Logements réquisitionnés : comment ça marche ?

Logements réquisitionnés : comment ça marche ? Sollicitée par les associations de défense des sans-abri, la ministre Cécile Duflot n'a pas exclu la réquisition de logements vacants.

Ce week-end, Cécile Duflot a reçu des organismes de défense des sans-logis, notamment le DAL, l'association Droit au logement. Parmi eux, la comédienne Josiane Balasko, très impliquée pour cette cause (voir vidéo ci-dessous). Ces acteurs militants ont rencontré la ministre du Logement alors que le froid a gagné la France. "On aurait aimé avoir cette réunion au mois de juin. Parce que là, le froid arrive, l'hiver arrive", a confié Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l'association DAL à l'AFP. Avant de poursuivre : "La ministre vient de nous dire qu'elle était favorable à l'application de la loi de réquisition et qu'elle y travaillait. Donc c'est une bonne nouvelle." Face à la presse, Cécile Duflot a confirmé, sans pour autant annoncer que la réquisition serait forcément utilisée : "S'il est nécessaire, je ferai appel à l'ensemble des moyens dont nous pouvons disposer, la réquisition fait partie de cette panoplie. Elle a déjà existé, elle a été mise en œuvre notamment quand Jacques Chirac était président de la République parce que la crise était particulièrement difficile, chacun s'en souvient."

La réquisition de logements inoccupés pour abriter les personnes sans domicile fixe, si elle n'est qu'une possibilité "pas exclue" aujourd'hui, a déjà été décidée par le passé. Notamment dans les années 1960 pour les rapatriés d'Algérie. Mais ce cas exceptionnel a été suivi, plusieurs dizaines d'années plus tard, par un autre cas, plus comparable à la situation actuelle. En 1994, Jacques Chirac, alors maire de Paris, avait demandé au gouvernement Balladur la réquisition de logements vacants détenus par des grands groupes financiers. Une décision qui faisait suite à une mobilisation de l'Abbé Pierre et d'associations de défense des SDF, qui avaient occupé un bâtiment du VIe arrondissement de Paris, dans la rue du dragon, à la fin de l'année 1994. Après l'élection de Jacques Chirac à la présidence de la République en 1995, ce sont 1 000 logements parisiens qui ont été utilisés ainsi pour les sans-logis. Réquisitionnés pendant 5 ans, ils ont servi à mettre 1 200 adultes et 500 enfants à l'abri. Pour un coût total de plus de 80 millions d'euros, comprenant les travaux réalisés dans ces logements pour les rendre habitables.

En 2001, la secrétaire d'Etat au logement du gouvernement Jospin, Marie-Noëlle Lienemann, avait obtenu la réquisition de plusieurs centaines de logements, à Paris et dans sa banlieue. L'Etat avait ensuite incité leurs propriétaires à vendre leurs biens aux bailleurs sociaux.

L'Etat indemnise les propriétaires

La loi sur l'engagement national pour le logement de juillet 2006 a repris une ordonnance de 1945 prévoyant que les "locaux à usage d'habitation vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés" peuvent être réquisitionnés pour un une "durée maximum d'un an renouvelable" en vue d'héberger des "personnes dépourvues de logement ou logés dans des conditions manifestement insuffisantes" ou encore des personnes visées par une décision d'expulsion. Ces réquisitions, bien qu'inappliquées depuis le gouvernement Jospin, sont donc parfaitement légales.

Depuis1998, une loi a précisé le dispositif : les locaux réquisitionnés doivent être vides depuis au moins 18 mois et doivent être détenus par des personnes morales. C'est l'Etat qui indemnise le propriétaire en cas de réquisition, à hauteur d'un loyer de HLM environ.

Aujourd'hui, le gouvernement pourrait décider la réquisition "d'anciens bâtiments de bureaux, d'anciennes casernes, d'hôpitaux qui ne servent pas", a précisé la ministre du Logement. L'ancien ministre du logement du gouvernement Fillon, l'UMP Benoist Apparu a pour sa part jugé que ce type de décision était "inefficace et contre-productif". Dimanche 28 octobre, soit le lendemain de la réunion entre Cécile Duflot et les associations de défense des SDF, un sans-abri a été retrouvé mort à Paris. Probablement de froid.

EN VIDEO –  Lors d'un point avec la presse, Cécile Duflot n'a pas exclu d'avoir recours à la réquisition de logements vacants.

"Cécile Duflot n'exclue pas la réquisition de logements vacants"