10 septembre 2025 : la France bloquée ? La carte des mobilisations annoncées

Mathilde Georges

10 septembre 2025 : la France bloquée ? La carte des mobilisations annoncées La journée du 10 septembre 2025 approche. S'il ne s'attend pas à "un mouvement d'ampleur", le ministère de l'Intérieur prend très au sérieux les risques de blocage.

Alors que la date du 10 septembre approche, les appels à la mobilisation du collectif "Bloquons-Tout" se poursuivent. Des réunions préparatoires ont notamment lieu un peu partout en France. Rassemblements, blocages, actions de sabotage... Le mouvement du mercredi 10 septembre pourrait prendre plusieurs formes, dont certaines inquiètent les services de renseignements. Cependant, le ministre de l'Intérieur dit qu’il ne croit pas à "des mouvements d’ampleur" lors de la journée du 10 septembre. Toutefois, il a expliqué qu’il pourrait y avoir des "actions spectaculaires".

Les appels à la mobilisation du 10 septembre, lancés dès le mois de mai, ont été massivement repris depuis la mi-juillet, après les annonces budgétaires de François Bayrou. "Ce mouvement est né parce qu'on en a marre", pouvait-on lire sur le site internet mobilisation10septembre, désormais inaccessible. "Marre de voir Bayrou détruire ce qu'il reste de justice et de solidarité. Assez des coupes, assez des sacrifices toujours imposés aux mêmes, assez de l’austérité qui écrase les gens pendant que les puissants continuent tranquilles". Une colère qui a reçu le soutien de plusieurs partis politique de gauche et d'une poignée de syndicats (la CGT, SUD et Confédération paysanne). De quoi faire réagir le gouvernement. 

Le plan anti débordements de Retailleau pour le 10 septembre

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a fait parvenir une note - que Le Figaro a pu consulter - leur indiquant la "conduite à tenir face à de potentiels troubles à l’ordre public". "Toute tentative de blocage des infrastructures essentielles à la vie de la Nation devra être entravée en amont et le cas échéant faire systématiquement l’objet d’un déblocage dans les délais les plus brefs", annonce le locataire de la place Beauvau, clair et net. Sont particulièrement concernés : "les gares, ports, aéroports, transports en commun, axes routiers structurants, les dépôts pétroliers, plateformes logistiques, les centrales électriques, les usines d’incinération de déchets ou les sites de traitement des eaux, ainsi que les principaux centres d’approvisionnement du pays tels que le marché d’intérêt national de Rungis", précise la note. Aussi, en cas de dégradation de bâtiments publics, Bruno Retailleau promet une "interpellation systématique" pour "les présenter à l’autorité judiciaire".

Quid de certaines institutions de la République qui pourraient être prises pour cible ? Elles feront l’objet d’une "sécurisation statique dès que vous estimerez que le niveau de la menace le justifie", réclame le ministre de l'Intérieur aux préfets. Il met l'accent sur "certains équipements publics tels que les radars routiers, ou certains sites susceptibles ’d’incarner le capitalisme'". La mission est annoncée : "quadrillage de la voie publique" et "maîtrise des points stratégiques identifiés par les services de renseignement" pour intervenir rapidement.

La carte des mobilisations du 10 septembre 2025

Le mouvement du 10 septembre, structuré sur le site indignonsnous.fr, n'est pas sans rappeler les débuts du mouvement des Gilets jaunes né en novembre 2018 contre la hausse du prix des carburants : même logique de blocage, même appel à la mobilisation sans les structures syndicales. Mais aura-t-il la même force ? Le collectif citoyen derrière la mobilisation multiplie les idées des mobilisations sur les réseaux sociaux, sans qu'une organisation précise ne voit le jour. Une absence de leadership confirmée dans une note des services de renseignement consultée par Le Parisien.

