Ehpad Orpea : des témoignages durs, le PDG viré... avant d'autres sanctions ?

Ehpad Orpea : des témoignages durs, le PDG viré... avant d'autres sanctions ? ORPEA. Le livre-enquête "Les Fossoyeurs", de Victor Castanet, qui dénonce les pratiques d'Orpea, n°1 de l'Ehpad, continue de faire parler de lui : alors que le patron du groupe doit être auditionné par l'exécutif ce mardi 1er février, le leader de l'Ehpad a limogé, ce dimanche 30 janvier, son directeur général Yves Le Masne.

Ce dimanche 30 janvier, le groupe Orpea a annoncé avoir démis de ses fonctions Yves Le Masne, directeur général du puissant groupe d'Ehpad. Un limogeage qui intervient dans un contexte de tourmente pour le poids lourd des maisons de retraite spécialisées, depuis la publication, la semaine dernière, du livre enquête du journaliste indépendant Victor Castanet, Les Fossoyeurs. C'est Philippe Carrier, président non exécutif du conseil d'administration du groupe depuis mars 2017, qui devient "président directeur-général de la société avec effet immédiat", a annoncé Orpéa ce dimanche. Sa mission ? Garantir, "sous le contrôle du Conseil, que les meilleures pratiques sont appliquées dans toute l'entreprise et faire toute la lumière sur les allégations avancées, en s'appuyant en particulier sur les missions d'évaluation confiées par le conseil d'administration à deux cabinets indépendants en cours de désignation", précise encore le n°1 des Ehpad.

Ce brusque changement suffira-t-il à convaincre de la bonne foi d'Orpea, alors que la menace d'une action de groupe menée par plusieurs familles pèse sur le leader de l'Ehpad ? Rien n'est moins sur. Maitre Sarah Saldmann, avocate spécialisée en droit pénal et en droit de la famille, compte effectivement déposer une action de groupe auprès du procureur de la République de Paris d'ici mars prochain. "En France, les plaintes sont éparpillées ce qui donne un sentiment de toute-puissance à Orpea. Plusieurs victimes se sont tournées vers moi afin d'entreprendre une action collective conjointe contre ce groupe pour violence par négligence, mise en danger de la vie d'autrui et homicide involontaire", détaille l'avocate auprès du Parisien. Outre cette plainte groupée, les réactions à l'investigation menée par Victor Castanet, fruit de plusieurs centaines de témoignages rapportés dans Les Fossoyeurs, ne cessent de pleuvoir. Ainsi, depuis ce 27 janvier, soit depuis le lendemain de la publication de l'ouvrage incriminant Orpea, l'Ehpad Les Bords de Seine (Neuilly-sur-Seine, Hauts-de-Seine) est visé par une enquête lancée par l'Agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France.

Une onde de choc à quelques semaines de la présidentielle

Par ailleurs, dénonçant des rationnements des protections et des repas, une négligence dans les soins, une hygiène déplorable ou encore des suspicions de conditions de mort douteuses, Les Fossoyeurs, dont Le Monde a publié les bonnes feuilles, a déclenché une onde de choc dans les sphères politiques. Ces révélations ont poussé l'exécutif a exiger une audition du directeur général du groupe, Jean-Christophe Romersi. Elle doit se tenir ce mardi 1er février. De son côté, l'ARS d'Île-de-France a lancé une enquête dans l'un des Ehpad particulièrement pointé du doigt par l'ouvrage. L'une des salariées de la maison spécialisée Les Bords de Seine s'est confiée à nos confrères de Franceinfo : "Ils [les inspecteurs] sont montés dans les étages pour chercher des documents. Ils ont même interrogé tout le monde. Ah ! là ! là ! l'ambiance aujourd'hui... A la direction, ils se sont faits tous petits", a-t-elle assuré. Une aide-soignante affirme également au micro de la chaîne d'information en continu que, si le personnel fait défaut une partie de la semaine, "il peut arriver des week-ends où ils [les équipes de direction] font en sorte qu'il y ait toujours des personnes supplémentaires pour plaire aux familles".  Si Orpea confirme l'inspection, le groupe a assuré que "les équipes collaborent pleinement" avec les enquêteurs, la "priorité" étant "de prendre soin et d'accompagner les résidents et leurs proches en préservant une atmosphère sereine au sein de l'établissement."

