Nouveau gouvernement : Macron aurait une date butoir pour former une nouvelle équipe de ministres
Le gouvernement Bayrou a survécu à sept motions de censure depuis sa nomination à Matignon, mais il risque de tomber sur son premier vote de confiance. Nommé en décembre 2024, après l'échec du gouvernement de Michel Barnier sur le vote du budget 2025, François Bayrou pourrait, à son tour, être renversé sur le même sujet. Alors que son projet budgétaire présenté à la mi-juillet a été unanimement critiqué par l'opposition, il a décidé de se soumettre à un vote de confiance le 8 septembre à l'Assemblée nationale en vertu de l'article 49.1.
Si François Bayrou n'obtient pas le soutien d'une majorité de députés, alors son gouvernement chutera. Or, toutes les oppositions du PS au RN ont déjà annoncé, et plusieurs fois confirmé, voter contre le confiance. De fait, Emmanuel Macron pourrait être amener très rapidement à nommer un Premier ministre, puis un nouveau gouvernement. Il s'agirait de la cinquième nomination d'un Premier ministre depuis 2022 et le début de son second mandat après Elisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier et François Bayrou.
Un Premier ministre nommé en quelques jours ?
Les derniers remaniements ont eu tendance à traîner du fait des nombreuses consultations d'Emmanuel Macron. Lesquelles étaient nécessaires, en particulier après les législatives de 2024 face à la tripartition de l'Assemblée et l'absence de majorité. Mais cette fois, le chef de l'Etat est appelé à faire vite d'abord pour permettre au futur gouvernement de proposer un budget, mais aussi pour faire face aux mouvement citoyens annoncés les 10 et 18 septembre. "Je lui ai envoyé un message dernièrement pour lui dire qu'il fallait vite un nouveau Premier ministre, dès le 9 ou 10 septembre", a confié un parlementaire macroniste à Franceinfo. Un message laissé sans réponse.
Si une nomination deux jours après la vraisemblable chute de François Bayrou parait très rapide pour Emmanuel Macron, l'idée de nommer un Premier ministre avant le 18 septembre fait son chemin. L'exécute s'inquiète davantage de la grève intersyndicale que de la mobilisation citoyenne de 10 septembre. "On a besoin d'avoir quelqu'un à mettre en face des syndicats le 18 septembre" a d'ailleurs confié un ministre à Politico. Une date antérieure à la mi-septembre permettra par ailleurs au chef de l'Etat de ne pas parasité le sommet de l'ONU durant lequel il reconnaîtra l'Etat de Palestine, les 22 et 23 septembre. Reste que nommer un Premier ministre rapidement ne sera pas chose aisée.
Une coalition du PS jusqu'au au bloc central ?
Emmanuel Macron a récemment demandé aux responsables des partis du bloc central "d'essayer d'élargir selon les modalités qu'ils souhaitent", révèle Politico, selon un conseiller du président. Autrement dit : ils sont invités à "travailler avec les socialistes" et à discuter avec tout le monde, sauf LFI et le RN. "C'est le truc habituel : le métronome penche à gauche", précisait un macroniste historique. La volonté du chef de l'Etat pourrait être, une nouvelle fois, de mettre son parti à la tête du gouvernement de coalition allant de la gauche socialiste jusqu'au centre-droit.
Si Olivier Faure a rappelé être "à la disposition" d'Emmanuel Macron pour discuter des "conditions" dans lesquelles la gauche pourrait prendre part à un gouvernement de coalition, sur LCI, il s'oppose à un gouvernement "en même temps de droite et de gauche". Alors, Emmanuel Macron l'a bien compris et a sorti la calculette : un gouvernement de coalition ne pourra être possible que du PS, jusqu'à la droite du bloc central, hors LR. Dans ce cas précis, un contrat de "non-censure" de LFI serait la caution de survie pour ce potentiel gouvernement, toujours sans majorité absolue à l'Assemblée nationale.
Ici, un Premier ministre plutôt consensuel pourrait aussi émerger, on pense notamment à l'ex-locataire de Matignon Bernard Cazeneuve. Une ossature autour de ce dernier pourrait parvenir jusqu'en 2027 - non sans mal - en évitant la censure avec une politique faite de compromis, de textes validés au cas par cas, toujours sous la pression des Insoumis qui seraient les garants d'un tel exécutif. Le président ira-t-il jusqu'à nommer un Premier ministre de gauche ? Difficile à dire pour le moment.
D'autant qu'Olivier Faure fait de plus en plus entendre son souhait de voir un gouvernement de gauche, "composé uniquement de ministres socialistes, écologistes ou de la société civile" comme le précise Politico, nommé. Un scénario dans lequel le camp présidentiel est limité au rôle de soutien qui s'engagerait dans un pacte de non-censure en échange de compromis texte par texte. Si le camp présidentiel et les socialistes s'accordent sur la nécessité d'une coalition ou a minima d'une alliance pour passer un budget, tous veulent aussi occuper la place du meneur...