Les actions de 10 septembre semblent principalement s'organiser par des collectifs locaux, dont "la dynamique actuelle repose principalement sur des militants associatifs, politiques, certains notamment issus de la mouvance d’ultragauche et de certaines fractions syndicales", selon les renseignements territoriaux. L'organisation des mobilisations passe essentiellement par des messageries cryptées sur Telegram ou Signal "avec des canaux distincts pour chaque section locale" tous recensés sur une carte du site Indignons-nous.

Plusieurs dizaines de mobilisations sont déjà renseignées sur une autre carte, distinguant les manifestations et rassemblements des actions de blocage. Les principales villes de France sont concernées, mais des actions se préparent "en tous points du territoire, dans les villages comme dans les grandes agglomérations" d'après les renseignements. Concernant les actions de blocages, elles semblent se concentrer sur des points stratégiques : le port du Havre, les raffineries d'Ile-de-France, les dépôts pétroliers de plusieurs régions... Si aucun blocage concernant des axes routiers n'a été évoqué pour l'heure, certaines initiatives locales pourraient opter pour ce genre d'action le 10 septembre.

Quelles sont les mobilisations prévues le 10 septembre ?  Trois "modes d'actions" annoncés

"Bloquons tout, ça veut dire des manifestations, des blocages de supermarchés ou de stations-service", expliquent plusieurs internautes sur X au sujet du mouvement du 10 septembre. Mais la mobilisation risque surtout de s'exprimer à travers des blocages et des occupations de lieux, plus que par des manifestations traditionnelles sur le voie publique qui sont "peu prisées des contestataires" selon la note des renseignement territoriaux : des centres commerciaux et des entrepôts de grandes entreprises bloquées, des universités occupées, des aéroports et des gares ciblés... 

A l'origine, le collectif citoyen a appelé à "un arrêt total du pays" qu'il présente comme une action "pacifique pour dénoncer les injustices et reprendre le pouvoir collectivement". Les organisateurs ont ensuite annoncé trois "modes d'action" : le boycott, la désobéissance et la "solidarité citoyenne". Le boycott est un appel à se détacher du système capitaliste : cesser les achats dans les grandes surfaces, retirer son argent des banques, limiter la consommation (essence, fast-fashion…) et arrêter de travailler si possible (congés, arrêts maladie…). La désobéissance, elle, doit s'exprimer par le "refus collectif de remplir certaines obligations", le ralentissement volontaire dans les services publics", mais aussi par "l'occupation pacifique de lieux symboliques" et des "blocages ciblés". Ils appellent enfin à une solidarité citoyenne sans laquelle le mouvement ne pourra pas tenir dans la durée, une solidarité qui peut prendre la forme de caisses de grève et de soutien local, de repas partagés ou encore de création d'espaces de discussion et de coordination dans chaque quartier et village.

Les mobilisations du 10 septembre seront-elles suivies ?

Le mouvement du 10 septembre bénéficie du soutien des citoyens selon un sondage Toluna-Harris Interactive pour RTL publié vendredi 22 août : 63 % des sondés disent adhérer au mouvement (surtout les soutiens des écologistes (80%), des insoumis (79%) et de l'extrême droite (77%)). Toutefois, seuls 58 % des Français sont favorables à "bloquer le pays" le 10 septembre, 70 % préférant "des manifestations pour protester contre le budget du gouvernement".

Pour l'heure, les renseignement estiment que "100 000 personnes pourraient se mobiliser partout en France". Le mouvement pourrait cependant être plus importante grâce à "la perspective de la démission du gouvernement [qui] a renforcé la détermination des contestataires". L'ampleur de la mobilisation du 10 septembre pourrait aussi s'accroître sous l'effet d'une convergence des luttes : les renseignement ont noté la présence de militants anti-gouvernement et anti-président, des personnes se revendiquant de la lutte pro-palestinienne et des militants de la communauté LGBTQIA+.