Des témoignages alarmants

Pour rappel, dans Les Fossoyeurs, ce sont quelque 250 témoignages qui détaillent et dénoncent des pratiques glaçantes, impulsées par la volonté du "système Orpéa" (comme le nomme l'auteur) de privilégier la rentabilité sur le bien-être - et parfois sur la survie - des résidents. Les 338 pages qui composent l'ouvrage réouvrent le débat sur ce sujet de société qu'est la fin de vie des plus âgés dans les établissement spécialisés, engageant la responsabilité non pas des auxiliaires de vie, infirmiers et autres employés des maisons de retraites médicalisées, mais bien des dirigeants de certains groupes et dénonçant une connivence avec d'anciens membres de l'exécutif.

"Une entreprise à but lucratif"

Parmi les témoignages alarmants rapportés par Victor Castanet dans son ouvrage, celui de Saïda Boulahyane, auxiliaire de vie attachée à travailler dans les très difficiles unités dites "protégées", où sont notamment regroupées les personnes âgées "déambulantes", est particulièrement représentatif. Elle raconte au journaliste : "Dès que je suis arrivée dans cette unité, dès que l'ascenseur s'est ouvert, j'ai compris que quelque chose n'allait pas. Déjà, il y avait cette odeur de pisse terrible, dès l'entrée. Et je savais que c'est parce que [les résidents] n'étaient pas changés assez régulièrement". Une intuition qui a été rapidement confirmée, relaie Le Monde : "Ça s'est révélé être le cas. Je suis restée près d'un an là-bas, et je ne vous dis pas à quel point il fallait se battre pour obtenir des protections pour nos résidents. Nous étions rationnés : c'était trois couches par jour maximum. Et pas une de plus. Peu importe que le résident soit malade, qu'il ait une gastro, qu'il y ait une épidémie." Conséquence : outre les trois toilettes quotidiennes, le patient, s'il faisait sur lui, restait dans ses excréments plusieurs heures. Quid de sa santé ? "Personne ne voulait rien savoir", déplore Saïda Boulahyane.

Thomas Mitsinkidès, l'un des petits-fils de la romancière à succès Françoise Dorin, avait quant à lui, en avril 2018, publié un avis Google sur la fin de vie de sa grand-mère aux Bords de Seine : "Si vous voulez vous débarrasser des gens que vous aimez, à moindres frais, il y a une place de libre désormais au 2e étage, à gauche, en sortant de l'ascenseur… Madame Françoise Dorin, écrivain de renom, est rentrée dans cet établissement il y a moins de trois mois. C'est le temps qu'il leur a fallu pour lui faire perdre 20 kilos, et l'usage de la parole. C'est le temps qu'il leur a fallu pour laisser une escarre dégénérer et finir par faire la taille de mon poing. C'est le temps qu'il a fallu pour la mener à un état irréversible. Ho oui ! C'est joli ! C'est cosy même. On vous vantera volontiers la balnéo et le confort des chambres. On vous fera des courbettes et des grands sourires. On vous fera croire que tout est sous contrôle… La vérité c'est que cet établissement à plus de 7 000 euros le mois n'est pas un organisme de santé, mais une entreprise à but lucratif [...]", fustigeait-il dans cet avis. L'auteur des Fossoyeurs rapporte que la fille de Françoise Dorin lui avait confié avoir pensé un temps à médiatiser l'affaire, avant de se raviser : "Orpéa est un groupe international. Ils ont une armada d'avocats, des méthodes que je devine très agressives. Je ne faisais pas le poids face à eux".

