Motion de censure du PS : un texte critique du RN qui pourrait quand même le voter

Motion de censure du PS : un texte critique du RN qui pourrait quand même le voter Le PS compte déposer une motion de censures spontanée contre le gouvernement Bayrou après l'adoption du budget. Le texte ne peut aboutir sans le soutien du RN, mais ses chances de réussite ne sont pas totalement nulles.

Le Parti socialiste (PS) a tranché quant à la censure du gouvernement de François Bayrou et il a décidé d'agir en deux temps. Première étape : refuser de voter la censure après l'adoption du budget 2025 par 49.3. Priver la France de budget une deuxième fois reviendrait à mener la "politique du pire" selon Olivier Faure. Dans Libération, le Premier secrétaire du parti a expliqué cette décision par les sollicitations d'une "multitude d'acteurs (collectivités locales, TPE, PME...) qui ont besoin d'un budget et qui ne peuvent pas se permettre d'attendre". Mais le choix a un goût amer pour les socialistes, dont le député et porte-parole Arthur Delaporte qui a reconnu depuis l'Assemblée nationale le 3 février que "ce budget n'est pas un bon budget, pour autant, il faut un budget pour la France".

Seconde étape : affirmer son opposition au gouvernement de François Bayrou et faire taire les critiques venant, essentiellement, du camp insoumis. Le PS a donc annoncé déposer une motion de censure spontanée, conformément à l'article 49.2 de la Constitution, pour dénoncer la politique et certains propos jugés très droitiers du Premier ministre. "Nous déposerons, à l'issue [de la procédure budgétaire], une motion de censure, parce que nous nous opposons plus largement à ce gouvernement, à ce qu'il représente, à ce qu'il a dit la semaine dernière sur la 'submersion migratoire', et plus largement sur toutes les remises en cause de l'État de droit, du droit social, économique, du devoir de vigilance…", a affirmé Arthur Delaporte.

Cette motion de censure, attendue pour la fin de semaine devrait être votée deux jours plus tard ou en début de semaine prochaine, s'annonce surtout symbolique. Le PS reconnaît lui-même que le texte n'aura que peu de chances de renverser le gouvernement. En plus du PS, toutes les autres forces de gauche devraient soutenir la motion : les écologistes, les communistes, et même les insoumis. Le Nouveau Front populaire souhaite voir le gouvernement Bayrou tomber au plus vite et les élus insoumis auraient du mal à justifier leur abstention après avoir accusé tous ceux ne votant pas la censure de rejoindre de fait le camp présidentiel. Cela ne ferait jamais que 192 voix sur les 289 nécessaires pour censure le Premier ministre.

Le RN ne s'interdit rien

La motion de censure du PS aura besoin du vote des 124 élus du Rassemblement national (RN) pour aboutir. Or, sur le fond, la motion de censure défendra des idées contraires à celles de l'extrême droite, difficile donc d'imaginer le texte soutenu par les élus lepénistes. Un point souligné par le député insoumis Eric Coquerel. D'autant que le RN parait déjà hésitant à voter la motion de censure sur le budget, le président du parti semble même opposé à cette idée. "Je pense que dans la période dans laquelle nous sommes, les Français ne tireraient pas profit d'une nouvelle forme d'instabilité qui pourrait avoir des conséquences lourdes sur l'économie", a-t-il déclaré sur Europe 1, le 4 février. Reste à savoir s'il parle d'une instabilité uniquement liée à l'absence de budget ou du chamboulement qu'entraînerait une nouvelle censure du gouvernement, moins de trois mois après la précédente.

Pourtant, le RN ne s'interdit rien, pas même de voter la motion de censure du PS selon les confidences d'un proche de Marine Le Pen à Politico. Et ce ne serait pas la première fois que le RN voterait une motion de censure allant à l'encontre de ses idées et signée par la gauche : c'est comme ça qu'il a entrainé la chute de Michel Barnier.

La motion de censure du PS a donc une petite chance d'aboutir. Le camp présidentiel le sait et s'en inquiète : "Les socialistes doivent prendre conscience que le risque [que le RN vote cette motion] est réel, nous ne le négligeons pas", a glissé un conseiller exécutif à Politico. Réponse d'Olivier Faure dans Libération : "Si notre motion est adoptée, le gouvernement tombera, mais nous aurons préalablement assuré l'existence d'un budget". Le plan du PS aurait alors parfaitement fonctionné.