Pas sûr sur qu'Emmanuel Macron et son camp laisse Matignon à la gauche. D'autant que François Bayrou a interrogé les velléités des socialistes et la faculté d'Olivier Faure à constituer un gouvernement viable le 3 septembre sur BFMTV : "La question, c'est avec quelle majorité", affirme-t-il. "Olivier Faure dit qu'il va constituer un gouvernement sans LFI, fort bien. Je pense en effet que l'alliance PS-LFI est un problème pour le pays et pour le PS", lâche le locataire de Matignon. "Je ne suis pas sûr que ça marche", concède-t-il.
"Ce sera sans nous", LR se met à l'écart
Quid des LR ? Toute la question est là. Bruno Retailleau s'oppose à une coalition avec le PS. "Ce sera sans nous", a-t-il assuré au sujet du gouvernement de coalition avec la gauche selon France Inter. En pour un exécutif allant du bloc central à la droite de la droite ? "Aujourd'hui, la seule chose qui marche, c'est Retailleau… avec le RN", estime à contrecœur un socialiste auprès de Politico qui juge toutefois que le chef de l'Etat ne serait pas prêt à de telles secousses. L'option Retailleau à Matignon - lequel est actuellement ministre de l'Intérieur - n'est "pas du tout la logique d'Emmanuel Macron", selon les soutiens su premier flic de France. Si tel était le cas, "on entrerait dans une cohabitation dure", analyse-t-on côté LR.
La droite, qui a accepté de rejoindre le gouvernement après la nomination de Michel Barnier, pourrait aussi être refroidie par l'expérience après l'année écoulée : le maintien à peine trois mois du gouvernement Barnier et un "en même temps" critiqué sous le gouvernement Bayrou. Et ce, malgré des victoires de la droite. "Pour le prochain gouvernement, il ne faut pas se faire avoir à nouveau. Il faut fixer nos conditions", glisse une élue locale LR chez France Info. "Notre sujet, ce n'est plus le vote de confiance. Bayrou va tomber. Le vrai sujet, c'est le 9 septembre. On n'entrera pas dans un gouvernement pour appliquer une politique de gauche", conclut la sénatrice LR de Paris, Agnès Evren.
Si le parti LR conditionne sa participation au gouvernement, Laurent Wauquiez précise que les députés de la droite ne feront pas obstruction un gouvernement par principe et ce quel que soit son orientation politique : LR ne censurera "ni un gouvernement socialiste, ni un gouvernement RN" a-t-il affirmé sur BFMTV se présentant comme un parti responsable différents de "ceux qui font tomber des gouvernements".
Rappelons que le vote de confiance auquel va se soumettre François Bayrou est crucial pour le prochain gouvernement, davantage que pour lui, et il concerne grandement la famille LR. "Selon les calculs les plus pessimistes réalisés par l'entourage du premier ministre, en effet, ce dernier pourrait n'obtenir que 185 voix, alors que la coalition totalise 210 députés", indique Le Monde. Dans tous les cas le plein de voix dans son camp ne suffirait pas à sauver François Bayrou. Toutefois, un nombre encore plus faible fragiliserait d'ores et déjà le socle commun et la future équipe gouvernementale. Si les LR votent contre ou s'abstiennent, l'option d'une grande coalition du PS à LR - qui est déjà difficilement imaginable - serait définitivement enterrée. Emmanuel Macron pourrait donc tenter de ratisser large et d'obtenir le vote de certains LR avec certaines mesures comme la réforme de l'AME.
Un timing très serré pour le budget
Pour rappel, si un nouveau Premier ministre venait à être nommé rapidement, il devrait passer à la vitesse supérieure pour déposer le projet de loi de finances. "Il y a une contrainte prévue par la Constitution et par les lois organiques de finances selon laquelle le Parlement doit disposer de 70 jours de débats, ce qui veut dire que nous avons jusqu'au 15 octobre pour avoir un budget", explique Pierre Moscovici, sur BFMTV.
Si la nomination du nouveau locataire de Matignon tardait, le gouvernement démissionnaire en charge des affaires courantes pourrait user d'un projet de loi spéciale avant le 19 décembre, pour reconduire le budget de l'année précédente. Toujours est-il qu'aucun budget ne serait voté. Le dernier cas de figure étant la dissolution, ici, avec un délai compris entre 20 et 40 jours pour organiser les élections législatives, le scrutin se déroulerait entre le 28 septembre et le 18 octobre et le dépôt du PLF avant le 7 octobre - comme souhaité par l'exécutif actuel - serait délicat.