Françoise Dorin, après avoir intégré l'établissement le 24 octobre 2017, décède brutalement des suites d'un choc sceptique causé par la dégénérescence d'une escarre, le 12 janvier 2018. Un épisode qui pourrait apparaître révélateur des manquements et négligences d'Orpéa : la romancière, ayant déjà souffert d'une légère escarre à la malléole, avait besoin d'un matelas spécifique, dit "anti-escarre" pour soulages la pression sur sa peau - matelas qui n'avait pas été installé à son arrivée. Il faudra attendre un mois pour qu'une aide-soignante repère des rougeurs sur la peau de la résidente et qu'un tel matelas soit commandé. Une nuit après l'installation de l'objet, l'équipe soignante des Bords de Seine réalise qu'il est défectueux et que Françoise Dorin a passé la nuit "sur de la ferraille". Selon le récit qui est fait dans l'ouvrage, cette négligence sera suivie d'une autre, plus grave encore : la plaie de l'escarre de Mme Dorin se détériore, mais la patiente et sa famille ne seront avertis que plusieurs semaines plus tard de l'état de l'escarre. L'ouvrage ajoute, dans la version des faits exposée par la famille, qu'au cours d'une réunion d'information, la cadre infirmier minimise le danger qu'encourt Françoise Dorin. Et ni le médecin coordinateur de l'établissement, ni le médecin traitant de la famille, ne sont mis au courant : le personnel soignant continue donc certes les soins, mais sans la supervision d'un médecin. En décembre, la patiente est transférée à l'hôpital Beaujon (Clichy, Hauts-de-Seine), où un pansement VAC, qui a pour vocation d'aspirer les impuretés d'une plaie, doit lui être posée. Sa fille, assistant au rendez-vous, découvrira avec effroi "un trou béant, au niveau du sacrum [là où était située son escarre], plus gros que [son] poing" : elle contacte le médecin coordinateur, qui s'excuse et assure n'avoir été contacté qu'un mois après l'apparition de l'escarre. Françoise Dorin décède deux semaines plus tard. La fille de la romancière n'hésite pas, dans Les Fossoyeurs, à employer le terme de "dissimulation".

D'autres témoignages s'accumulent dans l'ouvrage : repas rationnés, personnel stressé, vêtements et objets perdus jamais retrouvés ni remboursés, absence d'infirmière de nuit dans la résidence Les Bords de Seine (Neuilly, Hauts-de-Seine) du groupe, soins d'hygiène déplorables, difficultés dans l'administration des médicaments et dans la gestion du linge, qualité des repas questionnable... Ainsi, Nora Sahara, ancienne infirmière également citée dans Les Fossoyeurs, rapporte une logique de "dépenser moins et gagner plus" dans tous les Ehpad dans lesquels elle a travaillé au cours de sa carrière : "On a des patients qui restent alités toute la journée parce qu'on a pas assez de personnel pour les descendre en salle à manger. Il y a des patients qui ne déjeunent pas, faute de personnel pour leur monter le déjeuner. On a des patients qu'on n'hydrate pas et à qui on donne des gelées parce qu'on n'a pas de poche d'hydratation. Il y a aussi des pansements qu'on ne fait pas dans les protocoles parce qu'on n'a". Autre maltraitance supposée et décrite dans l'ouvrage, qui fait écho à celle subie par Françoise Dorin : la prise en charge défaillante se fait, évidemment, sans que les familles soient au courant : "Vous ne verrez aucune soignante dire à une famille: 'Votre mère est tombée parce qu'on n'avait pas assez de soignants'. Jamais on n'aura ça mais c'est la réalité", rapporte l'ancienne infirmière devenue journaliste enquêtant sur les défaillances du système de soins français, qui assure qu'elle ne mettra "jamais un de (s)es parents en maison de retraite".

