"Retourne en Afrique" : l'injure raciste en vidéo, tollé et réactions à l'Assemblée

"Retourne en Afrique" : l'injure raciste en vidéo, tollé et réactions à l'Assemblée L'Assemblée nationale s'est prononcée en faveur de la sanction la plus lourde envers Grégoire de Fournas, auteur d'une injure raciste pendant la prise de parole du député de La France insoumise Carlos Bilongo à l'Assemblée nationale. Une phrase qui a suscité un tollé et des réactions venus de tout l'échiquier politique.

[Mis à jour le 4 novembre 2022 à 17h28] Par un vote dans l'hémicycle à l'unanimité, hors Rassemblement national (RN), l'Assemblée nationale s'est prononcée en faveur de la sanction la plus lourde contre le député RN Grégoire de Fournas, qui s'était écrié "Qu'ils retournent en Afrique" ou "Qu'il retourne en Afrique", pendant la prise de parole de l'Insoumis Carlos Martens Bilongo, d'origine congolaise, lors des Questions à l'Assemblée, le jeudi 3 novembre. 

Cette sanction prévoit "la privation, pendant deux mois de la moitié de l'indemnité parlementaire allouée au député", ainsi que "l'interdiction de prendre part aux travaux de l'Assemblée et de reparaître dans le Palais de l'Assemblée jusqu'à l'expiration du quinzième jour de séance qui suit celui où la peine a été prononcée." Après ce vote, Grégoire de Fournas a réagi sur Twitter en indiquant s'y soumettre, même s'il parle d'une "sanction inouïe avec une grande injustice", et se dit "totalement innocent".

Les propos du député RN ont fait réagir dans tous les partis politiques. La Nupes et la majorité présidentielle ont plaidé pour la sanction "la plus lourde", tout comme Carlos Martens Bilongo, qui a indiqué au micro de RMC "attendre la sanction la plus lourde". Grégoire de Fournas a estimé être pour sa part victime d'une "honteuse manipulation" visant à détourner ses propos. Devant la presse et dans un courrier adressé à Carlos Martens Bilongo et publié par BFMTV, Grégoire de Fournas a assumé sa phrase et assure qu'elle faisait "référence au bateau et aux migrants" dont il était question dans le discours du député LFI et non à son collègue élu. Emmanuel Macron a dénoncé des "propos intolérables", selon une déclaration relayée par Le Parisien. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a indiqué ce vendredi sur BFMTV et RMC que "la question de sa démission se pose", ajoutant qu'il signerait une pétition du groupe Renaissance réclamant son départ. LFI et les Verts demandent aussi sa démission. 

Lors d'une manifestation devant l'Assemblée nationale, ce vendredi, en milieu de journée, en présence de Jean-Luc Mélenchon, Carlos Martens Bilongo a déclaré : "Ma personne a été attaquée, mais aussi les personnes qui me ressemblent. Des millions de Français ont été attaqués hier".

La vidéo de l'injure raciste d'un député RN à l'Assemblée

La vidéo enregistrant l'injure raciste prononcée par l'élu du RN Grégoire de Fournas a fait polémique. L'extrait montre que durant sa question portant sur l'immigration clandestine, le député LFI Carlos Martens Bilongo a été coupé à deux reprises par son collègue d'extrême droite. La deuxième interpellation est celle qui a suscité la colère de l'Assemblée. "Retourne en Afrique" peut-on entendre dans la vidéo sans savoir si la phrase discriminante est lancée à l'égard de l'élu d'origine congolaise ou des migrants dont il parle. Pas le temps de se poser la question et quelle que soit la réponse, elle n'enlève rien au caractère raciste du propos selon les députés de la gauche et de la majorité qui dans les secondes suivant la sortie de Grégoire de Fournas scandent "Dehors ! Dehors !"

L'agitation dans l'Assemblée nationale causée par l'injure raciste a contraint la présidente de la chambre basse du Parlement à suspendre la séance de quelques minutes, le temps de s'entretenir avec le député auteur des propos. A son retour, celle qui occupe le perchoir a annoncé la tenue en urgence d'une réunion du bureau ce vendredi 4 novembre à 14h30 pour se prononcer sur une éventuelle sanction".

Qui est le député à l'origine des propos racistes ?

Grégoire de Fournas a été élu député de la 5ème circonscription de Gironde lors des dernières élections législatives. Il est aussi membre de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, et rapporteur de la mission de suivi de l'application de la loi EGalim 2, visant à mieux protéger la rémunération des agriculteurs. Il est également élu municipal depuis 2020, et a siégé entre 2015 et 2021 au Conseil départemental de la Gironde. Encarté au RN depuis 2011, il s'est dans le passé fait connaître pour ses positions en faveur de la défense de la chasse, et a également milité contre l'installation d'un parc éolien dans la commune de Lesparre-Médoc, d'après les informations de Sud-Ouest. Le média Rue89 indique que Grégoire de Fournas a déjà créé la polémique dans le Médoc avec ses positions radicales "notamment contre l'accueil des jeunes mineurs non accompagnés", ainsi que pour "des accointances avec les franges les plus racistes et antisémites de son audience sur sa page Facebook".

Quelles sont les réactions à l'injure raciste prononcée à l'Assemblée ?

S'il est resté calme au sein de l'Assemblée, le député insoumis de la 8ème circonscription du Val-d'Oise, Carlos Martens Bilongo, a dénoncé les propos de l'élu RN devant la presse : "Aujourd'hui, on m'a renvoyé à ma couleur de peau. Je suis né en France, je suis député français. On voit la vraie face du Rassemblement national. Me faire insulter, c'est totalement honteux". Ce vendredi sur l'antenne de BFMTV, l'élu assure qu'"il n'y a pas de doute" quant au fait qu'il était personnellement visé par l'injure de Grégoire de Fournas. Il ajoute que cette sortie montre "le vrai visage" du Rassemblement national.

Outre l'élu directement concerné par la phrase raciste, c'est toute la classe politique, en particulier la gauche et la majorité présidentielle, qui condamne la sortie du député et plus largement le Rassemblement national. La Nupes exige que l'exclusion du député soit prononcée. C'est aussi la question de la démission de Grégoire de Fournas qui se pose selon plusieurs politiques dont le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin invité de BFMTV ce vendredi. Une pétition mise en ligne par la majorité circule en ce sens depuis hier. Emmanuel Macron s'est dit pour sa part "heurté" par des "propos intolérables", selon des propos rapportés par son entourage et relayés dans Le Parisien.

À l'initiative de LFI, un rassemblement de soutien l'élu du Val d'Oise Carlos Martens Bilongo s'est tenu aux abords de l'Assemblée. "Ma personne a été attaquée, mais aussi les personnes qui me ressemblent. Des millions de Français ont été attaqués hier. En 2022, nous ne devons pas laisser place à ces idées", a affirmé Carlos Martens Bilongo, entouré d'élus de gauche et de Jean-Luc Mélenchon. 

"Ils sont ce qu'ils ont toujours été, des racistes, des fascistes", a lancé Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier souhaite la démission du député RN Grégoire de Fournas : "Il faut que la peine soit proportionnelle à l'acte, et la proportion, c'est : dehors !", a-t-il déclaré, avant de demander une exclusion temporaire de l'Assemblée, la sanction disciplinaire la plus sévère. Selon la cheffe des Insoumis dans l'hémicycle, Mathilde Panot, "un seuil a été franchi."