Immigration : que disait le programme du candidat Macron en 2017 et 2022 ?

Immigration : que disait le programme du candidat Macron en 2017 et 2022 ? Si la loi immigration demeure partiellement conforme au programme initial du candidat Macron, notamment dans son approche de l'intégration et de la gestion européenne des questions migratoires, elle concrétise un virage sur les quotas, les droits des étrangers et les aides sociales...

L'économie d'abord ! Lors de sa campagne pour la présidentielle et dans les semaines qui ont suivi son élection en 2017, Emmanuel Macron aura mis la priorité sur la transformation du pays et la "start-up nation" qu'il appelait de ses voeux, délaissant les questions régaliennes et migratoires. Son programme sur l'immigration, résumé en une poignée de mesures, reflétait alors une position ouverte, insistant sur la nécessité d'une intégration rapide, avec des procédures simplifiées, le tout dans un cadre européen. Cette approche restait dans la lignée de ses prises de positions de ministre de l'Economie, où l'immigration était plus présentée dans son discours comme une "opportunité" que comme un fardeau pour la France.

Mais, face à une baisse de popularité et des sondages défavorables dès les premiers mois de son premier quinquennat, le chef de l'Etat va effectuer un virage très rapide sur le sujet, investissant le champ migratoire avec un ton plus ferme. La création de "hot spots" en Libye et l'objectif de n'avoir aucun migrant dans les rues d'ici fin 2017 seront les premiers signaux clairs de ce revirement. Ils seront suivis par un premier projet de loi dit "asile et immigration", porté par Gérard Collomb en 2018, et déjà salué par la droite, tout en créant des tensions au sein de sa majorité.

Une droitisation progressive sur l'immigration

En 2022, Emmanuel Macron et Marine Le Pen s'opposaient encore clairement sur plusieurs aspects de la politique d'immigration. Alors que la candidate d'extrême droite défendait la priorité nationale, la suppression du droit du sol et souhaitait traiter les demandes d'asile uniquement depuis l'étranger, le président sortant mettait toujours l'accent sur une intégration plus stricte et conditionnée, ainsi que sur une gestion européenne des frontières. Sans aller plus loi.

Il annoncera pourtant un nouveau projet de loi sur l'immigration pour début 2023, le présentant comme une refonte "nécessaire" du système d'accueil dans son ensemble, jugé "inefficace et inhumain". Le projet de loi immigration récemment adopté va venir finaliser ce changement de ligne du macronisme, avec des concessions majeures faites à la droite et même une adhésion sur le fond du Rassemblement national.

Parmi les mesures de la loi que le candidat Macron n'avait pas annoncées dans ses programmes présidentiels, on trouve des restrictions significatives sur les prestations sociales pour les étrangers non européens, un durcissement des conditions de régularisation des travailleurs sans papiers, d'accès à la nationalité française et de regroupement familial, et des changements en matière de quotas migratoires, de déchéance de nationalité, et de droit du sol, même si elle maintient certaines des visions initiales de Macron. Parmi les points de crispation, l'Aide médicale d'Etat (AME) a été maintenue, même si son accès sera plus restrictif.

Le programme de 2017 : accueillir, simplifier, intégrer

En 2017, Emmanuel Macron se fixait 4 objectifs en termes d'immigration et d'asile : donner la priorité absolue à l'intégration, favoriser une immigration de la connaissance, s'assurer que la France assume sa juste part dans l'accueil des réfugiés tout en reconduisant plus efficacement à la frontière ceux qui ne sont pas acceptés et enfin promouvoir une Europe qui protège ses frontières dans le respect de ses valeurs.

Objectif 1 : l'intégration.

"L'intégration en France passe avant tout par la maîtrise de la langue, qui conditionne l'emploi et l'insertion, et par la connaissance des valeurs de la République", disait alors le programme du candidat. .

  • Nous proposerons que chaque étranger en situation régulière arrivant en France ait droit à une formation linguistique suffisante pour atteindre le niveau B1 (niveau qui permet la naturalisation). Cette certification :
  • Nous mettrons en place des programmes locaux d'intégration

Objectif 2 : l'immigration de la connaissance.

  • Nous allégerons les procédures et réduirons les délais d'obtention des visas "talents", pour améliorer l'attractivité de la France dans la compétition internationale pour attirer les talents étrangers (créateurs d'entreprises, d'investisseurs, de chercheurs ou d'artistes).
  • Nous développerons les visas de circulation pour les professionnels (entreprises, scientifiques..) : ceux-ci devraient être inscrits sur une liste de bona fide établie sous la responsabilité de la chambre de commerce locale ou du service économique régional de l'ambassade, afin de permettre un traitement rapide des dossiers.
  • Nous simplifierons les modalités d'accès au travail pour tous les étudiants titulaires d'un master en France.
  • Il est de notre intérêt qu'ils participent à notre développement scientifique et économique et tissent des liens professionnels avec des acteurs économiques nationaux.

Objectif 3 : l'accueil des réfugiés.

"La France doit être à la hauteur de sa tradition historique d'accueil, tout en se montrant, dans des conditions toujours dignes, inflexible avec les personnes qui ne remplissent pas les conditions de séjour sur notre territoire.
Un réfugié politique, ce n'est pas quelqu'un qui choisit de quitter son pays par confort", assurait Emmanuel Macron sur France Inter le 1er février 2017.

  • Nous réformerons les conditions d'examen des demandes d'asile avec l'objectif d'assurer une prise de décision en 8 semaines pour toutes demandes.
  • Nous réformerons les modalités de recours contre les décisions de refus. En cas de recours, le jugement interviendra dans un délai de 6 à 8 semaines.

Objectif 4 : l'Europe et ses frontières.

  • Nous renforcerons le corps de police des frontières européen, en lui donnant une capacité de surveillance et de protection durables des frontières extérieures. Il faut fixer une ambition de 5 000 hommes mobilisables par la nouvelle Agence européenne de garde-frontières et de garde côtes.
  • Nous développerons des actions et des projets dans les principaux pays de départ et de transit des migrants, de manière complémentaire et additionnelle à notre aide au développement, en appuyant également l'installation de points de contrôle dans ces pays avant l'arrivée dans l'UE, l'aide à la lutte contre les passeurs et le retour des migrants non autorisés à entrer dans l'UE.

Pas de réel changement en 2022

Lors de la présidentielle 2022, Emmanuel Macron n'a pas proposé de réel changement par rapport à son premier quinquennat.

  • Poursuivre la refonte du droit d'asile et du droit au séjour pour que les décisions soient prises plus rapidement. Le refus du droit d'asile vaudrait obligation de quitter le territoire français
  • Conditionner l'octroi d'un titre de long séjour à la réussite d'un examen de Français et à une réussite professionnelle
  • Cesser le renouvellement des ressortissants de pays tiers troublant l'ordre public
  • Créer un conseil pilotant Schengen
  • Créer un dispositif intergouvernemental d'urgence pour aider Frontex
  • "Prendre sa part" dans l'accueil de réfugiés ukrainiens