Mort de Jean Pormanove : des violences consenties ? La défense des streamers et les conclusions de l'autopsie
Jean Pormanove, de son vrai nom Raphaël Graven, est mort dans la nuit du dimanche 17 au lundi 18 août à Contes, près de Nice (Alpes-Maritimes). L'homme de 46 ans est décédé face caméra lors d'un live marathon sur la plateforme Kick qui durait déjà depuis douze jours. Une séquence, marquée par des humiliations et des violences, à laquelle il participait avec deux streamers membres du collectif "Le Lokal" : Owen C., alias "Narutovie", et Yassin S., alias "Safine".
Alors que le parquet de Nice a ouvert une enquête pour déterminer si les violences subies lors du live ont un lien avec la mort, les conclusions de l'autopsie réalisée le jeudi 21 août indiquent que la mort de Jean Pormanove "n’a pas une origine traumatique et n’est pas en lien avec l’intervention d’un tiers". Les examens ont mis en évidence le "présence de quelques ecchymoses et lésions cicatrisées plus particulièrement sur les membres inférieurs", mais ont confirmé "l'absence de lésions traumatiques tant au niveau interne qu'externe, ce notamment au niveau du visage et du crâne, pouvant expliquer le décès et l'absence de lésions correspondant à des brûlures".
Excluant l'hypothèse d'une mort causée par un tiers, l'autopsie a indiqué que "les causes probables du décès apparaissent donc d’origine médicale et/ou toxicologique". "Des analyses complémentaires, toxicologiques et anatomopathologiques, ont été ordonnées pour préciser ces causes", a écrit le parquet dans le communiqué. Ces résultats seront "mis en relation" avec les antécédents médicaux connus de Raphaël Graven. Le streamer décédé souffrait de "difficultés cardiaques mises en évidence" lors d'une intervention dentaire en 2024 et suivait un traitement médical pour la glande thyroïde, précise le communiqué du parquet.
Des violences "simulées" et "consenties" selon les avocats des streamers
Ces éléments qui affaiblissent les accusations visant "Narutovie" et "Safine" concernant une responsabilité dans la mort de Jean Pormanove. Me Tom Michel, l'avocat du streamer Safine assure que son client "n'avait pas connaissance de potentielles problématiques d'ordre cardiaque" de "JP". Il ajoute par ailleurs toutes les séquences d'humiliations et de violences diffusées par les streamers sur Kick "étaient consenties" et que certaines étaient simulées sur BFMTV : "Une partie était simulée, mais quand vous donnez des coups, comme quand vous êtes au catch ou au cinéma, il y a bien sûr de la simulation, mais surtout du consentement".
L'enquête confiée à la brigade de recherches de Nice doit, entre autres, vérifier que les violences, simulées ou non, étaient bien consenties. Un point important qui fait écho à une précédente enquête ouverte pour soupçons de maltraitances envers des personnes vulnérables en 2024 suite aux révélations de Médiapart sur les violences subies par Jean Pormanove. Une procédure durant laquelle "Narutovie" et "Safine" avaient été placés en garde à vue en janvier 2025, avant d'être finalement relâchés.
Au moment de son décès, Raphaël Graven participait à un live sur la plateforme de stream Kick depuis "298 heures", soit douze jours, avec ses deux acolytes issus des quartiers populaires niçois. Plusieurs internautes, cités par RMC BFMTV, affirment que le quadragénaire venait de subir "dix jours et nuits de torture", retransmis en direct : violences physiques "extrêmes", "privation de sommeil", "l'ingurgitation de produits toxiques". Médiapart qui a consulté l'intégralité du live ayant été supprimé décrit certaines séquences : "On y voit Raphaël Graven se faire frapper et humilier à de très nombreuses reprises, par d'autres membres de la chaîne hilares, le tout sous messages d'insultes des spectateurs". "Narutovie", Safine H et un autre homme surnommé "3Cheveux" "frappent, étranglent, moquent et humilient" Raphaël Graven et "Coudoux", un homme handicapé sous curatelle.
Le live a subitement pris fin après la découverte de la mort de Jean Pormanove, retrouvé parmi d’autres personnes endormies, la tête dissimulée sous une couette. L'interruption du direct a provoqué l'inquiétude des fans du collectif "Lokal" sur le forum Discord. Certains affirmaient que Raphaël Graven aurait fait "une sorte d'étouffement dans son sommeil".
