Marc Machin accusé de viol : ce qu'il a reconnu, ce qu'il risque

Marc Machin accusé de viol : ce qu'il a reconnu, ce qu'il risque MACHIN. Jugé à partir de ce lundi 11 octobre aux assises de Paris pour un viol commis en 2018, l'ancienne victime d'une erreur de justice a reconnu les faits.

Marc Machin, 39 ans, est jugé à partir de ce lundi 11 octobre aux assises de Paris pour le viol de la rue Saint-Maur (XIème arrondissement de Paris), survenu en avril 2018, qu'il a reconnu devant les enquêteurs ces derniers mois. Comparaissant pour viol sous la menace d'une arme, extorsion avec arme, escroquerie et violation de domicile, Marc Machin encourt 20 ans de réclusion criminelle. Le procès se déroule à huis clos, à la demande de la victime, depuis le 11 octobre. Le verdict est attendu le 14 octobre.

Soulagement pour la victime : Marc Machin a reconnu, lors de sa garde à vue, le viol datant de 2018 dont il est l'auteur, après l'avoir longtemps nié. Pour Me Adrien Gabeaud, l'un des avocats de l'accusé, "les faits de viol sont reconnus". Et d'ajouter : "Il y a encore des points de discussion sur le contexte dans lequel il [s'est rendu] [à l'appartement]." Ce sont ces "points de discussion" que le procès qui se tient depuis ce lundi 11 octobre devrait éclaircir. Effectivement, Marc Machin a reconnu avoir entendu, depuis la cage d'escalier où il dormait, l'homme résidant dans un des appartements déposer ses clés sous le paillasson, puis s'adresser à une amie restée à l'intérieur : "Je mets le trousseau de clés pour que mon pote puisse entrer". Assurant avoir pénétré dans l'appartement uniquement pour le cambrioler, l'homme de 39 ans affirme également qu'il était convaincu que la jeune femme s'en était éclipsée.

Identifié grâce à son tatouage

Quelques minutes plus tard, après s'être emparé des clés laissées sous le paillasson par le propriétaire du tristement célèbre appartement de la rue Saint-Maur, Marc Machin, selon, ses dires, pénètre dans le logement. Restée dormir sur place après une soirée, et prévenue du départ précoce de son hôte, une jeune femme de 22 ans le découvre, surprise, dans la salle de bain. Sous la menace d'un couteau de 40cm, il la viole et lui vole sa carte bancaire, avant de la forcer à se brosser les dents et à se doucher, afin de faire disparaître toute trace de son crime. La jeune femme se rend immédiatement au commissariat pour y déposer plainte. Les policiers constatent rapidement que 100 euros ont été retirés du compte correspondant à la carte volée. En mai 2018, Marc Machin est interpellé et placé en détention provisoire, les caméras de vidéosurveillance ayant permis de l'identifier grâce aux ailes de son tatouage de phénix, dépassant de sa veste au niveau de sa nuque. Son ADN, reconnu grâce au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), est retrouvé sur la jupe de la victime. Après avoir nié, il reconnaît le viol.

Pour l'une de ses avocates, Me Elise Arfi, "son parcours est synonyme de l'échec des institutions, depuis son placement en famille d'accueil où il a été violé par un autre ado jusqu'à sa sortie de prison". "Comment penser qu'une personne démunie, détruite par une incarcération injuste, à qui on donne beaucoup d'argent et qu'on envoie sur les plateaux de télé va s'en sortir ?" Pour son autre avocat, Me Adrien Gabeaud, celui qu'on surnomme "l'écorché vif" n'a "pas du tout le profil du prédateur sexuel" : "C'est quelqu'un qui est dans une précarité absolue", au "parcours cabossé" et qui "ne s'est jamais sorti de l'affaire du Pont de Neuilly". "Il faudra expliquer cela, sans l'excuser. Il est l'accusé, pas la victime" a-t-il également indiqué.

Qui est Marc Machin ?

Né le 14 mai 1982 à Paris, Marc Machin a une enfance tumultueuse, balloté de famille d'accueil en famille d'accueil. Fils d'un gardien de la paix, il grandit à Satins (Seine-Saint-Denis) avant d'être placé une première fois, alors qu'il n'a que deux ans, en famille d'accueil avec son frère – mais sans sa sœur. Leur mère les récupère pour quelques années. Âgé de cinq ans, il assiste à une violente dispute entre ses parents, au cours de laquelle sa mère, visant son père, le loupe et tire dans le mur avec l'arme de service du gardien de la paix. L'enfant est confié à la DDASS. Séparé de ses frère et sœur, il est placé dans une famille d'accueil à Rambouillet (Yvelines), où il subit plusieurs viols par un autre adolescent. A ses huit ans, il est accueilli par ses grands-parents paternels à Marseillan (Hérault), où il vit ce qu'il décrira lui-même comme les plus belles années de sa vie. Sa mère décède, emportée par le sida. Il vient de fêter son dixième anniversaire. Âgé de douze ans, il est contraint de passer de foyer en foyer après la mort de sa grand-mère, jusqu'à ce qu'il rejoigne le domicile de son père du 18ème arrondissement de Paris. Âgé de seulement dix-neuf ans, il a déjà sombré dans la délinquance après une adolescence ponctuée de fugues, de violences, d'alcool et de cannabis.

C'est pour une erreur judiciaire qui lui aura valu plusieurs années d'emprisonnement que le délinquant est connu du public. En décembre 2001, identifié par un témoin, Marc Machin est accusé du meurtre de Marie-Agnès Bedot sur le pont de Neuilly (Hauts-de-Seine). Du fait du train de vie embrumé qu'il menait alors (il se drogue et boit beaucoup), il commence lui-même à douter de sa mémoire et va jusqu'à se demander s'il ne souffre pas d'un dédoublement de personnalité. Il confie alors ses doutes aux enquêteurs. Six mois plus tard, en mai 2002, une autre femme, Maria-Judith Araujo, est retrouvée morte sur ce même pont. Malgré les nombreuses similitudes avec le précédent crime, le juge d'instruction refuse de joindre les deux dossiers. En juillet de la même année, les résultats ADN tombent et l'ADN de Marc Machin n'est présent ni sur un des deux corps, ni sur les lieux du crime. Le jeune homme est tout de même condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle pour le premier crime, en 2004. Rebondissement : en mars 2008, David Sagno, un SDF, s'accuse du meurtre de Marie-Agnès Bedot. Son ADN est retrouvé sur ses effets et sur le corps de la seconde victime. L'homme sera condamné à 30 ans de réclusion, dont 20 de sûreté. En octobre 2008, après que Rachida Dati, alors garde des sceaux, a saisi la commission de révision des condamnations pénales, Marc Machin est libéré. Il lui faudra attendre 2012 pour être acquitté, lors d'un procès en révision. Marc Machin devient la huitième personne, depuis 1945, à être acquittée lors d'un procès en révision. Il aura passé, à tort, six ans et demi en prison.

En 2014, Machin obtient 663 320 euros d'indemnisation, l'une des plus fortes sommes jamais octroyées pour une erreur judiciaire. Il en dépense la totalité très rapidement, en voyages, prostituées, parfums, stupéfiants…

Dès sa sortie de prison en 2008, celui qu'on surnomme "l'éternel accusé" cumule les incarcérations. Condamné en 2010 à trois ans d'emprisonnement pour plusieurs agressions sexuelles, il est libéré sous conditionnelle en 2011 puis de nouveau envoyé pour six mois en prison pour recel de vol et violences en 2013. Il repassera brièvement par la prison pour s'être soustrait à ses obligations liées à certaines de ces condamnations, en janvier 2016.