Si
l'Antarctique est le dernier continent de notre planète à avoir
été découvert, il reste aujourd'hui au coeur des activités scientifiques
et des passions humaines, toujours aussi vivaces.
Le "baromètre de la Terre"
La situation isolée de l'Antarctique et la jeunesse des
chemins d'accès lui ont permis d'être protégé
des activités humaines : la neige, la glace et l'eau
sont sans doute les plus pures au monde. Les scientifiques peuvent
ainsi y étudier une atmosphère neutre et leurs résultats
ne sont donc pas faussés par la pollution.
Pour cette qualité exceptionnelle, mais aussi pour sa
situation reculée et inaccessible, l'Antarctique est
utilisé comme indicateur de la santé de notre
planète, telle une sonnette d'alarme naturelle.
Les dernières découvertes
Depuis une cinquantaine d'années, les scientifiques observent,
à partir de l'analyse de carottes de sédiments, un accroissement
de la fonte de la calotte glacière. Une équipe
anglo-américaine estime que sur 244 glaciers, 87 % ont
reculé de 600 mètres en moyenne depuis les années 1950. Ce phénomène
s'explique par le réchauffement de la planète,
qui cause l'effondrement de morceaux de glace, dont la surface
pourrait parfois atteindre celle d'un département français,
comme l'a montré l'exemple de la plate-forme glaciaire
de Larsen-B, en février 2002. On estime que les températures
ont augmenté de 2,5 °C depuis 50 ans : si ce chiffre
peut paraître désuet, il est pourtant responsable
ces effondrements spectaculaires.
Au même endroit, les scientifiques de l'US Antarctic Program
ont découvert un écosystème unique : des
tapis de bactéries et de coquillages ont été
observés à 850 m de profondeur, dans les fonds
marins.
Les Américains devraient achever cette année la
construction d'une route afin de relier les deux bases qu'ils
possèdent sur le continent, McMurdo et Scott-Amundsen.
Cette route, baptisée "Traverse Highway" et
longue de 1 600 km, doit assurer le ravitaillement des équipes
scientifiques, jusque-là assuré par les avions
; mais beaucoup interprètent ces travaux comme une volonté
plus prononcée d'occuper et de contrôler l'espace
antarctique. D'autres dénoncent la pollution que risque
d'entraîner la circulation des véhicules. Pour
l'anecdote, la base Mac Murdo, qui abrite plus d'un millier
de chercheurs lors de l'été austral, est équipée
de distributeurs de billets et de salles de bowling, telle une
véritable micro-société dans l'endroit
le plus hostile et instable de la planète.
La nouvelle station britannique Haley VI, qui remplace la plate-forme
Haley V, célèbre pour avoir été
le lieu de découverte du trou de la couche d'ozone, devrait
voir le jour en 2008. Cette base originale se veut mobile car
elle pourrait se déplacer vers les zones solides du continent
grâce à un système de "pilotis-skis".
Ses formes sont conçues pour permettre au vent de chasser la
neige qui envahit habituellement les parois des stations scientifiques.
A l'issue d'un concours organisé par le British Antarctic
Survey, ce sont les cabinets d'architectes Faber Maunsell et
Hugh Broughton qui auront l'honneur de bâtir Haley VI.
44 pays sont aujourd'hui présents en Antarctique à travers
leurs équipes scientifiques.
Le 13 juillet dernier a marqué le coup d'envoi de la
50ème expédition antarctique russe. Elle regroupe près
de 200 chercheurs polaires, aviateurs et membres d'équipages
des deux navires scientifiques Akademik Fedorov et Akademik
Alexandre Karpinski. Les chercheurs russes vont réaliser
de nouvelles études sur les bases Vostok, Progress, Droujnaïa-4
et Mirny ainsi que dans les mers australes.
Le tourisme
Le tourisme antarctique devient à la mode. Dès
les années 1960, Lars-Eric Lindblad, créateur du premier
tour-opérateur dans la région, lance cette idée
lucrative ; durant l'été austral 2004, près
de 20 000 visiteurs ont admiré les paysages dépouillés
de ce continent sauvage. Partant du Chili, d'Argentine, de Nouvelle-Zélande
ou d'Afrique du Sud, les expéditions en bateau sont vendues
à partir de 3 700 dollars. Mais les tours aériens sont plus
accessibles : admirer les manchots quelques heures coûte
environ de 800 à 3 000 $. Si l'observation de la vie sauvage
est tentante, la fragilité de l'écosystème
tend à être oubliée. Le tourisme
met en danger les équilibres naturels. Certaines maladies
véhiculées par l'Homme pourraient être à
l'origine d'une augmentation de la mortalité chez certaines
populations animales. De façon moins directe, le tourisme
suppose des enjeux économiques forts qui pourraient influencer
les décisions des acteurs et partenaires et à
long terme, peser sur des décisions qui n'avaient jusqu'alors
pour unique motivation que la protection du continent.
S'il n'existe aucune véritable installation touristique,
une station privée à l'intérieur des glaces accueille aujourd'hui
les expéditions d'alpinisme.
En savoir plus
» Le site Antarctica.org
(en anglais) contient de nombreuses informations sur les expéditions
polaires actuelles.
Photo © IPEV
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