Pourquoi l'appel de la France et de 14 pays à reconnaître la Palestine risque d'être un flop
Les chefs de la diplomatie de 15 pays ont lancé, mercredi 30 juillet, un appel commun aux autres pays du monde afin qu'ils fassent part de leur volonté de reconnaître l'État de Palestine. Cette déclaration a été signée à New York après une conférence ministérielle qui s'est tenue lundi et mardi, à l'initiative de la France et de l'Arabie saoudite. Les deux nations avaient pour but de promouvoir la solution à deux États. 14 pays, en plus de la France, ont été convaincus de signer : Andorre, l'Australie, le Canada, la Finlande, l'Islande, l'Irlande, le Luxembourg, Malte, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Portugal, Saint-Marin, la Slovénie et l'Espagne.
"Nous exprimons notre volonté de reconnaître l'État de Palestine et invitons ceux qui ne l'ont pas encore fait à nous rejoindre", écrivait, dans la matinée, Jean-Noël Barrot. Il est intéressant de souligner que 9 des 15 pays signataires n'ont pas encore reconnu l'État de Palestine, mais "expriment la volonté ou la considération positive de leur pays" à le faire. Il s'agit d'Andorre, de l'Australie, du Canada, de la Finlande, du Luxembourg, de Malte, de la Nouvelle-Zélande, du Portugal et de Saint-Marin. En plus de ces États, Keir Starmer, le Premier ministre britannique, a annoncé mardi 29 juillet la volonté du Royaume-Uni de reconnaître l'État de Palestine, mais uniquement si Israël ne prend pas certaines mesures "pour mettre fin à la situation épouvantable à Gaza".
A New York avec 14 autres pays, la France lance un appel collectif : nous exprimons notre volonté de reconnaître l'Etat de Palestine et invitons ceux qui ne lont pas encore fait à nous rejoindre. pic.twitter.com/faCYTYwmES
— Jean-Noël Barrot (@jnbarrot) July 30, 2025
147 pays reconnaissent la Palestine, mais seulement 15 signataires
Mais cela n'a rien d'une victoire écrasante pour les défenseurs de la solution à deux États. En effet, la France deviendra, comme l'a promis Emmanuel Macron, le 148e pays à reconnaître l'État de Palestine en septembre, lors de l'Assemblée générale des Nations unies : "J'ai décidé que la France reconnaîtra l'État de Palestine. J'en ferai l'annonce solennelle à l'Assemblée générale des Nations unies, au mois de septembre prochain. L'urgence est aujourd'hui que cesse la guerre à Gaza et que la population civile soit secourue."
Fidèle à son engagement historique pour une paix juste et durable au Proche-Orient, jai décidé que la France reconnaîtra lÉtat de Palestine.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 24, 2025
Jen ferai lannonce solennelle à lAssemblée générale des Nations unies, au mois de septembre prochain. pic.twitter.com/7yQLkqoFWC
Une annonce qui a fait du bruit, mais qui n'aura pas de réelles conséquences si la France n'est pas suivie. En effet, elle est le premier pays du G7 et membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU à annoncer vouloir reconnaître l'État de Palestine. Cela aura du sens uniquement si les autres États avec un poids similaire en font de même.
De plus, les 147 autres pays à reconnaître l'État de Palestine n'ont pas été emballés par la déclaration commune signée ce 30 juillet. 15 pays sont signataires, parmi eux, seulement 7 reconnaissent déjà la Palestine, ce qui fait que 140 pays dans la même position n'ont pas jugé bon de se joindre à la déclaration. Cela ne signifie pas qu'ils ne veulent finalement plus reconnaître la Palestine comme un État, mais qu'ils ne sont pas mobilisés derrière l'initiative française. Il faut dire que la reconnaissance d'un État de Palestine ne changerait pas grand-chose à la situation sur place.
En effet, en matière de droit international, la Palestine est déjà considérée comme un État. Comme le rappelait la docteure en droit international public, chercheuse associée du Centre Thucydide (université Paris-Panthéon-Assas) et à l'Institut français pour le Proche-Orient à Jérusalem, Insaf Rezagui, en 2024 sur France Culture, un État repose sur quatre critères précis : disposer d'un gouvernement, d'un territoire, d'une population et de la capacité à entrer en relation avec la société internationale, des États et des organisations internationales. Pour le dernier point, cela dépendra sûrement d'une reconnaissance comme État. En réalité, l'État de Palestine n'a pas besoin d'être reconnu par le monde entier pour exister. "La reconnaissance ou la non-reconnaissance d'un État est sans effet sur ses droits et ses obligations internationales". Mais, "en pratique, tant qu'un État n'est pas reconnu, il est peu probable que ses droits soient respectés", explique Romain Le Bœuf, professeur de droit international à l'Université d'Aix-Marseille, chez Télérama. Juridiquement, la Palestine est reconnue "comme un membre observateur de l'ONU et fait partie des organisations internationales", précise Frédérique Schillo, historienne, au micro de France Info. Elle est par exemple membre de la Cour pénale internationale depuis 2015.