Une proximité avec Xavier Bertrand ?

Un témoignage, rapporté dans le quotidien Le Monde, éclaire peut-être pour partie le fait que de tels comportements soient tolérés, celui de Patrick Métais, ex-directeur médical de Clinéa, la branche "cliniques" du groupe Orpéa. Contacté par Victor Castanet, il indiquera "on avait le ministre de la Santé de l'époque dans notre poche", se référant à Xavier Bertrand, ministre de la Santé à deux reprises (en 2005‑2007, puis en 2010‑2012). Pour rappel, entre 2002 et 2010 que le marché des autorisations d'Ehpad et de cliniques a "littéralement explosé", relève l'auteur. Selon M. Métais, "quand il n'y avait vraiment plus d'autres solutions, alors [Jean-Claude] Marian faisait appel à Bertrand", qui, toujours d'après lui, finançait Orpéa et donnait des autorisations de créations d'Ehpad au groupe - à l'époque, ces autorisations ne nécessitaient pas les financements de l'Assurance maladie. Un discours que rejette en bloc Xavier Bertrand, ex-candidat à l'investiture Les Républicains à la présidentielle et président du Conseil régional des Hauts-de-France : il n'a pas, pour lui, été "question d'aider qui que ce soit, mais de faire en sorte que les projets présentés aboutissent dans le strict respect des procédures et en lien étroit avec les élus et les collectivités territoriales, notamment départementales pour la question du financement". Pourtant, Vincent Castanet rapporte encore, dans Les Fossoyeurs, que l'apporteur d'affaires d'Orpéa dans le nord de l'Hexagone, Jean-François Rémy, lui aurait confié : "Je savais qu'ils étaient très très bien avec Xavier Bertrand, certifie-t-il. Quand vous reprenez le nombre d'Ehpad et de cliniques qu'ils ont obtenus dans le département de l'Aisne, dans le 02 [le groupe avait obtenu, au début des années 1990, sept Ehpad sur place, alors qu'il ne possédait alors qu'une dizaine d'établissement dans toute la France], où Bertrand a fait sa carrière politique… Tout le monde le savait et tout le monde le disait."

Xavier Bertrand a commenté, lors de la séance pleinière du conseil régional du 27 janvier, ce qui lui était reproché. D'après l'ancien ministre de la Santé, les autorisations accordées dans le courant des années 2000 à Orpea sont à imputer au fait, qu'à l'époque, "nous savions pertinemment à l'époque que nous allions passer de 2005 à 2015 de 1,1 million à 1,9 millions de personnes de plus de 85 ans et qu'il fallait beaucoup de structures d'accueil", expliquant qu'il a fallu doubler le nombre de places en Ehpad - pour passer de 300 000 à 600 000. "Donc oui j'ai eu à faire attribuer un nombre important de place au titre de la réserve nationale. Il y avait une part qui relevait du niveau local et une part du national : 10% pas plus", s'est-il justifié. Et de conclure : "C'était clairement mon rôle. Pendant trois ans et demi j'ai eu à le faire, dans le respect des règlements, ça ne s'est jamais fait n'importe comment. Si c'était à refaire, je le referais, parce que c'était ma mission".

De vives réactions parmi la classe politique

Le directeur d'Orpéa convoqué par l'exécutif

En pleine course à l'élection présidentielle, les réactions des différentes familles politiques ne se sont pas faites attendre. A commencer par celle de l'actuel gouvernement : dès le 25 janvier, date de la publication des bonnes feuilles de l'ouvrage par Le Monde, le ministre de la Santé et des Solidarités Olivier Véran s'est montré ferme.  Déclarant que "les pouvoirs publics doivent la vérité aux familles, aux soignants et aux résidents", il a indiqué au micro de LCI que, si des "éléments factuels" nécessitaient l'ouverture d'une enquête, il "l'ouvrir[a]" : "Je ne tremblerai pas", a-t-il assuré, affirmant prendre "très au sérieux" l'ouvrage de Victor Castanet. Dans le détail, le ministre entend par "éléments factuels" des preuves "venant d'autorités d'évaluation et de contrôles indépendantes". Outre ces éléments, il attend "ce que le groupe en question va nous répondre".

