Ligue 1 : le Stade Brestois, un trouble-fête qui peut viser l'Europe ?

Ligue 1 : le Stade Brestois, un trouble-fête qui peut viser l'Europe ? Brest est cinquième de Ligue 1, et la saison qui avance n'éloigne pas les Bretons du haut de tableau. Les hommes d'Eric Roy sont-ils en route pour une qualification européenne historique ?

En Bretagne, les saisons se suivent et ne se ressemblent pas ; du moins, s'agissant de football. Le Stade Brestois est 5e de Ligue 1 avec 28 points, au moment de recevoir, ce mercredi soir à 21h00, le FC Lorient, 17e et relégable. Au même stade l'an passé, ce sont les Merlus qui comptaient 28 points et qui tutoyaient les places européennes, alors que les Brestois occupaient la 17e place du championnat. Les Lorientais ont perdu plusieurs joueurs importants en 2023 : Terem Moffi, Enzo Le Fée, Ibrahima Koné, Dango Ouattara, Armand Laurienté... Mais l'effectif brestois n'a connu que de très légers ajustements cet été : comment expliquer cette forme européenne ?

Difficile d'espérer un début de saison plus ensoleillé du côté du Finistère. Sans engager de grands moyens financiers, le Stade Brestois semble déjà avoir assuré son maintien : 28 points acquis avant la mi-saison, soit à peine 10 de moins que ce devrait être nécessaire pour rester dans l'élite. Surtout, confortablement installés à la 5e place avec deux points de retard sur le podium, les hommes d'Eric Roy devraient être immensément raisonnables pour ne pas se prendre à rêver d'Europe. Douce illusion ou horizon réaliste ?

La quête de l'équilibre

Le début de saison brestois repose sur des bases solides et inamovibles : d'abord un entrejeu qui mêle besogne et qualité technique, à l'image de Pierre Lees-Melou, l'un des meilleurs récupérateurs du championnat, et de Mahdi Camara, qui ajoute une plus grande capacité à porter le ballon et à faire progresser le jeu. Tandis que les hommes du milieu de terrain ratissent, le volet créatif est laissé aux joueurs excentrés.

Romain Del Castillo est au sommet de son art, et fait bourgeonner la majeure partie des offensives brestoises. L'ancien Rennais est le meilleur buteur et le meilleur passeur de l'équipe (5 buts et 4 passes décisives). Il totalise également 44 passes clés (passes menant à un tir), ce qui représente trois fois plus que quiconque dans l'effectif et le deuxième total de Ligue 1, derrière Téji Savanier. 

La tête dans les nuages

L'élan brestois s'explique aussi par l'apport nouveau de ses latéraux. Kenny Lala, débarqué à l'hiver dernier, montre qu'il est toujours l'un des meilleurs spécialistes du poste en France. A gauche de la défense, Bradley Locko est indéboulonnable depuis son arrivée cet été en provenance de Reims (100 % de minutes jouées). Une belle affaire à un demi-million d'euros seulement pour un joueur de 21 ans, qui est le défenseur qui réussit le plus de dribbles en Ligue 1 cette saison. Des qualités offensives que n'avait pas Jean-Kévin Duverne, titulaire du poste la saison dernière avant de partir à Nantes.

Ces redoutables animateurs de couloirs alimentent une attaque dominante dans les airs : Steve Mounié est le joueur qui a gagné le plus de duels aériens en championnat cette saison, mais les Brestois peuvent aussi compter sur Jérémy Le Douaron et Martin Satriano dans ce domaine. Brest est tout simplement la meilleure équipe de Ligue 1 de la tête : 54,9 % de duels aériens gagnés.

Bizot et Del Castillo, les maillons forts

Alors la question s'impose : le Stade Brestois peut-il maintenir cette forme ? A priori, rien ne s'y oppose : l'équipe ne surperforme pas offensivement et ne profite pas d'une réussite exceptionnelle par rapport aux occasions qu'elle crée ou subit. Certes, Marco Bizot est l'un des gardiens les plus décisifs du championnat cette saison, mais ses performances passées portent à croire qu'il peut maintenir ces standards.

Reste que l'équipe est très dépendante de la créativité de Romain Del Castillo, et que peu de joueurs ont le profil pour le suppléer en cas de baisse de régime ou de pépin physique. Franck Honorat, joueur le plus décisif la saison dernière, est parti pour le Borussia Mönchengladbach contre huit millions d'euros. Billal Brahimi, prêté par l'OGC Nice, peine à se départir de son étiquette de "super-sub". Le jeune Kamory Doumbia monte en puissance mais n'est pas un véritable joueur de couloir.

Une dynamique fragile ?

Jusqu'à maintenant, les blessures ont épargné les Ty' Zefs, qui ne seront encore privés que d'Achraf Dari et Jordan Amavi mercredi soir contre Lorient. Des séjours à l'infirmerie pour les cadres pourraient rompre une dynamique qui repose sur un groupe très restreint (9 joueurs ont débuté au moins 14 des 16 premiers matchs de championnat) et expérimenté (27,4 ans en moyenne, troisième effectif le plus âgé de Ligue 1).

Le mercato d'hiver ne devrait pas permettre de renforcer l'effectif, car l'Europe ne semble pas être un objectif à court terme et l'idée conductrice demeure de pérenniser le club dans l'élite. Il n'y a pas non plus de raison que l'équipe s'affaiblisse : aucun joueur n'est particulièrement "bankable", les meilleurs éléments étant des joueurs expérimentés et qui ne sortent pas du lot statistiquement. Difficile alors de prédire le deuxième acte de la saison brestoise, mais il serait bien présomptueux d'interdire à une telle équipe de songer, en secret, à la petite musique de l'Europe.