"Dis devant la caméra que c’est pas notre responsabilité si tu meurs"
Raphaël Graven, allias "JP", a menacé à plusieurs reprises d'appeler la police au cours des douze jours de direct selon les images vues par Médiapart. Ces menaces ont été régulièrement "tournées en ridicule par les autres membres de la chaîne". Un extrait relayé par le compte X de Cerfia montre également "Narutovie" lire un message de détresse de "Jean Pormanove" à sa mère quelques jours avant son décès : "Là ça va trop loin. J'ai l'impression d'être séquestré avec leur concept de merde". Sa mère, inquiète, lui aurait répondu : "C'est de pire en pire, je te plains mon fils", en notant qu'il avait beaucoup maigri. Mais "Narutovie", moqueur, a lâché devant l’écran : "T'as jamais eu aussi bonne mine fils de p*te".
???????? "Là ça va trop loin. J’ai l’impression d’être séquestré". Le streameur Jean Pormanove a envoyé des messages de détresse à sa mère, quelques jours avant de mourir dans son sommeil, en direct. "Tu as maigri", lui écrit cette dernière. "T’as jamais eu aussi bonne mine fils de… https://t.co/M7ZsHiugVc pic.twitter.com/nsruzdjGtl
— Cerfia (@CerfiaFR) August 18, 2025
Les protagonistes étaient-ils au courant des problèmes de santé de Jean Pormanove ? Non selon leurs avocats. Reste que l'hypothèse du décès du streamer avait été évoquée par Narutovie et Safine lors d'un précédent live : "Si demain, il meurt en plein live, c’est dû à son état de santé de merde et pas à nous. (…) Dis devant la caméra que c'est pas notre responsabilité si tu meurs en plein live", lançait "Narutovie" avant que "Jean Pormanove" s'exécute.
Pointé du doigt par les internautes depuis la mort de "JP", Yassin S. a annoncé via un communiqué de son avocat son intention de déposer plainte suite à une "campagne de cyberharcèlement". De son côté, "Narutovie" a affirmé sur Instagram que "personne ne sait, mais tout le monde parle", ajoutant sur sa relation avec le streamer : "On s’aimait et c’est tout ce qui compte." Le frère de ce dernier, qui a déjà participé à certains des streams, a tenu à défendre leur version auprès de RTL. "On faisait pas mal de conneries, de défis, mais c'était quand même assez contrôlé, scénarisé", a expliqué Gwen. D'après lui, l'équipe de streamers faisait en sorte que les scènes paraissent spectaculaires, mais qu'ils étaient "à des années lumières de penser qu'il pouvait arriver quelque chose comme ça".
Les streamers Narutovie et Safine bannis, l'Arcom saisi
"Profondément attristés" par la disparition du streamer, la compte X Kick France a annoncé mercredi 20 août avoir banni "tous ses costreameurs", dont ses deux acolytes "Naruto" et "Safine", dans l'attente de l'enquête en cours. "Nous nous engageons à collaborer pleinement avec les autorités dans le cadre de ce processus. En outre, nous avons mis fin à notre collaboration avec l’ancienne agence française de réseaux sociaux et entreprenons une révision complète de notre contenu en français" a écrit la plateforme.
Le gouvernement s'est aussi saisi de l'affaire. La ministre en charge du Numérique Clara Chappaz a saisi l'Arcom et a signalé les contenus sur la plateforme Pharos, tout en exigeant des explications de Kick. "Si l’enquête de l’Arcom montre la responsabilité de la plateforme Kick, il y aura des sanctions. Notre main ne tremblera pas", a averti la ministre, jeudi 21 août. Elle a aussi demandé à "sortir du Far West numérique". "Kick a annoncé revoir l'ensemble de ses procédés en matière de modération des contenus, de définition de ses conditions générales d'utilisation et de protection des mineurs", a annoncé dans un communiqué l'Arcom, jeudi 21 août, après un échange avec les dirigeants australiens de la plateforme. Selon le communiqué, repris par franceinfo, Kick s'est engagée à coopérer pleinement avec les régulateurs européens afin de se conformer à la directive européenne sur les services numériques.
