Akito Aihara (New Normal) : "un lecteur de manga doit savoir en un clin d'œil ce qu'il se passe"

Akito Aihara (New Normal) : "un lecteur de manga doit savoir en un clin d'œil ce qu'il se passe" Le proverbe "à quelque chose malheur est bon" semble avoir été inventé pour le mangaka Akito Aihara, tant il a su surmonter la pandémie et en tirer une œuvre riche d'une incroyable profondeur. C'est à Tokyo que nous l'avons rencontré; Il a partagé avec nous sa vision de son œuvre mais aussi du médium.

Akito Aihara, a choisi de s'inspirer de la crise du Covid 19 pour poser les bases d'un roman d'anticipation qui, très vite tourne à la pure SF. Un soupçon de romance permet de savamment pousser les lectrices et les lecteurs à développer une forte empathie pour les protagonistes et se poser la question "comment réagirais-je dans une telle situation"? Dès lors, le pari du mangaka à la magnifique plume est réussi: impossible de lâcher son tome si ce n'est pour dévorer le suivant.

Le pitch est d'une simplicité trompeuse : dans un avenir proche, l'humanité a été décimée par une pandémie aéroportée. Les masques sont non seulement obligatoires mais ils sont devenus le quotidien de la population, à tel point que la bouche est devenue un tabou, voire un fantasme. " Voir sous les jupes des filles" chantait Souchon, dans cette réalité il aurait chanté " Voir sous le masque des filles". C'est dans ce contexte que Hata, un jeune lycéen, va voir le bouche de sa camarade Natsuki, c'est le début d'une quête qui va les pousser bien au-delà de la découverte des lèvres et des promesses qu'elles peuvent porter…

Linternaute.com : Quelle a été l'étincelle à l'origine de votre vocation de mangaka ?

Akito Aihara : J'ai la chance de venir d'une famille qui apprécie à la fois les mangas et les anime, j'ai baigné dans cet univers depuis tout petit. De plus, mon grand-frère, qui a 5 ans de plus que moi, dessinait des mangas et je me suis mis à le copier.

Vous souvenez-vous de ce que vous dessiniez à l'époque ?

J'ai commencé en copiant les personnages originaux qu'avait créés mon frère, puis je me suis mis à élaborer mes propres personnages. Je les dessinais dans mes cahiers de cours et je les montrais à mes camarades.

© NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Vous avez remporté un prix d'encouragement au New Face Award de Kodansha. Était-ce le premier projet que vous soumettiez ?

Quand j'avais entre 10 et 20 ans, j'ai postulé deux ou trois fois, au concours des jeunes débutants du Weekly Shonen Jump. Ensuite, je n'ai rien fait pendant cinq, six ans et j'ai rencontré un éditeur qui m'a proposé de me présenter au concours du Morning magazine de Kodansha.

De quoi parlait ce manga ?

C'est l'histoire d'une jeune fille qui a un pouvoir spécial. Elle peut rentrer dans le rêve des autres. Elle décide de rentrer dans le rêve d'un de ses amis qui est traumatisé par des cauchemars. Elle va chercher la cause des ces cauchemars pour les résoudre. C'est un démon.

D'où est venue cette idée, est-ce une expérience personnelle ?

J'aime beaucoup rêver et je n'ai jamais fait de cauchemar. J'aime ça parce qu'il y a toujours plein de choses qui se passent dans les rêves, des choses intéressantes et sans limite. J'aime aussi beaucoup la série des jeux vidéo de la série Silent Hill parce qu'on a l'impression de rentrer dans un cauchemar et de subir les colères de notre passé.

Je pense que l'inspiration vient un peu de ce mélange induit.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Justement, d'une manière générale, où trouvez-vous votre inspiration ?

Principalement par rapport à mes expériences.

Mais quand je veux dessiner quelque chose dans le genre de la fantasy ou du fantastique, forcément je ne peux pas me baser sur mon vécu, alors je m'inspire des jeux vidéo, des films, de mon environnement global et de mon expérience pour construire un monde comme je le conçoit.

C'est la base de ma philosophie d'auteur : mettre une part de moi dans mes univers et construire un ensemble, qui, à mes yeux est cohérent.

C'est à partir de là que je vais construire mon manga. C'est comme ça que j'ai créé Bimajo no Ayano-san.

Avant de percer avec ce concours, vous avez travaillé dans le monde du manga adulte. Comment cela s'est passé ?

