Alberto Contador : La roue tourne

Le Tribunal Arbitral du Sport a condamné le cycliste Alberto Contador, à deux ans de suspension avec effet rétroactif. Il perd donc ses victoires sur le Tour de France 2010 et le Giro 2010 (Tour d’Italie). Une telle sanction ne passe pas inaperçue et souligne des dérives trop souvent camouflées.

Afin de préserver l’éthique du sport de haut niveau et par ricochet le sport de masse (porteur de valeurs pour l’un et symbole d’exemplarité pour l’autre), la sanction du Tribunal Arbitral du Sport vient crédibiliser l’idée que le sport véhicule toujours des valeurs : l’égalité des chances, le fair play, le mérite… Nous pouvons également nous réjouir du courage de l’Agence Mondiale Anti-dopage et de l’Union Cycliste Internationale qui ont joué pleinement leur rôle comme pouvait l’espérer les instances européennes, la France en tête. Toutefois cette décision soulève de nombreuses questions et problématiques : la lenteur et la complexité de la justice sportive,  le surentrainement des sportifs,  la fréquence excessive des compétitions, la passion des journalistes qui est en contradiction avec une investigation raisonnée des autorités de contrôle, etc.

Les méthodes de dopage sont-elles de plus en plus sophistiquées, et donc difficilement décelables ?
Les « spécialistes » du dopage sont rodés depuis longtemps à ces techniques et comme toute économie souterraine, ils bénéficient de moyens et de complicités importantes.  Dans cet engrenage, trop de sportifs sont sollicités et entrent dans le cercle vicieux de la performance sous « perfusion dopante », parfois dès leur plus jeune âge, au point que tout un chacun puisse s’interroger sur l’intégrité éthique des sportifs se hissant sur les podiums . Ce sera l’enjeu de demain de se doter d’une politique de santé publique européenne et mondiale qui gagnera en efficacité scientifique. Cette politique devra impérativement être accompagnée d’un dispositif législatif efficace, allant au-delà de la justice sportive.

Les sportifs de haut niveau ne sont-ils pas victimes du système ?
Je pense que le sportif de haut niveau, érigé médiatiquement en modèle, n’est au final qu’un citoyen, engagé dans un terrible engrenage, entre l’élévation des cadences, les intérêts économiques toujours plus importants et les contraintes règlementaires voire juridiques justifiées par la lutte anti-dopage.  
C’est la raison pour laquelle ce système doit être repensé. Si les idoles de cette société moderne doivent incarner le rôle de modèle, d’exemplarité basée sur des devoirs et des obligations, quid de leurs droits de citoyen ? L'Europe doit-elle consentir à faire une exception de la protection de la vie privée des individus pour le cas des sportifs ? Ne serait-ce pas là une forme de reconnaissance de la spécificité du sport ?

On apprenait ces derniers jours, que Jeannie Longo avait été perquisitionnée à son domicile sur instruction du parquet de Grenoble.
Le monde du cyclisme n’échappe à aucuns contrôles anti-dopage, en particulier car il est bel et bien présent dans ce sport. Pour s'en convaincre, il suffit de consulter les vrais chiffres (www.cyclisme-dopage.com). Le constat est sanglant, le dopage n'est plus le fait de quelques brebis galeuses. Après 8,3% en 2009, 9,6% en 2010, le nombre de coureurs ayant déjà été impliqué dans des affaires de dopage grimpe à 10,6% cette année, soit 21 coureurs. Dans le TOP 10 du Tour de France 2011, au moins 4 coureurs ont été contrôlés positivement ou avoués plus tard avoir été sous produits dopants pendant le Tour.
Jeannie Longo et son mari Patrice Ciprelli font partie des personnalités du cyclisme et sont donc régulièrement écorchés par des scandales, on ne devrait même plus s’étonner de cela. Ce qui est désolant c’est encore une fois de voir les êtres humains pris dans l’engrenage de la compétition et prêts à aller toujours plus loin pour gagner toujours plus. Ils usent et abusent  des failles pour éviter ces contrôles (non
communication de localisation, retard au contrôle…).
Les performances de hauts-niveaux sans dopage sont possibles, gr
âce à un entrainement adapté, une alimentation équilibrée, des périodes de récupération suffisantes, et une assistance de qualité !
Le risque serait également qu’à cause de la surmédiatisation des affaires de dopages, la présomption d’innocence ne soit plus respectée, c’est qui est entre autre le cas de Jeannie Longo.

Et Andy Schleck devient-il ce citoyen modèle, symbole d’un esprit sain dans un corps sain ?
Que vaut une médaille olympique, un titre de champion du monde ou un maillot jaune lorsqu’ils vous sont remis bien des années après l’événement sportif ? Le sport couronne son roi dans l’instant. Tout sportif remportant un titre, une épreuve, bénéficie d’un nouveau statut qui lui ouvre des sphères médiatiques et commerciales que vous ne pouvez retrouver à posteriori.
Nous souhaitons tous penser désormais qu’Andy Schleck soit un sportif « propre », mais il ne pourra de facto jouir de l’image ô combien symbolique dont a bénéficié Alberto Contador, sur le podium des Champs Elysées…