Toutefois, après la mort de Jean Pormanove, la plateforme Kick a décidé de réactiver la chaîne du streamer pour permettre aux autorités de découvrir d'éventuels manquements. L'Arcom a condamné, vendredi 22 août, la levée du blocage de la chaîne. "La mise à la disposition des autorités de ces enregistrements ne peut justifier la levée du blocage pour l'ensemble du public", a fustigé l'Arcom dans un communiqué cité par BFM TV. Le régulateur français a demandé à Kick de rétablir le blocage de la chaîne de Jean Pormanove rapidement. La chaîne était à nouveau inaccessible en France vendredi 22 août au soir, un message d'erreur s'affichant sur la plateforme Kick.
22:35 - Les lives étaient des moments de "fiction", selon l'avocat d'un streamer
Interrogé par l'AFP vendredi 22 août, Me Philippe-Henry Honneger, avocat de NarutoVie, présent aux côtés de Jean Pormanove au moment de sa mort, a indiqué que son client était "ami" avec l'homme décédé. Selon lui, les lives étaient des moments de "fiction". Lors d'une enquête menée au début de l'année 2025, toutes les personnes interrogées, y compris Jean Pormanove, ont "dit que c'était de la fiction, ils ont tous expliqué pourquoi c'était de la fiction, comment c'était de la fiction", a-t-il développé dans des propos rapportés par CNews. De son côté, l'avocat de Safine Hamadi, Me Tom Michel, a ajouté que Jean Pormanove "était très loin du cliché de la victime séquestrée".
21:40 - L'avocat de NarutoVie dénonce un "déchaînement médiatique et politique"
Quatre jours après la mort de Jean Pormanove en direct sur Kick, deux streamers présents à ses côtés, Safine et NarutoVie, sont accusés d'avoir torturé et humilié l'homme décédé dans son sommeil. Jeudi 21 août, l'autopsie du streamer a écarté l'intervention d'un tiers dans sa mort. Vendredi 22 août, Me Philippe-Henry Honneger, avocat d'Owen Cenazandotti, alias NarutoVie, a estimé que "l’affaire devrait s’arrêter là". Il a ajouté que son client était victime d'un "déchaînement médiatique et politique". "Le monde entier s’est ému de la possibilité que des gens aient pu être la cause de la mort de ce monsieur, et on a une autopsie qui vient vous dire que ce n’est pas le cas", a précisé l'avocat à l'AFP, cité par CNews.
20:30 - La chaîne de Jean Pormanove est à nouveau bloquée
La chaîne Kick de Jean Pormanove est à nouveau bloquée en France. Trois jours après la mort du streamer en direct sur la plateforme Kick, la chaîne de Jean Pormanove avait été réactivée, jeudi 21 août. Dans un communiqué publié vendredi 22 août, l'Arcom avait condamné cette décision, arguant que "la mise à la disposition des autorités des enregistrements présents sur la chaîne "jeanpormanove" ne peut justifier la levée du blocage de la chaîne pour l’ensemble du public". La chaîne était finalement à nouveau inaccessible vendredi 22 août. "Le blocage de la chaîne 'jeanpormanove' demandé par l’Arcom est de nouveau effectif", s’est félicité le gendarme français du numérique, cité par RTL info. Un message d'erreur s'affiche à l'écran.
19:04 - "Internet n'est pas une zone de non-droit", fustige Bruno Retailleau
Quatre jours après la mort en direct de Jean Pormanove, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, interrogé par RTL vendredi 22 août, a demandé aux plateformes de prendre leurs responsabilités. "Internet n'est pas une zone de non-droit", a-t-il assuré. "Comment aujourd'hui, il peut y avoir un public pour regarder ces abominations, pour regarder ces horreurs, pour regarder ces actes de barbarie ?", s'est questionné l'homme politique. Pour rappel, la chaîne de Jean Pormanove était suivie par près de 200 000 abonnés sur Kick.
18:23 - L'Arcom condamne la réouverture du compte Kick de "Jean Pormanove"
Dans un communiqué publié vendredi 22 août, l’Arcom a condamné "avec force" la décision de Kick.com de réactiver jeudi 21 août le compte du streamer Jean Pormanove, décédé en direct après avoir été victime de sévices devant des milliers d’internautes. La vidéo de son décès reste indisponible. Pour justifier cette décision, la plateforme évoque la nécessité de répondre aux demandes du régulateur et des parties prenantes souhaitant accéder aux contenus pour analyser la modération passée. L’Arcom juge que cette réouverture "va à l’encontre des premières annonces de la plateforme, laquelle semblait avoir pris la mesure de la gravité des récents événements" et rappelle que la mise à disposition des enregistrements aux autorités ne saurait justifier la levée du blocage. Le régulateur "appelle à leur responsabilité les dirigeants de Kick.com afin de réactiver, dans les plus brefs délais, le blocage de la chaîne jeanpormanove et examinera toutes les possibilités d’action dans le cas contraire".