Lorsque j'avais tout juste la vingtaine, je n'avais pas beaucoup d'argent, même si je faisais de petits boulots. Je souhaitais devenir mangaka et je me suis dit pourquoi ne pas essayer. J'ai commencé par dessiner des dojins (Ndlr : des fanzines) pour adultes. J'ai été repéré par un éditeur qui m'a proposé de participer à un magazine. C'étaient des créations à 100% originales.

Quel est le titre qui vous a fait repéré ?

C'est un titre qui s'appelle " la demoiselle homme", l'histoire d'un homme avec une âme de femme. C'est autant un manga de comédie que de romance érotique. Comment notre protagoniste va réussir avec son corps d'hommes à charmer d'autre hommes et à avoir une relation sexuelle avec eux. C'est un titre qui a très bien marché.

Comment arrivez-vous à avoir un trait et une mise en scène aussi maîtrisés sans être passé par la case assistant ?

J'ai étudié tout seul. Je me suis beaucoup inspiré de mangas que j'aimais, aussi bien au niveau du trait que du découpage. J'ai fini par trouver ma philosophie d'auteur : pour toucher le lecteur il faut être capable de transmettre des émotions. Dans mon cas, le vecteur principal est l'ambiance qui est portée par la mise en scène.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Sur les couvertures de New Normal, les personnages sont de plus en plus visibles. Est-ce volontaire ?

Il y a une volonté mais ça n'est pas celle du rapprochement. Si vous prenez les couvertures, la cible du personnage est toujours le lecteur. Ça me permet de l'interpeller et de l'accrocher. Dessiner un seul personnage est aussi une manière d'éviter de donner à mon manga une image de comédie romantique, ce que n'est pas le titre.

Dès le 4e tome je renforce cette distinction avec une couverture qui donne un ton complètement différent. Pour bien montrer qu'il faut s'attendre à autre chose en ouvrant le livre .

Il y a une symétrie axiale entre la bouche cachée et ce qui se passe sous la jupe. Comme pour renforcer le parallèle entre l'éro-génisation de la bouche dans votre manga ?

Pour que tout puisse rentrer sur la couverture, la seule possibilité c'était de la mettre recroquevillée et assise. C'est pour ça que j'ai choisi cette position, pour pouvoir montrer le personnage dans son intégralité. Après discussion avec l'éditeur nous avions décidé que si nous mettions le masque cela cacherait trop le personnage et donc c'était mieux de juste lui cacher la bouche.

J'ai fait en sorte que le dessin soit équilibré, mais ce parallèle entre la bouche nouveau vecteur d'excitation et les parties intimes sous la jupe " ancien" vecteur d'excitation est une conséquence et non pas une volonté artistique.

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Est-ce que votre expérience de mangaka pour adulte vous a appris justement à provoquer le désir ?

Ce que j'ai appris c'est à beaucoup regarder les photos, que ce soit pour adulte ou pas. Noter une pose, une tenue. Je regarde aussi les œuvres d'autres auteurs. Un peu à l'instar de mon grand frère.

Votre frère continue-t-il de faire des mangas ?

En effet, il est mangaka spécialisé dans les mangas pour adultes.

Comment vos parents réagissent à ce type d'ouvrage ?

Dans ma famille, les cousins et les cousines, tout le monde sait ce que mon grand frère dessine. Ma mère est très fière de ses enfants.

Mais pour mon père, lui qui lisait des mangas érotiques de temps en temps, c'est devenu difficile de trouver excitant un manga que son fils a réalisé (rires). Alors lui, il est peut-être un peu moins fier de ce choix.

D'ailleurs, il m'arrive encore d'en dessiner de temps en temps sous un pseudonyme.

Vous travaillez exclusivement en numérique ?

Je travaille en effet en numérique, sur une base en 600 dpi pour avoir une sortie en B4.

Comment choisissez vous quelle trame utiliser ?

Je joue avant tout avec la différenciation de ton, comme beaucoup d'artistes numériques je pense. Celà me permet de jouer sur la lisibilité, les effets de lumière.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.


Racontez-nous votre approche pour la mise en page.

Je travaille toujours le zoning page par page. Pour moi celà fait partie intégrante de la grammaire du manga. Un lecteur ouvre une page et il doit savoir en un clin d'œil ce qu'il se passe. C'est pourquoi je conçois mon découpage dès le storyboard sous le forme de page complète.

Vous jouez énormément avec les angles de caméra…

Je pense que si l'on raconte une histoire - en dehors de gag - sous un seul angle, on prend le risque de tomber dans une répétition qui entraînerait une sorte de lassitude. D'ailleurs c'est valable aussi bien pour le lecteur que pour l'auteur. Je varie la mise en page pour que ni le lecteur ni moi ne nous ennuyions.

