Jour-J pour la loi immigration au Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel, présidé par Laurent Fabius, rendra ce jeudi son avis sur la loi controversée sur l'immigration. Une décision très attendue, sur un texte dont l'adoption avait été marquée par d'intenses dissensions en France en fin d'année dernière. Cette instance, composée d'anciens premiers ministres, ministres et juristes éminents, se trouve une fois de plus au centre d'un débat national intense, survenu seulement huit mois après la réforme des retraites.
La loi, qui avait suscité des manifestations en décembre, inclut des mesures telles que la restriction du regroupement familial, la limitation de l'accès aux prestations sociales, et une remise en question du droit du sol. Ces mesures, introduites par la droite sénatoriale au moment de l'examen du texte, sont celles qui sont le plus susceptibles d'être retoquées par le Conseil.
Le Conseil sous pression
La situation est d'autant plus complexe que l'exécutif, dans un geste sans précédent, a reconnu avoir inclus des dispositions "manifestement et clairement contraires" à la Constitution pour obtenir une majorité. Emmanuel Macron avait ainsi demandé lui-même au Conseil constitutionnel de se pencher sur la loi sans soulever de questions spécifiques, une démarche qui a suscité des réactions mitigées, notamment de la part de Laurent Fabius, qui a rappelé que le Conseil n'est pas "une chambre d'appel des choix du Parlement".
Les Républicains, sous la direction d'Eric Ciotti, ont également exercé une pression directe sur le Conseil, affirmant que la loi ne contient pas de "cavalier législatif" et rappelant que certaines de ses dispositions ont déjà été validées par le passé.
Une censure partielle attendue
Parmi les 86 articles de la loi, environ cinquante sont contestés, soit en tant que cavaliers législatifs - des dispositions qui n'ont rien à faire dans le projet de loi -, soit parce qu'ils contreviendraient aux principes fondamentaux. Bien que la censure totale de la loi soit jugée improbable, une censure partielle est largement attendue. Cette censure partielle, surtout des mesures les plus conservatrices, serait favorable à la majorité présidentielle. Dans ce scénario, les LR pourraient se retrouver dans une position délicate, pouvant les amener à réclamer une révision constitutionnelle pour contrôler l'immigration, en prévision des élections européennes.
Ce jeudi, les neuf membres du Conseil tenteront de dépasser ces considérations politiques. Laurent Fabius rappelle régulièrement que le rôle de l'institution est de vérifier la conformité des lois avec la Constitution, même si cela implique de valider des textes qui paraissent inappropriés.
La composition du Conseil, majoritairement de droite, ne devrait pas influencer leur décision, car, comme le souligne Fabius, ils sont à un âge où ils n'ont "plus rien à espérer ni à redouter". Leurs délibérations, fidèles à la tradition d'opacité de l'institution, resteront confidentielles, mais leur décision sera déterminante pour l'avenir de la loi sur l'immigration en France.