17:11 - TikTok renforce la modération après la mort de Jean Pormanove
Depuis la mort du streamer Jean Pormanove en direct sur Kick le 18 août, TikTok a intensifié la modération des contenus montrant son corps ou les violences subies lors de ses lives. "Les contenus ont bien été modérés", affirme le réseau social à BFMTV Tech&Co. Selon leurs informations, seuls les extraits à caractère "informatif", provenant de médias officiels ou de comptes anonymes, restent accessibles. Les vidéos montrant la découverte du corps, largement diffusées depuis le 18 août, sont désormais difficiles à trouver, et les recommandations mettent en avant des contenus où les visages et les actions sont floutés. TikTok reconnaît avoir connu des "ratés" et des "trous" dans son système de modération. "Nous supprimons les contenus non autorisés avant même qu'ils soient vus ou autorisés et nous restreignons le contenu qui n'est pas adapté au public de 13 à 17 ans," avait souligné Nicky Soo, responsable de la sûreté de Tiktok. Le réseau social observe désormais "de très près" les contenus autour des hashtags (les mots clefs) liés à l'affaire Jean Pormanove.
16:21 - Les gendarmes sont intervenus deux fois lors du live
Selon des vidéos du live marathon consultées par Mediapart, les gendarmes se sont rendus à deux reprises dans le "lokal", lieu de tournage de la chaîne de streaming où Jean Pormanove a trouvé la mort. La première visite a eu lieu le 13 août en fin d’après-midi, à la suite d’un appel présenté comme un "swat" – un canular répandu dans le milieu du streaming, qui consiste à alerter faussement la police ou la gendarmerie afin de perturber un direct et provoquer une intervention visible à l’écran. "Bah essayez de sensibiliser vos… je sais pas comment on dit… vos followers, je sais pas, car on a autre chose à faire, quoi", lance alors l’un des gendarmes. "Ouais, c’est ça qui est chiant, désolé !", répond Naruto. Après ce bref échange, les militaires repartent, avant de revenir quelques minutes plus tard pour restituer un téléphone oublié.
Le lendemain matin, 14 août, les forces de l’ordre effectuent une nouvelle visite, cette fois pour un contrôle d’identité. Alors que Jean Pormanove dormait encore, c’est un autre streamer qui a communiqué ses informations à sa place.
14:19 - Plus de 1 730 extraits problématiques collectés par un lanceur d’alerte
L’affaire de la mort de Jean Pormanove avait déjà été médiatisée en décembre dernier par le journal en ligne Mediapart. À l’origine de l’enquête, un lanceur d’alerte dont l’identité n’est pas connue. Au lendemain de la mort de Jean Pormanove, ce lanceur d’alerte a décidé de mettre en ligne, et à la disposition de tous, une immense base de données alimentée depuis février 2024. "C'est quelque chose que je n'avais jamais vu sur d'autres plateformes comme YouTube ou Twitch. J'ai commencé à enregistrer des extraits d'une minute à chaque fois que je voyais quelque chose de choquant, comme une humiliation, un geste de violence ou des insultes envers Jean Pormanove, raconte le lanceur d'alerte au média France info. Au total, il a extrait 1 739 vidéos.
08:40 - "Tout était consenti" assure l'avocat du streamer "Safine"
Les conclusions de l'autopsie rendues hier soir écartent l'hypothèse de "l'intervention d'un tiers" pour expliquer la mort de Jean Pormanove et vont dans le sens de la défense des streamers "Naruto" et "Safine" accusés par les internautes d'être responsables du décès de "JP". L'avocat de "Safine" a d'ailleurs rappelé sur BFMTV que son client "est non seulement présumé innocent, mais aussi et surtout même pas accusé" dans cette affaire. Déroulant la défense des streamers, Me Tom Michel soutient que les images de violences contre Jean Pormanove diffusées sur Kick en partie simulées et systématiquement consenties : "Une partie était simulée mais quand vous donnez des coups, comme quand vous êtes au catch ou au cinéma, il y a bien sûr de la simulation, mais surtout du consentement. Tout ce qu'on voit n'est pas toujours simulé, un coup ne peut pas toujours être simulé, par contre tout était consenti".
