Motion de censure : le RN et la gauche prêts à renverser François Bayrou

Motion de censure : le RN et la gauche prêts à renverser François Bayrou François Bayrou a dressé la liste des pistes envisagées pour le budget 2026. Des forces d'opposition ont déjà prévu de le censurer, mais l'avenir du Premier ministre dépendra une nouvelle fois du RN.

François Bayrou a présenté ses pistes pour le budget 2026 ce mardi 15 juillet, sans risque de censure... pour le moment. Nous somme en effet à plus deux mois avant l'ouverture des débats à l'Assemblée sur le budget et le début de l'examen du projet de loi de finances au Parlement. Mais le Premier ministre s'est déjà exposé, en dévoilant les mesures envisagées pour faire 40 milliards d'euros d'économie et réduire le déficit à 4,6 %, contre 5,8 % actuellement.

Conscient du risque de censure, François Bayrou a choisi d'ouvrir le débat sur le budget 2026 après le début des vacances parlementaires, mais plusieurs semaines avant l'arrivée du texte à l'Assemblée nationale. Un délai précieux durant lequel, malgré leurs congés, les élus vont discuter de la position à adopter et trancher quant au dépôt et au soutien ou non d'une motion de censure. Mais les mesures annoncées ce mardi, notamment sur le pouvoir d'achat des retraités, sur la mise en place d'une "année blanche" et sur la suppression de deux jours fériés tend déjà les partis d'opposition.

Certains partis ont déjà fait connaître leur façon de penser, La France insoumise en tête. "Évidemment qu'à la rentrée, nous déposerons une nouvelle motion de censure", a réaffirmé Manuel Bompard, coordinateur national de LFI, le mardi 15 juillet sur Franceinfo. "On a toujours été cohérents. On conteste la politique de François Bayrou, on cherche à le censurer", a ajouté le député des Bouches-du-Rhône soulignant que toutes les occasions sont bonnes pour essayer de renverser le gouvernement. Jean-Luc Mélenchon juge qu'il est "urgent de mettre un terme à la macronie. Il faut faire partir Bayrou". Pour le député LFI Eric Coquerel, le calcul est très simple : "Si ce budget reste en l'état, il y aura un 49.3. On proposera une motion de censure et on la votera", a-t-il lancé en fin d'après-midi, ce mardi.

Les élus socialistes rejettent l'idée d'une censure automatique et prévoient de négocier avec le gouvernement : "C'est notre devoir", a déclaré le député de l'Eure Philippe Brun sur Sud Radio disant toutefois avoir "peu confiance" envers le Premier ministre.

"Demander toujours plus à ceux qui ont peu... et si peu à ceux qui ont beaucoup n'est ni sérieux ni efficace ni juste. Un budget brutal et inacceptable", dénonce de son côté Boris Vallaud, président du groupe PS à l'Assemblée nationale. Le Premier secrétaire socialiste Olivier Faure regrette lui "un plan de démolition de notre modèle français" et "une année noire pour les Français". De son côté, Marine Tondelier - secrétaire nationale EELV - évoque tout simplement une "honte". "7 ans de macronisme c’est +1000 milliards d'euros de dette et la multiplication des cadeaux aux ultra-riches. Et aujourd’hui, qui doit trinquer ? Les services publics, la santé, les retraites, les travailleur•euses et l’écologie bien sûr", lance l'écologiste sur X.

Jordan Bardella a aussi fait savoir qu'"aucun député" du RN n'accepterait la suppression de deux jours fériés. Ce qui rend assez inéluctable l'horizon d'une censure sur ce budget.

Le RN favorable à une censure de Bayrou...

Comme souvent, les votes du Rassemblement national (RN) seront décisifs à l'issue d'une motion de censure. Si toutes les forces de gauche soutiennent la censure, elles ne seront pas suffisamment nombreuses pour renverser le gouvernement : 192 voix sur les 289 requises pour atteindre la majorité absolue. Les 123 voix du RN (135 en ajoutant celles des alliés ciottistes) seront nécessaires. Le vice-président RN avait prévenu sur France Inter lors du vote de la précédente motion de censure, auquel les élus lepénistes ne s'étaient pas joints : "Le tour de François Bayrou viendra au moment du budget".

Maintenant que l'heure est venue, Sébastien Chenu confirme sur BFMTV que le RN votera la motion de censure "si François Bayrou veut faire les poches des Français". Le parti de Marine Le Pen pose effectivement plusieurs lignes rouges, comme il l'avait fait avec Michel Barnier avant de le censurer : pas de hausse d'impôts et pas de modification des pensions de retraite. Plus généralement, le RN refuse que des efforts supplémentaires soient demandés aux Français.

"Si François Bayrou ne revoit pas sa copie, nous le censurerons", a prévenu Marine Le Pen, après la présentation du plan du Premier ministre. "Emmanuel Macron et François Bayrou sont incapables de faire de vraies économies et présentent une énième facture aux Français" et "aucune économie sur le coût de l'immigration, des subventions aux énergies intermittentes" n'a été présentée par le chef du gouvernement, regrette-t-elle. Les conditions n'apparaissent donc pas remplies. Les pensions des retraites gelées, les hausses d'impôts indirectes induites par l'année blanche... Les raisons semblent suffisantes pour censurer François Bayrou selon toute une branche du RN, déjà irritée par la non-participation du parti à la motion de censure début juin.

... sauf revirement ?

Le RN pourrait cependant ouvrir une porte de négociations, et le Premier ministre pourrait compter sur les discussions à venir avec l'extrême droite, en présentant ses mesures comme une base de travail... Il faut dire que le RN pourrait aussi considérer des avantages à voir le Béarnais rester à Matignon. En faisant passer un budget 2026 plutôt austère et à tout le moins synonyme de réduction des dépenses, le gouvernement pourrait rendre service au parti qui remportera la présidentielle de 2027, y compris si c'est le RN, en assainissant les comptes publics. "Si le ménage n'a pas été fait avant notre élection, les marchés ne nous pardonneront rien. La pression sera immense. Il serait plus moral que ce soit à la macronie de prendre les décisions dures nécessaires pour solder la gestion catastrophique macroniste…", explique un gradé du RN au Point. Une logique déjà évoquée lors de l'examen du budget 2025. "On ne vous censurera pas si vous faites le boulot", avait lancé Jean-Philippe Tanguy aux ministres de Bercy du gouvernement Barnier avant que le budget n'inclue des hausses d'impôts trop importantes.

Autre argument à même de faire hésiter le RN face à une motion de censure : renverser le gouvernement Bayrou, c'est appeler la nomination d'un nouveau Premier ministre. Laquelle pourrait s'accompagner de nouvelles élections législatives maintenant qu'Emmanuel Macron a retrouvé son pouvoir de dissolution. Un nouveau scrutin lors duquel Marine Le Pen ne pourrait pas essayer de récupérer son siège de député du fait de son inéligibilité prononcée lors du procès des assistants parlementaires.

Dernières mises à jour

18:32 - "On proposera une motion de censure et on la votera", assure LFI

"On rentre dans un refus catégorique de ce qui a été proposé (...) C'est une remise en question de notre modèle social", regrette le président de la commission des Finances Éric Coquerel au micro de BFMTV, après la conférence de presse de François Bayrou sur les directions qu'il entend donner au budget 2026. "Si ce budget reste en l'état, il y aura un 49.3. On proposera une motion de censure et on la votera", insiste le député LFI.