Stéphane Héloir : de Saint-Nazaire à Lhassa en courant

Stéphane Héloir : de Saint-Nazaire à Lhassa en courant Cuisinier de métier, Stéphane Héloir s'est lancé un défi fou : relier en courant la Loire-Atlantique au Tibet, soit 15 000 km. L'Internaute l'a rencontré avant son départ pour 500 jours d'effort et de rencontres.

On avait entendu parler de son projet fou, on a voulu faire plus ample connaissance avec Stéphane Héloir avant son départ de Saint-Nazaire, le 4 juin. L'homme est grand, souriant, ouvert et... très zen. Pourtant, partir à l'assaut de 15 000 km, sur 500 jours, avec pour seul moyen de locomotion ses pieds et ses jambes, cela pourrait être un brin stressant ! Mais Stéphane Héloir, 50 ans, n'a pas peur de se lancer dans ce défi. Le coureur à pied a une longue expérience des marathons, des ultra-trails et des 100 km (il a notamment remporté les 100 km de Paris en 2010 en 8h22'58'').
Entretien avec un coureur qui place l'aventure humaine avant la performance sportive...

L'Internaute Magazine : Comment vous est venue l'idée d'une telle aventure et quelle est la finalité de ce voyage ?

Stéphane Héloir : Ce projet me trottait dans la tête depuis 3 ans. Au début, j'avais prévu un départ pour 2012 mais finalement, ça sera 2011 ! Quand on est prêt, il faut y aller. Ce qui m'intéresse dans ce défi, c'est n'est pas uniquement le côté sportif. Je veux surtout communiquer, partager. Comme je le dis sur mon blog, c'est avant tout un voyage de l'intérieur vers l'extérieur, une ouverture vers les autres. Donc pas de record à la clef, pas de chrono, je ne m'impose rien sinon de me réjouir de cette occasion qui m'est offerte. Je me place dans les foulées de Jamel Balhi*, que j'ai déjà rencontré et avec qui j'ai été en contact pour préparer ce voyage. Ce gars part avec son sac à dos, il dort chez les gens ou à la belle étoile. Je veux faire pareil.

Quel sera votre itinéraire jusqu'à Lhassa ?

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Le circuit (agrandir) © S. Héloir

Mon parcours fait environ 15 000 kilomètres. Je vais partir de Saint-Nazaire [en Loire-Atlantique] le 4 juin. Ma première étape sera longue de 26 km, jusqu'à Savenay. En France, tout un réseau s'est constitué pour mes 28 étapes avec les clubs de course à pied : tous les soirs je serai hébergé chez des coureurs. Après la France, je continue en direction de l'Italie du nord. Puis viendront la Slovénie, la Croatie, la Serbie, le Monténégro, l'Albanie, la Macédoine, la Bulgarie, la Turquie, l'Iran, le Pakistan, l'Inde et le Tibet pour finir. Je compte mettre environ 500 jours.

Pensez-vous rencontrer des difficultés pour entrer dans certains pays ?

Déjà, je ne suis pas sûr de pouvoir atteindre Lhassa puisque le gouvernement chinois ferme le Tibet. Les voyageurs en sac à dos ne sont pas forcément les bienvenus. Mais si je ne parviens pas à rejoindre Lhassa, je terminerai mon périple au Népal ou au Bhoutan. Concernant les visas pour l'Iran, le Pakistan et l'Inde, je les demanderai une fois arrivé à Istanbul - je devrais y être fin septembre, début octobre.

"Ce qui m'intéresse dans ce défi, c'est n'est pas le côté sportif. Je veux surtout communiquer, partager".

Mais je ne crains pas de passer dans ces pays qui ont parfois une mauvaise image. J'ai posé à de très nombreux voyageurs la question de savoir dans quel pays on est le mieux accueilli : ils m'ont justement répondu le Pakistan, l'Iran et le Tibet. Cela fait partie de la religion de ces personnes de réserver un bon accueil aux étrangers.

Comptez-vous courir tous les jours ?

Non. Tous les 10 jours, j'ai prévu une étape de repos. Et si pendant 3-4 jours je ne cours pas, ça m'est égal. Je ne suis pas motivé par la performance. Ce qui m'intéresse c'est le contact avec les habitants. Les deux plus grandes étapes font seulement 40 km.

Quel budget représente un tel projet ?

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A 50 ans, Stéphane Héloir se lance dans une belle aventure. © L'Internaute Magazine

J'ai réuni 7 000 euros pour ce projet. J'ai été soutenu financièrement par mon club "Courir à La Baule", par d'autres associations sportives de la région nazairienne, par des commerçants... Pas mal de partenaires finalement. J'ai compté un budget journalier de 3 euros pour la nourriture. La nuit, j'essaierai de trouver des personnes pour m'héberger, et si ce n'est pas possible, je dormirai à la belle étoile. Le reste du budget est consacré à l'équipement, aux visas, au forfait de téléphone, aux connexions Internet dans les cyber-cafés...

Avec quel équipement partez-vous ?

J'ai prévu 10 paires de chaussures de course. Mais je ne les emmène pas avec moi évidemment. Des amis vont m'en apporter une paire avant l'Italie, puis à Istanbul. Ensuite, mon fils me les enverra par colis via les services postaux. Je ne prends pas de tente : trop lourd. J'ai en revanche acheté un sac de couchage chaud et ultra léger : 600 grammes ! Pareil, mon sac à dos ne pèse que 600 grammes. Et sinon : un matelas de sol, un coupe-vent, un purificateur d'eau... Au total, je vais courir avec sur les épaules un sac qui va faire 6,2 kg.

Vous avez créé un blog pour que le public puisse suivre votre aventure. Vous allez l'alimenter souvent ?

Bien sûr ! Je m'entraîne à aller dans les cyber-cafés pour me servir d'Internet ! (rires) Et je mettrai du contenu sur mon blog à chaque fois que je m'arrêterai, partout dans le monde. D'autant plus que j'ai noué des contacts avec beaucoup d'écoles et de collèges de la région. Mon périple va être suivi dans le cadre d'un projet pédagogique avec ces jeunes. Au lieu de faire un cours de géographie "classique", les enseignants vont se servir de mon aventure pour parler des différents pays que je traverserai. Donc c'est important d'alimenter le blog pour être en contact avec les écoliers et échanger. J'emporte aussi avec moi un appareil photo et je compte poster plein d'images...

Il ne nous reste plus qu'à vous souhaiter "bonne route" !
Merci ! J'invite d'ailleurs toutes les personnes présentes dans la région de Saint-Nazaire à venir partager le départ avec moi : le samedi 4 juin, à 14h30, sur l'esplanade de Villès-Martin à Saint-Nazaire. Amis, partenaires, famille, coureurs à pied... ou sportifs du dimanche : vous me feriez un beau cadeau en parcourant avec moi les 2 km du bord de mer jusqu'à mon départ "réel".

 Pour suivre l'aventure de Stéphane Héloir, rendez-vous sur son blog :
Des baskets dans le vent

* Photographe et marathonien, Jamel Balhi est le premier homme à avoir réalisé ce rêve partagé par beaucoup : faire le tour du monde en courant. Il a traversé 186 pays, sur tous les continents de la planète. Il figure dans le Guinness des Records et a publié plusieurs livres sur ses courses planétaires.