Qui sont les 1800 Français qui pourraient payer 20 milliards de nouveaux impôts par an ?
C'est une taxe qui, à elle seule, permettrait de faire la moitié des 40 milliards d'euros d'économie souhaités par l'Etat en vue du budget 2026 : "la taxe Zucman", du nom de l'économiste et directeur de l'Observatoire européen de la fiscalité, Gabriel Zucman. Une proposition de loi visant la mise en place de ce texte a déjà été adoptée à l'Assemblée nationale en février 2025 et doit être examinée par le Sénat à partir du jeudi 12 juin.
Cette taxe, qui pourrait rapporter au moins 20 milliards d'euros selon Gabriel Zucman, ne concernerait qu'une minorité de Français : les plus riches. Le texte prévoit un nouvel impôt plancher de minimum 2% sur les patrimoines des "centimillionnaires", un cercle restreint dans lequel n'entrent que ceux dont la fortune atteint au moins les 100 millions d'euros, soit environ 1 800 personnes en France. Concrètement, si le montant des impôts préexistants payés par ces riches contribuables - comme l'impôt sur la fortune, celui sur la fortune immobilière et celui sur la contribution sociale généralisée - ne dépasse pas les 2% de leur patrimoine, alors ils devraient payer la différence au nom de la taxe Zucman.
En visant moins de 2 000 personnes sur les plus de 68 000 millions de Français, la taxe Zucman peut paraître injuste. Pourtant, selon l'analyse de Gabriel Zucman auprès de Franceinfo, elle permettrait de "mettre en conformité notre principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt". L'économiste soutient qu'au regard de leurs moyens et de leurs patrimoines, les classes moyennes payent davantage d'impôts que les ultra-riches, et ils avancent des chiffres : les classes moyennes verraient 50% des revenus acquittés en impôts et en cotisations, contre seulement 27% pour les plus grandes fortunes. Une différence expliquée en partie par l'optimisation fiscale à laquelle recourent les plus grands portefeuilles. "Les études récentes ont établi qu'à partir de ce niveau de fortune, l'impôt devient régressif", a-t-il ajouté pour justifier encore le ciblage d'une si petite partie de la population.
Des obstacles à la mise en place de la taxe Zucman
Mais l'hypothèse de l'entrée en vigueur de la taxe Zucman fait naître des craintes quant à l'augmentation de l'exil fiscal des Français les plus riches. Problème qui n'en serait pas un selon le directeur de l'Observatoire européen de la fiscalité qui a pensé à un "bouclier" contre l'exil fiscal comme expliqué sur Franceinfo. Une référence à une mesure qui "soumettr[ait] les éventuels exilés fiscaux à cet impôt plancher de 2% jusqu'à cinq ans après leur départ. C'est une innovation et ce serait de nature à réduire encore davantage le risque d'exil fiscal". Gabriel Zucman a par ailleurs rappelé que le risque d'exil fiscal était limité, plusieurs études démontrant que les hausses d'impôt ne font pas fuir les grandes fortunes autant que certains le prétendent.
La proposition de loi sur la taxe Zucman semble donc avoir de nombreux bons points aux yeux du gouvernement et est très largement soutenue par la gauche. Deux députées issues du groupe Ecologiste et Social, Clémentine Autain et Eva Sas, sont à l'origine du texte et l'ensemble du Nouveau Front populaire le défend. De même que plusieurs économistes, dont Olivier Blanchard qui est l'ancien chef économiste du Fonds monétaire international (FMI) et de nombreuses ONG comme l'Oxfam.
En revanche, le texte ne séduit pas la droite généralement opposée aux impôts visant exclusivement les plus riches. Les chances pour le texte soit adopté au Sénat, largement dominé par les élus Républicains et les Centristes, sont donc faibles.