Procès Monique Olivier : des confessions et encore des zones d'ombre

Procès Monique Olivier : des confessions et encore des zones d'ombre Le procès de Monique Olivier, ex-femme du tueur en série Michel Fourniret se poursuit pour une troisième journée ce jeudi 30 novembre. Après les enquêteurs belges ce sont maintenant les enquêteurs français à prendre la parole.

Pour cette troisième journée, jeudi 30 novembre, du procès de Monique Olivier, l'ex-femme du violeur et tueur en série Michel Fourniret, c'est au tour des premiers enquêteurs français chargés de l'affaire de s'exprimer. L'accusée revient devant la justice, vingt ans après, âgée dorénavant de 75 ans. Le tueur en série est décédé en 2021, il avait été condamné à la perpétuité incompressible pour les meurtres de sept jeunes femmes ou adolescentes entre 1987 et 2001.

Vingt ans après un nouveau procès s'est ouvert ce mardi 28 novembre à la cour d'assises des Hauts-de-Seine concernant trois affaires : celle tristement célèbre d'Estelle Mouzin pour sa potentielle complicité d'enlèvement et séquestration suivie de mort au préjudice de l'enfant, ainsi que celles de Joanna Parrish et de Marie-Angèle Domèce. Elle est également jugée pour enlèvement, séquestration, viol ou tentative de viol, et meurtre des deux autres jeunes femmes. Pour rappel, les corps de ces trois victimes n'ont jamais pu être retrouvés.

Mercredi 29 novembre, pour la seconde journée aux assises de Paris, ce sont les enquêteurs belges, les premiers chargés des affaires de disparitions des jeunes filles, qui se sont exprimés. Trois enquêteurs devaient être présents mais seulement l'une d'entre eux est venu témoigner. Il s'agit d'une enquêtrice de la police judiciaire de Namur. Bien qu'elle a commencé son discours en précisant qu'elle n'a pas eu le temps de se replonger dans les nombreuses archives de l'affaire, elle est revenu en détail sur le début de l'affaire.

Elle a ensuite insisté sur le rôle apporté par l'accusé, que ce soit dans les crimes commis ou dans l'avancée de l'enquête par ses déclarations, notamment sur son ex-mari. Dans l'après-midi, Francis Nachbar, l'ancien procureur de la République de Charleville-Mézières, a insisté notamment sur les liens que le couple entretenait à propos de leurs crimes. Le témoignage de Gilles Latapie, l'ancien président de la cour d'assises de Charleville-Mézières, s'est davantage concentré sur le premier procès du couple en 2008.

Mardi 28 novembre, Monique Olivier est apparue seule dans le box des accusés. Son expression vide et le ton peu assuré de sa voix ont été les mêmes que lors des précédents procès, notamment lorsqu'elle a dit tout bas : "Je vais essayer de faire de mon mieux". Une fois que le président de la cour d'assise des Hauts-de-Seine a terminé de rappeler les accusations dont elle fait l'objet, l'accusée a déclaré regretter "tout ce qu'il s'est passé". 

Divorcée depuis 2010 de Michel Fourniret et après le décès de ce dernier en 2021, Monique Olivier représente aujourd'hui la dernière chance pour les familles des victimes d'obtenir des réponses. Jusqu'à présent, "elle a toujours dit la vérité sur les meurtres", a affirmé l'avocate des proches de Marie-Angèle Domèce, Me Corinne Herrmann, dont Sud-Ouest se fait l'écho. "Elle manipule sur des détails si ça la met en cause, mais elle ne ment pas", a-t-elle ajouté.

De même, il apparaît que si les révélations de Monique Olivier ont permis l'arrestation de son mari, mais aussi de lui attribuer au fil des ans d'autres affaires, celle qui a d'ores et déjà été condamnée par deux fois pour complicité dans les meurtres commis par Michel Fourniret ne se livre que par bribes. "Elle ne nous dit pas où est le corps [d'Estelle Mouzin, ndlr.], n'avoue pas toutes les affaires", relève Me Didier Seban, avocat du père de la jeune fille disparue en 2003, dont Sud-Ouest rapporte également les propos.

"J'étais tellement seule à l'époque", affirme Monique Olivier

L'ogre des Ardennes, comme on le surnomme, Monique Olivier l'a rencontré il y a plus de trente-cinq ans, en 1987. Elle sortait alors tout juste d'un mariage compliqué, avec un quotidien ponctué par la jalousie et la violence de son premier époux et père de ses deux premiers fils, nés en 1980 et en 1981. Alors quand, en 1987, elle tombe sur cette petite annonce publiée par Michel Fourniret dans l'hebdomadaire catholique Le Pèlerin qui indique "Prisonnier aimerait correspondre avec personne de tout âge pour oublier solitude", Monique Olivier se lance dans une correspondance avec cet inconnu qui purge une peine de prison pour viol à Fleury-Mérogis. Petit à petit, le "fauve" et la "mésange" lient une relation amoureuse, et ce, malgré l'obsession de Michel Fourniret dans ses lettres pour les jeunes vierges.

"J'étais tellement seule à l'époque", confiera Monique Olivier en 2008, lors de son premier procès aux assises. Et de renchérir : "Je me raccrochais à quelqu'un." Au micro de BFM TV, lundi 27 novembre au matin, son avocat, Me Richard Delgenes, qui dit avoir sollicité un collège d'experts, s'est prononcé sur la personnalité de sa cliente. "On arrive a un quotient intellectuel de 91 et on nous la décrit comme une personne soumise." Selon lui, il faudrait même faire attention lorsqu'on l'interroge, car Monique Olivier aurait, d'après lui, "tellement besoin d'exister pour quelqu'un, parce qu'elle n'a pas d'estime d'elle-même, que si vous lui apportez une existence, que vous soyez juge d'instruction ou tueur en série, elle va essayer de vous satisfaire". Pour lui, Monique Olivier serait même capable de faux aveux pour faire plaisir à quelqu'un qui lui en demanderait. "Elle est très manipulable", a-t-il martelé lundi, à la veille du procès.

Pour autant, les conclusions des experts sont diverses à son sujet, relève Sud-Ouest. Si certains s'accordent sur un QI limité, d'autres pointent que "le crime n'est pas une question de QI", comme l'avance Me Corinne Herrmann, voire que Monique Olivier, qui a par le passé été capable, entre autres, de piéger des jeunes femmes pour les servir à son époux, n'hésitant pas à aller jusqu'à le stimuler sexuellement pour qu'il passe au viol, comme cela a été le cas dans l'affaire Laville, serait en réalité capable de manipulation. Alors, seule certitude à l'aube de ce nouveau procès, le mystère Monique Olivier, aujourd'hui âgée de 75 ans, reste intact.