lieu de culte juif ou chrétien ? La question lui a été posée sur BFMTV et le ministre a soutenu que cela n'aurait rien changé. "Si l'équivalent c'était passé dans une église ou une synagogue, si le suspect n'avait pas été arrêté et si les conditions du meurtre avaient été floues, je ne pense pas que j'y serais allé. Je n'aurais pas fait de traitement diffèrent, j'en suis absolument certain."

Des différences ont pourtant été pointées du doigt par certains, la fermeté des condamnations, mais aussi la qualification des attaques comme des actes terroristes. L'attaque antisémite de l'été dernier à la Grande-Motte avait été immédiatement qualifié d'attentat par Bruno Retailleau, mais l'attaque visant la mosquée et un de ses fidèles n'a pas fait l'objet de tels commentaires. L'avocat de la famille de la victime et le Conseil français du culte musulman ont d'ailleurs dénoncé la non-saisie du parquet national terroriste (Pnat). Un détail qui ne dépend cependant pas du ministre de l'Intérieur comme ce dernier l'a rappelé sur BFMTV. "Le Pnat se saisit pour les actes de terrorisme uniquement, lorsqu'il y a coordination en règle générale. Il n'est pas dédié à la haine anti-religieuse, il ne se saisit pas systématiquement sur les actes antisémites", a-t-il glissé au passage pour appuyer sa défense.