Pourquoi la réélection de Vladimir Poutine est-elle assurée mais faussée ?

Pourquoi la réélection de Vladimir Poutine est-elle assurée mais faussée ? Organisée de vendredi à dimanche, l'élection présidentielle russe devrait voir Vladimir Poutine l'emporter avec une très large majorité des suffrages et briguer un cinquième mandat. En revanche, l'absence de candidats-concurrents pose la question de la légitimité du maître du Kremlin.

L'élection présidentielle russe se déroule du 15 au 17 mars 2024. Un peu plus de 114 millions de personnes sont inscrites sur les listes électorales et sont appelées à voter. Candidat à sa propre succession, le président Vladimir Poutine devrait triompher ce dimanche et dépasser le score de 77 % des suffrages atteint en 2018. S'il venait à s'imposer, le maître du Kremlin entamerait son cinquième mandat à la tête de la Fédération de Russie, le troisième consécutif. 

Assuré d'une victoire, Poutine lorgne le triomphe

Si l'issue du vote ne laisse que peu de place au doute, Vladimir Poutine souhaite plus que tout pousser la population à aller voter pour légitimer son score. Le scrutin à distance, lui, a démarré le 25 février et s'est achevé ce jeudi 14 mars. L'objectif étant de faciliter le vote pour les zones les plus reculées de Russie, comme celui des habitants des régions annexées en Ukraine pour lesquelles des bureaux de votes mobiles ont été prévus. Trois candidats sont également en lice pour accéder au plus haut sommet de l'Etat, et deux autres, véritablement opposants au président en place ont été exclus du scrutin il y a peu.

La présidentielle russe ne suscite pas d'engouement particulier. D'abord parce que Vladimir Poutine dispose de la quasi certitude d'être réélu ce dimanche. En revanche, ce dernier a besoin d'un plébiscite pour légitimer son régime. "Un régime politique "personnaliste" a besoin d'une reconfirmation régulière de la légitimité et de la popularité de son leader. Poutine tout-puissant cherche l'acclamation de la population et de ses élites. D'autant plus que son système a affiché diverses failles depuis le début de l'invasion en Ukraine, tant par la piètre qualité de l'information fournie par les différents services spéciaux au président, convaincus de la possibilité de prendre Kiev en trois jours, que par les déboires de l'armée russe" explique Tatiana Kastouéva-Jean, spécialiste de la Russie, dans une tribune au Monde.

Quel poids pour les trois autres candidats ?

Les candidats qui se présentent face à Vladimir Poutine ne présentent pas de garanties solides pour inquiéter le président de 71 ans. Il est même difficile de les qualifier de "concurrents" tant leurs positions sur l'invasion de l'Ukraine sont similaires à celles du pouvoir russe. Les trois candidats sont tous membres de partis représentés au Parlement russe, mais n'ont même pas eu besoin de recueillir le nombre de parrainages nécessaires pour se présenter à l'élection. Leur présence face à Vladimir Poutine donne simplement l'impression d'un semblant de pluralisme et de contradictoire.

Le premier, Nikolaï Kharitonov, représente le Parti communiste russe. "Notre tâche est de consolider le peuple pendant la campagne électorale pour qu'il y ait une victoire sur tous les fronts" indiquait-il en décembre 2023. Le deuxième, Leonid Sloutsky, est à la tête du Parti libéral-démocrate russe. Relativement proche de Vladimir Poutine, il a d'ores et déjà promis qu'il ne lui ôterait "pas de voix". Enfin, Vladislav Davankov est le dernier candidat à l'élection présidentielle russe. Député et ancien candidat à la mairie de Moscou, il est un fervent défenseur de l'offensive russe et de la guerre de manière générale : "Voudrais-je la paix à tout prix ? Non" avait-il lancé concernant l'Ukraine dans les colonnes de Fontaka, un média russe. Son parti est régulièrement accusé d'être une opposition montée de toutes pièces par le Kremlin.

La commission électorale russe écarte deux candidatures sérieuses

Deux candidatures d'opposition crédibles à Vladimir Poutine s'étaient pourtant mises en place en vue du scrutin de ce mois de mars. Les deux ont été écartées. Boris Nadejdine, candidat libéral et pacifiste a notamment vu sa candidature rejetée par la commission électorale russe. Le nombre de parrainages d'électeurs vérifiés et valables requis est de 100 000. Andreï Choutov, membre de la commission a invalidé 9 147 de ses signatures de soutien. Résultat des courses, le candidat ne dispose que de 95 587 parrainages. Il n'a pas pu se présenter à cette élection présidentielle de 2024. Opposé à la guerre en Ukraine, il qualifiait notamment le souhait de la Russie de créer plus de territoires de "mauvaise idée" auprès de France Info.

Le constat est le même pour la journaliste et ex-élue municipale Ekaterina Dountsova. La commission électorale russe a invalidé sa candidature en décembre dernier évoquant des "erreur dans des documents" fournis par la candidate. Elle aussi opposée à l'offensive russe en Ukraine, elle milite notamment pour la démocratie. Ajoutez à cela un potentiel bourrage des urnes, comme lors des élections législatives de 2021 explique Freedom House, et vous obtenez une élection dont la légitimité pose question. Cette année, le vote électronique pourrait également augmenter le risque de fraudes.