Des réponses qui pourraient tomber plus tôt que prévu. Après avoir annoncé sur RMC ce 26 janvier le lancement d'une enquête "flash", la ministre déléguée en charge de l'Autonomie Brigitte Bourguignon a convoqué le directeur général d'Orpéa, Jean-Christophe Romersi, nous a appris un communiqué du ministère de la Santé paru jeudi 27 janvier. L'audition se tiendra mardi 1er février à 9h15. Elle sera "l'occasion d'entendre les explications du groupe Orpéa sur plusieurs points qui feront l'objet d'enquêtes approfondies par les services de l'Etat", précise Brigitte Bourguignon dans un courrier à l'intention du susmentionné directeur général, la ministre souhaitant notamment obtenir des précisions sur "l'attribution aux établissements de consommables tels que les protections hygiéniques ou sur les enjeux liés à la nutrition des résidents", "les pratiques managériales du groupe concernant les personnels, le taux d'encadrement", "les modalités de signalement et le suivi des faits de maltraitance signalés par les proches des résidents" ainsi que "les pratiques financières du groupe". Dans cette lettre, Mme Bourguignon indique se réserver la possibilité de diligenter une enquête de l'Inspection générale des Affaires sociales (Igas), "sur tout ou partie des établissements", du groupe Orpéa.

La gestion des Ehpad au cœur de la course à l'élection présidentielle

Les différents candidats à l'élection présidentielle se sont empressés de dénoncer les supposées pratiques du leader mondial de l'Ehpad, alors que l'enjeu que constitue la fin de vie de nos aînés ne va cesser de croitre - en 2030, l'Hexagone devrait 21 millions de 60 ans et plus, dont 3 millions en perte d'autonomie, projettent la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques et l'Institut national de la statistique et des études économiques. Sur Franceinfo le 26 janvier, Fabien Roussel, candidat communiste, a estimé que "le problème, c'est qu'on a laissé au marché le soin de s'occuper du grand âge. Certains font le choix de se faire du pognon sur le dos de nos aînés", se déclarant favorable à "un grand service public du grand âge". En outre, il a proposé d'exclure toute gestion à but lucratif, avec expropriation et placement des établissements sous tutelle en cas de "maltraitances avérées" et de créer, en trois ans, 300 000 emplois en Ehpad et 100 000 aides à domicile, avec un ratio d'un soignant par résident. Le candidat La France insoumise (LFI) Jean-Luc Mélenchon, retweetant la députée LFI pour la 6ème circonscription de Meurthe-et-Moselle Caroline Fiat ("Stop l'or gris des EHPAD lucratifs ! 'Il faut que ça crache' dit-on à Orpéa en parlant des résidents et de leurs familles pour accumuler les dividendes. Vivement que l'on puisse, à notre tour, faire cracher ces grands groupes et reconstruire le secteur public !"), a ainsi marqué sa position sur le sujet. En outre, son porte-parole, Alexis Corbière, a dénoncé "bien souvent un manque de personnel", fustigeant "des groupes qui font des profits sur le dos de nos plus anciens".