Voilà qui remet en cause un précédent scénario jugeant la convergence des luttes empêchée par la politisation du mouvement. L'association de la gauche à la mobilisation du 10 septembre a eu pour effet de repousser d'autres mouvances militantes, notamment celles de le droite et de l'extrême droite analyse Europe 1. L'absence de soutien de l'intersyndicale peut aussi affaiblir le mouvement, malgré la participation de quelques syndicats.

Face à cette mobilisation soutenu par des mouvances hétéroclites et dénuée de "leadership clairement identifié", les autorités redoutent que "l’absence de coordination structurée" puisse "entraîner des initiatives désorganisées et difficilement anticipables". "L’absence de canalisation majore le risque d’actions par des groupes radicaux et violents", préviennent-ils.

Dernières mises à jour

16:15 - La paralysie dans les transports redoutée

La journée du 10 septembre risque d’être compliquée pour ceux qui voudraient prendre les transports. En effet, comme le rapporte *Public Sénat*, les perturbations risquent d’être importantes. Dans la capitale et autour, le réseau RATP pourrait être affecté. Toutefois, les précisions exactes ne seront connues que 48 heures à l’avance. Quant au réseau ferroviaire de la SNCF, le syndicat Sud Rail appelle à la paralysie du trafic. Les aéroports, de leur côté, ne seront pas épargnés. Sud Aérien a aussi appelé à bloquer les plateformes. Enfin, sur les routes, il est possible que des barrages puissent être mis en place.

13:26 - Pour le 10 septembre, Laurent Jacobelli du RN appelle à "ne pas casser, ne pas tabasser, ne pas insulter"

Le député du Rassemblement national (RN) et porte-parole du parti, Laurent Jacobelli, a lancé un appel sur France Info samedi 6 septembre aux partisans de son mouvement : Il a demandé de "ne pas casser, ne pas tabasser, ne pas insulter" lors des manifestations prévues le 10 septembre. Il a également demandé de "ne pas donner les clés de la révolte à l’extrême gauche".

10:12 - L’ensemble des préfets informés des procédures à suivre en cas de blocage

Bruno Retailleau a adressé à l’ensemble des préfets un document pour les informer de la marche à suivre lors de la journée d’action du 10 septembre 2025, aussi appelée "Bloquons tout", rapporte RTL. Dans ce document, le ministre demande d’empêcher toute tentative de blocage et d’anticiper des actions ciblant certains sites jugés sensibles, tels que les gares, aéroports, dépôts pétroliers, centrales électriques, universités, entre autres.

05/09/25 - 22:55 - Pour Bruno Retailleau, "bloquer tout, c'est stupide"

En déplacement vendredi 5 septembre, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, est revenu sur le mouvement qui appelle à tout bloquer le 10 septembre. "On doit pouvoir en France manifester l'exaspération, on doit pouvoir manifester calmement sans bloquer le pays. Cette consigne de 'bloquer tout', c'est stupide", a-t-il lancé, selon des propos cités par BFM TV. 

05/09/25 - 21:55 - Combien de personnes sont attendues le 10 septembre ?

Le nombre de participants au blocage du 10 septembre est estimé à 100 000, vendredi 5 septembre. "100.000 personnes, c’est un chiffre [...] assez bas, pour la société française. Cela veut dire 1000 personnes en moyenne par département. D’habitude, pour les grandes journées de mobilisation, c’est beaucoup plus", a affirmé le Premier ministre jeudi soir. Cette estimation des renseignements territoriaux semble peu élevée. Le Figaro a rappelé que lors de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites, plus de 280.000 manifestants avaient été dénombrés en juin 2023. 

05/09/25 - 20:55 - Que redoutent les autorités pour le blocage du 10 septembre ?

À l'occasion du mouvement "Bloquons tout le 10 septembre", les autorités s'attendent à plusieurs actions sur le territoire. Parmi elles, des blocages de gares, de raffineries, d'axes de circulation, mais aussi des opérations de sabotage de radars automatiques et des manifestations classiques, a rapporté RTL. Les services de renseignement s'inquiètent du caractère "horizontal" et sans chef du blocage du 10 septembre.

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