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D'où vient votre inspiration ?

Il y a énormément de séries télévisées qui ont une incroyable réalisation. C'est d'ailleurs via les séries télé que j'ai compris l'importance du changement de caméra. Par exemple, accompagner un changement d'image, de scène, voire tout simplement de tonalité.

De manière plus ou moins consciente, je me suis inspiré de la manière de concevoir non seulement le cadrage mais aussi la gestion du changement de cadrage, les deux sont un tout qui doit être mis au service de la lecture et de l'histoire.

Faites-vous appel à des assistants ?

À une époque, j'ai travaillé avec des assistants, mais maintenant je fais tout tout seul. Le numérique permet de gagner énormément en efficacité.

Comment faites-vous pour tenir le rythme ?

Au début, je passais plus de temps sur le scénario, réussir à avoir un script qui tient la route, résumer les grandes lignes et ensuite assurer un dessin de qualité. C'était très éprouvant.

Je viens de changer de rythme de publication, alors je vais en profiter pour me lâcher encore plus sur les dessins.

Le scénario est la partie que vous trouvez la plus difficile ?

Oui, c'est clairement la tâche la plus exigeante pour moi.

Le dessin aussi bien dans sa réalisation que dans la conceptualisation de la mise en page sont très instinctifs et parfois même reposants.

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Est-ce que vous faites beaucoup d'allers-retours sur le storyboard avec votre éditeur ?

En général, nous faisons en général un échange par chapitre. L'éditeur reçoit le matériel, m'appelle pour me faire des remarques.

Il arrive parfois qu'on discute avec véhémence au téléphone. Pas dans le sens où nous nous disputons, mais dans le sens où nos visions sont diamétralement opposées.

Je me souviens par exemple que dans le tome 4, la scène où la pandémie éclate. Cette scène je souhaitais la mettre au milieu du tome, mais mon éditeur préférait la mettre à la fin. Nous avons échangé très longuement sur ce point, au final c'est l'éditeur qui a eu le dernier mot.

Dans le tome 2, c'est moi qui ait eu le dessus (rires). À un moment, Hata est en train de pleurer, à cause de l'annonce de Nami. Et je souhaitais qu'à ce moment elle le prenne dans ses bras, autant pour le consoler que pour renforcer le côté tragique de cette disparition annoncée.  Et après avoir longuement discuté sur ce point, j'ai pu dessiner cette page telle que je l'avais imaginée.

Vous aviez prévu dès l'introduction de Nami cette tragédie ?

Oui, j'avais décidé de cet événement dès le début.

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Est-ce qu'on s'implique différemment dans la création d'un personnage quand on sait qu'on ne va apparaitre que pendant quelques chapitres ?

En ce qui concerne Nami Shîna, je l'ai traité comme les autres, je n'ai pas porté plus ou moins d'attention parce qu'elle allait disparaître.

Ce qui est important pour un personnage, ce n'est pas son temps d'exposition, mais c'est la relation qu'il va avoir avec les autres. Ces interactions sont des vecteurs d'évolutions. Il y a deux grands types de personnages quand on crée une histoire. Les personnages dont on va vouloir suivre l'évolution, et ceux qui vont apporter un changement à l'histoire. Le personnage de Nami est dans la seconde catégorie.

Travailler sur un sujet comme une pandémie qui a vraiment eu lieu n'est pas facile. Avez-vous eu des réactions de lecteurs qui vous ont surpris ?

En général, une bonne partie des lecteurs ont été satisfaits. Ils ont compris que ce n'était pas une caricature mais qu'il y avait une vraie réflexion sur les dérives possibles d'un système de santé poussé à son paroxysme.

Mais les personnes dont les  proches ont été victimes du Covid n'ont pas apprécié l'usage de cette thématique. Ils ont vu ça comme une sorte d'opportunisme, mais ce n'est qu'une infime minorité.

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Maintenant que la crise est terminée. Est-ce que la réalité vous a surpris ? Auriez-vous changé quelque chose dans votre manga ?

Le monde de New Normal est un monde qui s'est développé à part.  Il n'y a plus aucun lien entre notre monde et celui de New Normal. On peut penser que c'est une variante comme une sorte de multiverse, pas une anticipation.

On voit une jeunesse meurtrie, obligée de porter un masque. Est-ce que c'est un parallèle avec le fait que les adultes ont détruit l'environnement et que les nouvelles générations sont sacrifiées ?