L'écologiste Yannick Jadot s'est, lui aussi, indigné après la parution des Fossoyeurs : "Il faut prendre soin des plus fragiles. Qu'elles soient à domicile, dans des Ehpad privés ou dans des Ehpad publics, nous garantirons un accompagnement bienveillant et humain aux personnes en perte d'autonomie. Nous leur devons !", a-t-il appelé sur Twitter. Outre cette réaction, le candidat d'Europe Ecologie - Les Verts propose, dans son programme, un ratio de 0,8 équivalent temps plein par résident (mais incluant les personnels administratifs), l'arrêt de toute création de places en Ehpad privés, le contrôle renforcé de ces établissements et la revalorisation des carrières et métiers. Quant aux socialistes, ils ont demandé, dès le 26 janvier, l'audition des responsables du groupe Orpéa par la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, dont ils veulent qu'elle s'attribue "les moyens d'une Commission d'enquête", indiquait le député de la 3e circonscription des Landes Boris Vallaud sur Twitter. Le groupe PS doit en outre déposer, dans les jours à venir, une proposition de loi pour permettre aux parlementaires de visiter à l'improviste les Ehpad.

Une proposition soutenue par la candidate du Rassemblement national Marine Le Pen, qui demande sur Twitter "la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la gestion des EHPAD par des groupes privés". La candidate nationaliste propose, en outre "un minimum" d'un médecin coordonnateur et d'une infirmière "vingt-quatre heures sur vingt-quatre" dans chaque Ehpad. Elle souhaite également porter la durée du congé des proches aidants à douze mois sur une carrière, avec indemnisation indexée sur le revenu, jusqu'à 100 % au niveau du Smic. Valérie Pécresse, quant à elle, assure, à la suite de la polémique, vouloir "tirer les leçons de ce naufrage", et propose de changer "radicalement" le "modèle des Ehpad" : elle promet notamment le renforcement de la transparence sur la qualité des Ehpad, publics ou privés, à l'aide d'un "référentiel obligatoire" publié, détaillant les conditions de vie (qualité des repas, taille des chambres, activités de vie sociale, temps consacré à chaque résident…) et la qualité des soins. Et souhaite donner "la priorité au maintien à domicile".

Orpéa dément les allégations formulées

Dans un communiqué publié cette semaine, le groupe Orpéa a démenti coûte que coûte les éléments mis en avant par Victor Castanet. Déplorant des attaques "malheureusement pas nouvelles" mais "extrêmement violentes dans un contexte où nos équipes sont encore plus mobilisées depuis deux ans par la crise sanitaire", le groupe déclare ne pas pouvoir "laisser de telles dérives sensationnalistes et mensongères ternir l'image d'Orpéa et du secteur". Et d'affirmer : "Orpéa, ses dirigeants et ses collaborateurs ont toujours placé, depuis trente ans, le bien-être des résidents, l'accompagnement des équipes et l'éthique professionnelle au cœur des critères de leur action et du développement de l'entreprise. Le Groupe procède chaque année à une enquête de satisfaction auprès de ses résidents et familles, réalisée par un organisme externe indépendant, dont les derniers résultats montrent un taux de recommandation moyen de 95%. Par ailleurs, Orpéa exerce son activité dans un secteur qui fait l'objet de règlementations strictes et de contrôles réguliers par les autorités publiques."

Et de marteler : "Il n'aurait évidemment pas été en mesure d'assurer son développement en France et à l'international s'il ne respectait pas scrupuleusement les obligations qui sont les siennes". Le groupe conclut en annonçant avoir "d'ores et déjà saisi ses avocats pour y donner toutes les suites, y compris sur le plan judiciaire, afin de rétablir la vérité des faits et défendre son honneur ainsi que celui de ses collaborateurs". Le groupe a en outre annoncé, le jour de la publication du livre-enquête, la création d'une mission d'évaluation indépendant.

Qu'est-ce qu'Orpéa ?

Orpéa est un groupe fondé en 1989 par Jean-Claude Mariam gérant une chaîne de maisons de retraite et de cliniques de soins. C'est un poids lourd dans le milieu, possédant 65 000 collaborateurs dans 1 100 établissements à travers la planète. 220 Ehpad Orpéa sont décomptés rien qu'en France. Dans la résidence du groupe "Les Bords de Seine", longuement investiguée dans Les Fossoyeurs, il faut, à titre d'exemple, compter 6 500 euros par mois pour une chambre entrée de gamme.