21/08/25 - 23:10 - Pourquoi l'Arcom n'a-t-elle pas réagi plus tôt ?
L'Arcom a été pointée du doigt après la mort de Jean Pormanove survenue en direct sur la plateforme Kick. Le gendarme numérique français a répondu qu'il était difficile d'agir parce qu'il n'a pas le pouvoir de stopper la diffusion de vidéos sur internet. L'Arcom peut seulement demander aux plateformes de faire de la modération. Ceci n'était pas possible jusqu'à présent puisqu'il n'y avait pas d'interlocuteur dans l'Union européenne, a indiqué franceinfo. De plus, l'Arcom peut intervenir sur certains thèmes comme l'accès à la pornographie par les mineurs, la lutte contre la désinformation ou contre la haine en ligne. Le régulateur ne peut pas supprimer des contenus, ni ordonner la fermeture d'un site, mais peut demander à la justice de le faire.
21/08/25 - 22:20 - Kick s'engage à revoir ses règles après la mort de Jean Pormanove
Dans un communiqué publié jeudi 21 août, l'Arcom a indiqué que "Kick a annoncé revoir l'ensemble de ses procédés en matière de modération des contenus, de définition de ses conditions générales d'utilisation et de protection des mineurs". Le gendarme numérique a échangé avec les dirigeants australiens de la plateforme jeudi. Kick s'est engagée à coopérer pleinement avec les régulateurs européens afin de se conformer à la directive européenne sur les services numériques.
21/08/25 - 21:35 - Naruto n'avait "pas connaissance" de l'état de santé de fragile de Jean Pormanove
Invité de BFM TV jeudi 21 août, Philippe-Henry Honegger, avocat du streameur "Naruto", a indiqué que son client n'avait "pas connaissance" de l'état de santé fragile de Jean Pormanove, mort en live quelques jours plus tôt. "On ne connaît pas la cause exacte de la mort", a-t-il rappelé. Le rapport d'autopsie révélé ce jeudi a "exclu l'intervention d'un tiers". "C'était de la fiction, les choses étaient scriptées", a ajouté l'avocat à propos des violences que Jean Pormanove avait reçues en live. "Chacun jouait un rôle qu'ils s'attribuaient les uns les autres", a conclu Philippe-Henry Honegger.
21/08/25 - 20:42 - La plateforme Kick menacée ?
La ministre du Numérique, Clara Chappaz, a pointé, jeudi 21 août, la responsabilité de la plateforme Kick sur laquelle la mort de Jean Pormanove a été diffusée en direct. "Si l’enquête de l’Arcom montre la responsabilité de la plateforme Kick, il y aura des sanctions", a-t-elle averti. "Notre main ne tremblera pas", a assuré la ministre citée par Le Figaro. Par ailleurs, la ministre a demandé à la plateforme combien la chaîne, suivie par 200 000 personnes, générait d'argent, mais elle n'a pas obtenu de réponse.
21/08/25 - 19:40 - Clara Chappaz demande à "sortir du Far West numérique"
Jeudi 21 août, la ministre du Numérique Clara Chappaz a demandé, lors d'un déplacement, à "sortir du Far West numérique". "Des millions de Français ont découvert qu’un homme était mort en direct. C’est un drame", a ajouté la ministre citée par Le Figaro. Des centaines de vidéos diffusées en direct sur la plateforme Kick montrent Jean Pormanove, de son vrai nom Raphaël Graven, en train de se faire insulter et frapper par d'autres streamers. Ces vidéos étaient suivies en direct et certains internautes envoyaient de l'argent.
21/08/25 - 19:06 - Pour Gabriel Attal, la mort de Jean Pormanove est "un drame"
Trois jours après la mort de Jean Pormanove, Gabriel Attal, député EPR des Hauts-de-Seine et secrétaire général du parti Renaissance, a publié un post sur X, proposant plusieurs mesures concernant les jeunes et les réseaux sociaux. Ainsi, l'ancien Premier ministre propose deux dépistages de l’addiction aux écrans : un à l’entrée du collège et un second au lycée. Il recommande aussi d'interdire les réseaux sociaux avant 15 ans et demande l'instauration d’un couvre-feu numérique pour les 15-18 ans. Gabriel Attal propose un passage en noir et blanc des images après 30 minutes d'utilisation consécutives pour les mineurs de plus de 15 ans. Enfin, il souhaite créer une taxe sur les plateformes pour financer la recherche sur l’addiction aux écrans et pour la santé mentale.