C'est vrai que c'est une lecture que l'on peut avoir, mais je n'en ai pas tenu compte dans la construction de mon titre. Je n'ai pas sciemment pensé à un avenir funeste où les enjeux de notre futur ont été décidés par les générations précédentes.

En y réfléchissant, cette idée de jeunesse sacrifiée par une génération précédente qui a brûlé la chandelle par les deux bouts est assez intéressante…

© NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Le vol de drones, est-il le symbole de cette jeunesse qui cherche à fuir cette réalité ?

C'est encore une réflexion très intéressante, mais ce n'est pas un parallèle que j'avais en tête quand j'ai créé mon manga.

Pourquoi avoir utilisé les drones, alors ?

Une des raisons pour laquelle j'ai créé ce club de drones, c'est pour donner un aspect futuriste. Aujourd'hui, les clubs de drones n'existent pas au Japon. Ce qui existe ce sont les clubs de e-sport. Je cherchais avec ces clubs à évoquer l'idée d'un futur assez proche.

Proche à quel point ?

Je dirais une vingtaine d'années.

À partir du 3e chapitre, vous changez complètement le ton du manga en incluant de la science-fiction. Comment vous est venue cette idée ?

Je souhaitais justement m'assurer que tout le monde comprendrait qu'il s'agit d'une dystopie. Ceci à la fois pour que l'on comprenne bien la létalité de ce virus, mais aussi qu'on ne confonde pas avec notre monde. C'est mon éditeur qui a suggéré d'intégrer ces éléments de science-fiction.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.


Comment avez-vous fait pour vous adapter à cette recommandation ?

La proposition est arrivée lorsque je commençais à travailler sur le troisième chapitre. Je pouvais assez facilement insérer ces éléments de science-fiction sans trop changer l'histoire, juste la déplacer un petit peu.

À quel moment avez-vous trouvé le concept de fin ?

Il n'y a pas de fin pour l'instant. Je pense que ce sera un futur radieux.

New Normal est le premier manga d'un nouveau label " Comic Owl " qui appartient au groupe Funguild. Est-ce que vous avez ressenti une liberté ou une pression d'inaugurer un magazine ?

Pour moi, il est évident que si cela avait été un autre magazine je n'aurais pas eu la liberté que j'ai. Mais je pense que cette liberté s'est aussi ressentie du côté des équipes éditoriales. Et puis c'est grisant de découvrir de nouveaux horizons. Un magazine établi a forcément une charte plus ou moins forte, hérité des convictions d'années de publications…

C'est important cette liberté créative pour un auteur ?

Cela dépend au final de l'équilibre entre l'importance que l'on accorde à notre liberté et ce que l'on attend en termes de notoriété. Si l'on souhaite devenir célèbre rapidement, toucher un public gigantesque, alors on va limiter sa liberté créative en s'exprimant dans un cadre défini, qui permettra de toucher plus de lecteurs. Et par cadre je n'entends pas forcément un magazine, mais tout simplement le type d'histoire, du sujet à la manière de la raconter.

Si au contraire on souhaite explorer des chemins de traverse de manière libre, alors on sait qu'il sera plus compliqué de conquérir un grand public.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Dans New Normal, la bouche, masquée en permanence, devient une zone érogène. Comment avez-vous travaillé ce point pour transmettre ce sentiment par votre dessin ?

J'ai eu beaucoup de remarques à ce sujet, mais au risque de vous surprendre je n'ai pas travaillé particulièrement sur ce point. Dans le sens où je n'ai pas fait de recherche pour faire évoluer mon trait vers une nouvelle forme d'expressivité, de sensualité des lèvres. C'est plutôt mon expérience dans les œuvres adultes qui m'a permis d'y arriver. Je voulais donner un sentiment bien précis au lecteur et j'ai réussi.

La bouche, comme les yeux, sont un important vecteur d'expression du visage humain. Comment avez-vous relevé ce défi d'une histoire où tous les personnages ont la bouche masquée ?

C'était en effet un sacré handicap, peut être même le plus gros défi d'un point de vue graphique de ce manga. Mais en même temps celà m'a permis de me concentrer sur les yeux.

On peut faire passer énormément d'expressions rien qu'avec un regard…

J'ai énormément travaillé et progressé dans ma manière de retranscrire les expressions via le regard et les yeux.

Est-ce que depuis que vous réalisez New Normal vous regardez les hommes et les femmes différemment ?

En effet, même s'il y a encore des gens qui portent le masque, quand quelqu'un l'enlève peut-être que je vais machinalement regarder sa bouche.

Vous avez mis des accessoires sur les masques des héroïnes. Comment les avez-vous imaginés ?

