La France envoie-t-elle des armes à Israël ? Pourquoi les convois de fusils mitrailleurs font polémique
Selon une information de Disclose et du média irlandais The Ditch, un cargo de la compagnie israélienne Zim devait faire escale à Fos-sur-Mer ce jeudi 5 juin et repartir quelques heures après, chargé de 14 tonnes de pièces détachées pour fusils mitrailleurs. Mercredi, les dockers de Fos-sur-Mer ont décidé de mettre ce conteneur de côté. Ils "ne le chargeront pas sur le bateau à destination d'Haïfa" a indiqué le syndicat général de la CGT des ouvriers dockers et des personnels portuaires du Golfe de Fos dans un communiqué consulté par France Info.
Alertés par "plusieurs réseaux" au sujet de l'embarcation de 19 palettes de maillons fabriqué par Eurolinks, les dockers ont retrouvé le conteneur après avoir informé leur hiérarchie et les autorités compétentes. Eurolinks est une entreprise privée marseillaise qui fabrique ces maillons métalliques utilisés pour relier les balles de fusils mitrailleurs et permettre le tir en rafale. La CGT affirme dans son communiqué qu'il s'agit de pièces "servant à l'armée israélienne pour continuer le massacre de la population palestinienne".
"Nous ne participerons pas au génocide"
"Le port de Marseille-Fos ne doit pas servir à alimenter l'armée israélienne", justifie le syndicat. "Les dockers et portuaires du Golfe de Fos ne participeront pas au génocide en cours orchestré par le gouvernement israélien. Nous sommes pour la paix entre les peuples. Nous déplorons tous ces conflits armés qui engendrent la mort, la misère, l'exode de populations", poursuit-il.
Toujours selon les deux médias d'investigation, ce convoi serait le troisième du genre entre Fos-sur-Mer et Haïfa depuis le début de l'année. "Et ce, malgré les appels des expert·es de l'ONU à cesser les livraisons d'armes à Israël en raison du risque de génocide des Palestinien·nes, dans un conflit qui a fait plus de 50 000 morts, dont 15 000 enfants selon l'Unicef.", rappellent les journalistes.
La première livraison aurait été expédiée le 3 avril dernier, avec 26 palettes représentant plus de 20 tonnes de matériel, toutes destinées à la société israélienne IMI Systems, qui se présente comme "fournisseur exclusif des forces israéliennes de défense". Le second envoi a eu lieu le 22 mai, avec près deux millions de maillons à bord.
Le gouvernement dément tout usage militaire direct
Ces livraisons ont été confirmées par le ministre des armées, Sébastien Lecornu, lors d'une conférence de presse en mars 2024. Alors, ces pièces sont-elles utilisées directement dans les opérations militaires à Gaza ? Non, selon le ministre, qui assure qu'elles sont destinées à la "réexportation" vers d'autres pays. Contacté par France Info, il réfute les affirmations de la CGT, expliquant que l'armée israélienne n'utilise pas ce matériel. Ces pièces, exportées par l'entreprise marseillaise, sont assemblées en Israël et le produit final est "réexporté" vers la France ou d'autres pays. Il souligne que l'Etat hébreu reste "un partenaire".
Une position que défend également Jean-Luc Bonelli, président de la société marseillaise auprès de Disclose : "Les licences qui nous sont octroyées par les autorités [françaises], contraignent IMI à n'utiliser nos maillons que pour les cartouches destinées à leurs clients étrangers." Mais selon les propres déclarations du fabricant, aucun contrôle n'a été effectué par les services de l'ambassade de France à Tel-Aviv pour s'assurer de l'identité du destinataire final.
Lors de l'émission "Etcetera" de France Inter, enregistrée le mardi 1 octobre 2024, Emmanuel Macron a réaffirmé que la France ne livre pas d'arme à Israël, tout en insistant sur "la priorité" : parvenir "à une solution politique" et cesser "de livrer les armes pour mener les combats sur Gaza".