Gabriel Attal a écrit que la mort de Jean Pormanove était un "drame", mais aussi une "révélation brutale de réseaux sociaux devenus les nouveaux jeux du cirque". Il a demandé justice pour Jean Pormanove. "Chacun doit être mis devant ses responsabilités et répondre de ses actes : ses bourreaux comme les plateformes", a-t-il demandé.
Comme le racontre Le Parisien, Raphaël Graven est un ex-militaire qui a exercé à la base aérienne 128 de Metz-Frescaty de 1997 à 2007, selon ses dires sur les réseaux sociaux. Après une décennie de silence, il refait surface en 2020, en pleine pandémie, dans le monde du gaming sur Twitch. Ses réactions rageuses sur Fortnite, souvent aux côtés de figures comme The Kairi 78 ou Le Bouseuh, lui valent une certaine notoriété. Les premières moqueries s’accumulent, tant sur le plan physique qu’intellectuel, mais son audience explose, cumulant les centaines de milliers d’abonnés sur Twitch, TikTok ou encore Instagram.
Le tournant survient lorsqu’il rencontre "Narutovie" et "Safine". Avec eux, il abandonne progressivement le gaming pour se lancer dans les défis extrêmes. En juillet 2022, il diffuse sur YouTube une vidéo intitulée "Je me fais bouffer par des chiens d’attaque", la première d'une longue série. Dès lors, ses contenus prennent une tournure de plus en plus violente, principalement sur Kick et la chaîne YouTube "Le Lokal TV". "Coudoux", un homme en situation de handicap sous curatelle, se joint au trio. En décembre 2024, Mediapart révèle que ces “défis” tournent en humiliations répétées de Coudoux et "Jean Pormanove", alimentant ce qu’ils qualifient de "business de la maltraitance". Leurs vidéos leur rapportaient effectivement beaucoup d'argent, à raison de plusieurs milliers d'euros par mois. Selon le procureur de Nice, Coudoux avait déclaré gagner jusqu’à 2 000 euros par mois, tandis que Raphaël Graven évoquait "des sommes à hauteur de 6 000 euros" via "une société qu’il avait créée (et) sur la base des contrats établis avec les plateformes". Les streamers de Kick bénéficient d’une répartition des revenus particulièrement avantageuse (95 % pour eux, 5 % pour la plateforme).
Sur RTL, la mère du streamer décrit son fils comme un garçon "au grand cœur" qui s'était créé une seconde famille à Nice auprès de ces streamers. "Il avait des frères à Metz, mais il s’était trouvé des frères à Nice, c'était une famille il était invité partout", a-t-elle raconté le mercredi 18 août. Sa sœur, quand à elle, qualifie son décès "d'intolérable" et estime que son frère est mort d'épuisement. "J'étais très très fière de ce qu’est devenu son frère", a-t-elle indique. "Je ne regardais pas tout mais j'estime qu'il n’aurait pas dû mourir comme ça, qu’il est décédé d’épuisement. Ce qu'il a vécu est inacceptable".
Une enquête déjà ouverte en 2024
A la suite des révélations, le parquet de Nice avait ouvert une enquête préliminaire le 16 décembre visant "Safine" et "Naruto" pour trois chefs d'accusation : "provocation publique par un moyen de communication au public par voie électronique à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur handicap", "violences volontaires en réunion sur personnes vulnérables ayant entraîné une ITT inférieure à 8 jours" et "diffusion d'enregistrement d'images relatives à la commission d'infractions d'atteintes volontaires à l'intégrité de la personne".
Le duo avait été placé en garde à vue début janvier, et leur matériel de tournage saisi. Ils niaient les faits, tout comme Jean Pormanove et Coudoux, qui au cours de leur audition, "contestaient fermement être victimes de violences, indiquant que les faits s’inscrivaient dans des mises en scène visant à “faire le buzz” pour gagner de l’argent" selon le procureur de Nice. "L’un et l’autre indiquaient n’avoir jamais été blessés, être totalement libres de leurs mouvements et de leurs décisions et refusaient d’être examinés par un médecin et un psychiatre", a-t-il ajouté.
Mais "tant les personnes susceptibles d’être mises en cause que celles d’être victimes contestaient la commission d’infractions", avait à l’époque souligné le parquet. Ils ont par la suite été relâchés. Leur chaîne Kick, suspendue un temps, avait été réactivée ces derniers mois. Jusqu’à ce drame.