Je les ai totalement créés. Je me suis dit qu' il fallait rajouter quelque chose pour justement renforcer l'idée qu'ils étaient devenu une nouvelle norme. Que c'était des accessoires du quotidien au même titre que les lunettes ou des chaussettes.

Quelle est l'expression dont vous êtes le plus fier ?

Le visage où Nami qui est à la fois empli de tristesse et en même temps regorge de douceur.

Dans le tome 2 également, il y a une jeune fille aux cheveux courts qui a l'air banal, mais j'ai énormément travaillé sur son regard pour donner un sentiment d'inquiétude au lecteur, je suis très content du résultat.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

En parlant de Nami, aviez-vous dès le début imaginé qu'elle serait plus âgée ?

Non pas du tout. L'âge n'avait aucune importance dans la création du personnage de Nami. Ce qui était important dans sa création était sa " raison d'être". Dans le cas de l'histoire, j'ai créé Nami pour qu'elle soit un élément perturbateur du quotidien de Hata. Mais elle a pris une place beaucoup plus importante que ce que je m'étais imaginé au début.

Y a t'il eu d'autres personnages qui ont dépassé vos attentes ?

Non, le personnage de Nami est un cas particulier.

Natsuki a un caractère très audacieux, est-ce pour cela que vous en avez fait une sportive ?

Au risque de vous décevoir, j'ai conçu Natsuki pour répondre aux trois règles des héroïnes de comédies romantiques : belle, intelligente et sportive. C'est vraiment un carcan très classique, afin de rallier l'affection des lecteurs. Ensuite on peut influer sur l'histoire via son caractère.

Vous parlez de schéma classique. Avez vous des références ou influences en protagoniste de comédie romantique ?

Je n'ai pas de personnage qui m'ait particulièrement influencé, mais j'aime énormément le manga " Attache-moi" de Ryuta Amazume (publié en France aux éditions Pika NDRL). Le personnage de Nana est également joli, sportif et intelligent. Cela répond à ce fameux dogme.

NEW NORMAL © Akito Aihara 2021/ FUNGUILD, Inc.

Quel est le personnage qui vous ressemble le plus ?

Avant de commencer cette interview, c'est une chose dont on parlait avec un éditeur puisque hier je suis allé chez le coiffeur et en me regardant j'ai trouvé que je ressemblais à Hata. Cela nous a fait rire ce matin.

Est-ce qu'il y a des choses que vous avez du mal à dessiner et d'autres qui sont faciles ?

Il y a beaucoup de choses que je pense avoir du mal à dessiner. Même si j'ai plus de facilités à dessiner les femmes, ma plus grosse difficulté est de dessiner tout ce qui est robot, mecha, mécanique et militaire. C'est très difficile.

Combien de temps avez-vous passé sur le dessin de la 4e couverture ?

J'ai passé le même temps pour toutes les couvertures. En comptant les croquis préparatoires, cela me prend 3 jours.

Avez-vous censuré quoi que ce soit dans votre histoire ?

Pas le moins du monde. J'ai dessiné avec liberté absolue. J'ai pu mettre dans mon manga tout ce que j'avais imaginé. Les seules choses que je me suis empêché de mettre sont des choses qui auraient nuit à l'histoire, aussi bien au niveau de la cohésion de l'œuvre que du rythme narratif.

Tout était prévu et a évolué naturellement, on commence par une approche comédie romantique dans les deux premiers tomes pour aborder un angle beaucoup plus SF dans les tomes 3 et 4.

Vous êtes passé d'une publication hebdomadaire pour votre manga précédent à un rythme mensuel. Est-ce que vous gérer différemment le rythme de l'histoire, le placement des des cliffhanger en fonction du cycle de publication ?

La grande différence entre Bimajyo et New Normal, c'est que dans Bimajyo chaque chapitre peut être lu séparément, comme dans une saga. Chaque histoire est un épisode fini. Dans New Normal, c'est une histoire qui se poursuit et dans chaque chapitre il y aura des points clés qui permettront d'avancer dans l'histoire. Si on va toujours crescendo c'est très fatigant pour le lecteur et pour moi. Donc, il faut faire des pauses dans les révélations pour pouvoir repartir. On ne peut pas sprinter tout un marathon.

(Merci à maître Aihara pour sa disponibilité, aux équipes de Funguild, Kana et Tuttlemori pour l'organisation de cet entretien et à  Emmanuel Bochew pour l'interprétatiat.) 

New Normal, Akito Aihara, éditions Kana, 7,70€