François Hollande peut-il vraiment gracier Jacqueline Sauvage ?

La Rédaction

François Hollande peut-il vraiment gracier Jacqueline Sauvage ? François Hollande va-t-il gracier Jacqueline Sauvage, condamnée à dix ans de prison ferme pour le meurtre de son mari ? Violentée par son époux durant 47 ans, elle bénéficie du soutien de nombreuses personnalités.

[Mis à jour mardi 26 janvier à 22h58] François Hollande accordera-t-il la grâce présidentielle à Jacqueline Sauvage, condamnée à 10 ans de prison ferme pour le meurtre de son mari ? Plusieurs semaines après son procès en appel, la mobilisation ne faiblit pas autour du sort de la sexagénaire. À tel point que ce mardi, l'entourage du président réagissait sur le dossier. "Il y a une procédure, il faut suivre la procédure. Il faut des circonstances exceptionnelles", mais le chef de l'État "a bien entendu la mobilisation". 

VIDEO. Légitime défense : les filles de Jacqueline Sauvage demandent grâce à Hollande

"Légitime défense : les filles de Jacqueline Sauvage demandent grâce à Hollande"

C'est au mois de décembre que ses trois filles, Sylvie, Carole et Fabienne ont demandé la grâce présidentielle, possible dans le cadre de l'article 17 de la constitution. Si elle n'a jamais porté plainte en 47 ans de vie commune, tout le monde savait que Jacqueline Sauvage vivait sous les coups de cet homme violent, affirment ses filles. Deux d'entre elles ont également été victimes de violences sexuelles à la puberté. En 2012, après avoir été de nouveau frappée par son mari et au lendemain du suicide de son fils, Jacqueline Sauvage s'empare d'un fusil et abat son mari. "Monsieur le Président, notre mère a souffert tout au long de sa vie de couple, victime de l'emprise de notre père, homme violent, tyrannique, pervers et incestueux", avaient écrit les trois filles dans leur lettre adressée au président de la République. 

Condamnée par la cour d'assises du Loir-et-Cher le 3 décembre 2015, la mobilisation grandit autour de cette femme. Une pétition a été mise en ligne sur le site Change.org, baptisée "François Hollande, accordez la grâce présidentielle à Jacqueline Sauvage". Elle a déjà récolté plus de 350 000 signatures. Lundi 25 janvier, un comité de soutien a vu le jour, composé notamment de la maire de Paris Anne Hidalgo, de l'écologiste Daniel Cohn-Bendit et de Jean-Luc Mélenchon. D'autres personnalités politiques soutiennent la demande en grâce du comité de soutien. Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France ou encore le chef de l'UDI Jean-Christophe Lagarde ont affiché publiquement leur soutien à Jacqueline Sauvage.

C'est la légitime défense que plaident les défenseurs de Jacqueline Sauvage. "Ce jugement ne prend aucunement en compte la souffrance et le calvaire endurés par cette femme et ses enfants. Il ne prend pas en compte que la société dans son ensemble est responsable et complice de ce drame, complice du silence et de l'omerta qui a régné autour de cette violence pendant 47 longues années", lit-on dans le texte qui accompagne cette pétition. "C'est le silence et l'immobilisme de toutes les instances qui composent notre société qui sont coupables de non-assistance à personnes en danger, qui n'a pu qu'aboutir à cette fin". 

Les associations féministes sont également montées au créneau. Au lendemain de la condamnation de Jacqueline Sauvage "Osez le féminisme" avait dénoncé un "déni de justice", appelant "à l'élargissement de la présomption de légitime défense aux femmes victimes de violences". La légitime défense ne peut être prise en considération dans le cas de Jacqueline Sauvage puisque quelques minutes se sont écoulées entre son agression et le moment où elle se munit du fusil pour abattre son mari. Nathalie Tomasini, avocate de Jacqueline Sauvage, interrogée par Libération, et la députée LR Valérie Boyer, veulent faire inscrire dans la loi la notion de "légitime défense différée" pour faire reconnaître "le danger de mort permanent" auxquels sont exposées les femmes battues. "Les critères de concomitance seraient écartés", explique au quotidien Nathalie Tomasini, qui souhaite "une appréciation large des délais entre l'agression et la riposte".